Catherine Turgy a déjà parcouru plus de 3000 km à pied sur le Pacific Crest Trail, sentier de 4265 km qui traverse tout l’ouest des États-Unis, depuis la frontière mexicaine jusqu’à la canadienne. Elle n’a jamais été aussi en forme, abattant régulièrement des journées de près de 40 km.

Elle a toutefois un souci : pour accomplir cette prouesse, elle doit consommer des quantités phénoménales d’aliments riches et de sucre. « J’ai une inquiétude par rapport aux effets à long terme, surtout pour le sucre, confie-t-elle lors d’une journée de repos près du mont Shasta, dans le nord de la Californie. Il va vraiment falloir que je fasse une désintox. »

Catherine a peut-être raison de s’inquiéter : une étude indique que les artères d’un randonneur qui a parcouru le même sentier en 2019 se sont sérieusement dégradées pendant le trajet. « Nos résultats suggèrent qu’un grand volume d’exercice ne compense pas une mauvaise diète », écrivent les auteurs de l’étude, Thomas Heinbockel et Daniel Craighead.

Catherine Turgy a entamé sa randonnée le 21 mars dernier à la frontière mexicaine. Son corps s’est rapidement adapté à cette marche continuelle. « Je suis devenue une machine à marcher. Au début, je faisais des journées de 20 km, j’étais fatiguée, j’avais mal en dessous des pieds. Maintenant, je fais des 39 km, j’ai zéro douleur et je pourrais repartir aussitôt. »

Pour suivre ce rythme, il faut du carburant : des calories. Il faut surtout qu’elles soient compactes et légères, car le sac à dos doit transporter plusieurs jours de nourriture.

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE CATHERINE TURGY

Lors des ravitaillements, les randonneurs en profitent pour faire le plein.

« On calcule toujours le ratio calorie-poids, raconte la randonneuse. L’autre jour, un randonneur a carrément acheté un paquet de pâte à biscuits. C’était 2400 calories pour le paquet. Il a mangé ça pendant un jour et demi. »

Une diète « pas nécessairement santé »

Le matin, Catherine Turgy ingère une brioche à la cannelle et du café additionné de poudre protéinée. Une demi-heure plus tard, elle avale une barre protéinée et un sachet de beurre d’arachide. « Parce que j’ai déjà faim », explique-t-elle.

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Catherine Turgy a récemment passé la barre des 1500 milles. Elle n’a jamais été aussi en forme.

Pendant la journée, elle mange d’autres barres protéinées, des Snickers, des M & M et des bonbons.

Pour les repas, il serait trop cher d’en consommer des lyophilisés chaque soir. Ils ne se trouvent pas facilement, de toute façon.

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Pour marcher de grandes distances tous les jours, il faut des calories.

On devient créatif : on prend des sachets de patates pilées en poudre, des nouilles ramen, du couscous en sachets, du SideKicks…

Catherine Turgy, randonneuse de longue distance

Lorsque les randonneurs se rendent dans de petites villes pour se ravitailler, ils se précipitent d’abord au « shack à burger », « parce que si on allait tout de suite à l’épicerie, ça coûterait une fortune ».

Catherine Turgy essaie cependant de profiter des journées de ravitaillement pour consommer des légumes et des fruits frais. Il reste que, généralement, « c’est la quantité avant la qualité ».

Thomas Heinbockel avait le même genre de diète pendant sa propre randonnée sur le Pacific Crest Trail, qu’il a parcouru dans un temps extrêmement rapide de 112 jours. C’est lui, le sujet de l’étude, qu’il a publiée en 2021 avec Daniel Craighead, professeur adjoint au département de physiologie de l’Université du Colorado.

Sur le sentier, il consommait des barres de chocolat, des pâtisseries commerciales, des croustilles, des noix et du jerky. Lors des ravitaillements, il se lançait dans les cheeseburgers, la pizza et la crème glacée.

En comparant certaines données avant et après la randonnée, les auteurs ont réalisé que, même si le poids du randonneur et sa masse corporelle n’avaient pas vraiment changé, ses artères avaient pris un dur coup, augmentant ses risques de crise cardiaque. Sa rigidité artérielle avait grimpé de 5 % alors que la vasodilatation dépendante du flux sanguin (une mesure du bon fonctionnement de l’endothélium, une couche cellulaire à l’intérieur des vaisseaux qui joue un rôle dans la fluidité sanguine) avait chuté de 25 %.

Les auteurs ont reconnu les limites de l’étude, qui ne portait que sur une personne. Ils estiment toutefois que les randonneurs qui entament un tel périple devraient être au courant des risques que pose un grand volume d’exercice accolé à une diète de piètre qualité.

Catherine Turgy prévoit terminer sa randonnée autour du 30 août, si tout va bien. « C’est surtout le après qui m’inquiète. Comment je vais me sevrer ? Je n’aurai pas le choix. Je ne pourrai pas continuer à manger comme ça. »

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