Depuis 1987, des spéléologues québécois organisent des expéditions pour explorer les incroyables réseaux de caverne de la Sierra Negra, au Mexique. L’équipe du projet Mexpé planche actuellement sur une nouvelle expédition qui pourrait avoir lieu à l’hiver 2024. C’est donc le moment de se plonger dans un roman d’aventures, Sierra Negra, inspiré directement des toutes premières expéditions.

L’auteur, Jean-Benoît Nadeau, était un jeune journaliste lorsqu’il a participé à l’expédition de 1987-1988, puis à celle de 1991. Il est revenu avec un grand reportage, mais aussi avec une idée de roman.

« J’ai écrit pendant 12 ans avant de le laisser et de l’oublier pendant 16 ans, raconte-t-il en entrevue. J’hésitais entre le récit journalistique et le roman. En 12 ans, je n’ai pas réussi à résoudre cette question. »

M. Nadeau a écrit depuis plus de 2000 reportages et chroniques et a signé une vingtaine d’essais, seul ou en collaboration. « Deux choses m’ont reparti en 2019 pour le roman. En premier, mes filles m’ont demandé quand j’allais écrire un vrai livre… Je leur ai expliqué ce que j’avais déjà fait. Elles m’ont alors dit : “Pourquoi tu ne le finis pas ?” »

L’autre chose, c’est la découverte d’un prolongement important de la grotte de Saint-Léonard, qui l’a ramené dans le monde de la spéléologie.

« Ce qui est intéressant avec la spéléo, c’est que c’est la dernière grande discipline géographique réellement exploratoire sur terre, déclare-t-il. Contrairement aux profondeurs sous-marines, on ne peut pas envoyer un drone ou un sous-marin téléguidé. L’environnement est trop complexe. Il n’y a rien qui peut à la fois marcher, ramper, descendre sur une corde, monter. »

Bref, c’est un environnement intéressant sur le plan sportif et scientifique qui se prête très bien à l’aventure.

Dans le roman, l’expédition part du mauvais pied en raison de conflits sous-latents au sein de l’équipe : on se cache des choses, on fricote avec la conjointe de l’autre…

« La vraie expédition n’était pas dysfonctionnelle, assure Jean-Benoît Nadeau. Elle était même très fonctionnelle en dépit des difficultés qu’on a eues. Et il n’y avait pas de triangles amoureux. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Le roman Sierra Negra décrit les interactions parfois difficiles avec la population locale.

Un monde différent

Mais, comme dans le roman, il y a eu des difficultés avec certains éléments de la population locale, essentiellement d’origine nahuatl.

François Gélinas, un spéléologue d’expérience qui a participé à deux expéditions au Mexique, dont celle de 1991, raconte que les participants ne réalisaient pas trop tout ce qui se passait en arrière-plan.

« On était une gang de petits Québécois qui débarquait dans un monde différent, sans avoir aucune idée de l’interaction interculturelle, se rappelle-t-il. Une famille nous accueillait, mais les autres familles étaient contre notre présence. Les gens avaient un peu de difficulté à imaginer qu’on était là pour le plaisir de l’exploration. Ils nous prêtaient souvent des intentions coloniales et mercantiles. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

François Gélinas a participé à l’expédition Mexpé 2007.

Jean-Benoît Nadeau a demandé à François Gélinas et à un autre spéléologue présent lors des premières expéditions, Michel Labrie, de lire son manuscrit pour y déceler d’éventuelles erreurs techniques en fait de spéléologie.

« J’avais fait tout mon possible pour que ce soit simple, raconte l’auteur. Mais à un moment donné, un personnage devait faire quelque chose qui, dans les faits, n’était pas correct. On a fait quelques petites corrections techniques. »

François Gélinas a beaucoup aimé sa lecture.

Ce qui est fascinant, c’est que tout ce qui est en dehors de l’esprit romanesque ou de l’esprit un peu fantastique de son histoire, tout le reste, tout le décor planté, ça correspond à une réalité, ça ressemble à ça, la Sierra Negra. Il y a des tensions entre les groupes familiaux, il y a des armes qui sortent, il y a de l’argent qui circule.

François Gélinas, spéléologue

Comme lors de la véritable expédition, les personnages du roman découvrent des gouffres fabuleux. Les membres de l’expédition de 1987-1988 étaient notamment descendus au fond d’un puits de 329 mètres de plein vide, un record américain à l’époque.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Pendant l’expédition Mexpé 2007, Jacques Orsola, surnommé Larouille, remonte sur la corde vers la sortie du puits.

Jean-Benoît Nadeau souligne que même s’il s’agit d’un roman de spéléologie, tout ne se passe pas sous terre. « C’est comme un bon film de guerre, il n’y a pas des batailles tout le temps. »

Évidemment, il y a plus de péripéties dans le roman que dans la vraie vie (même si plusieurs péripéties sont inspirées d’évènements survenus durant les véritables expéditions), plus de violence aussi. Il y a un autre élément qui se démarque.

« Ils ne sont jamais malades alors que nous autres, on était au Mexique, on était tout le temps malade, lance Jean-Benoît Nadeau. Mais là, pour les rebondissements de l’histoire, il fallait que les gens soient en santé ! »

Sierra Negra

Sierra Negra

Éditions Château d’encre

448 pages

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