Comme le Canadien il y a quelques années, Yvon Michel a osé prononcer le mot en « R ». Au moment de fêter son 20e anniversaire – et le promoteur, son 71e –, le Groupe GYM annonce une reconstruction pour les trois prochaines années.

« On ne se cache pas : Groupe Yvon Michel est en reconstruction », a lancé son PDG en entamant mardi matin un point de presse pour soutenir ses 173e et 174e galas, les 4 avril et 16 mai, au Cabaret du Casino de Montréal.

« On est donc à la recherche de nouveaux talents. On est très heureux du cœur de notre organisation, qu’on a ici en plus de quelques autres boxeurs, mais, comme vous le savez, on n’a jamais encadré beaucoup de boxeurs en même temps. C’est la raison pour laquelle on peut se concentrer sur le talent qu’on a et le développer rapidement, avec nos ressources et nos capacités. »

Micro à la main, devant les pugilistes attablés, Yvon Michel a fait venir sur scène quelques-uns des aspirants qu’il souhaite faire connaître dans les prochains mois. Ils ont pour nom Theo Owusu (3-0, 2 K.-O.), Bondo Winner et Reid Twohey et ils lui ont été recommandés par des entraîneurs de confiance, Howard Grant, Stéphan Larouche et Ian McKillop. Beaucoup de volonté, peu ou pas de notoriété.

D’où le mot en « R » qui causait des boutons à l’ex-DG Marc Bergevin, qui lui en préférait un autre, soit la réinitialisation « sur le pouce ». « On ne peut pas vous le cacher non plus, a concédé Yvon Michel dans un échange avec les journalistes. Vous êtes capables de voir où on en est, ce qu’on fait. Ça nous donne justement l’occasion de travailler et de retourner aux sources. »

Pomerleau sur les traces de Ouellet ?

Le promoteur a d’ailleurs fouillé dans sa vidéothèque pour revoir de vieux combats de Stéphane Ouellet, son ancien protégé qui remplissait le Centre Molson à la fin des années 1990 et au début de 2000 lors de sa trilogie contre Dave Hilton fils. Sur l’internet, il est tombé sur le 12e duel du poète de Jonquière, qui avait vaincu l’Américain James Hughes à Chicoutimi en 1994.

Aux yeux d’Yvon Michel, Derek Pomerleau (7-0, 5 K.-O.), que son entraîneur Stéphan Larouche aime comparer à Ouellet, est à peu près rendu au même stade de développement. Le Mexicain Carlos Mohamed Rodriguez (15-12-1, 6 K.-O.), son prochain vis-à-vis le 4 avril, serait similaire à Hughes.

« Ce n’est rien de comparable à ce que Derek a affronté jusqu’à présent, a assuré le patron de GYM. C’est un combat qui va nous donner une idée précise de la valeur de Derek. »

Le gaucher de 23 ans, un athlète pressé de son propre aveu, n’a « pas levé le pied de la pédale à gaz » depuis sa victoire par abandon au premier round du Tchèque Milan Ganoska le 14 mars.

« J’ai hâte de me battre, ça n’avance pas de la manière dont je veux, mais quand je prends une pause et que je regarde où je suis rendu, je constate que je suis déjà à un combat de huit rounds », s’est félicité celui qui a fait ses débuts professionnels il y a deux ans. « Quand j’étais haut comme ça, c’est ce dont je rêvais. »

« Un solage solide »

À la différence de Kent Hughes et de Jeff Gorton, Yvon Michel ne peut pas se permettre de couler volontairement dans l’attente de jours meilleurs et du repêchage d’un talentueux défenseur autrichien. Pour tenir le bateau à flot, il compte sur Kim Clavel comme tête de pont. La Montréalaise de 33 ans est elle-même en phase de reconstruction après son revers controversé en combat d’unification contre Evelin Nazarena Bermudez à la Place Bell, le 7 octobre.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Kim Clavel

Malgré la houle des derniers mois, la confiance de l’ex-championne mondiale des mi-mouches (108 lb) est totale envers le Groupe GYM et son principal dirigeant.

Sent-elle une pression additionnelle ? « J’ai l’impression d’être un solage assez solide et tout part de la base, a-t-elle répondu du tac au tac. Ça fait longtemps que je suis là, et j’ai confiance en mes moyens. »

J’ai confiance en Yvon. Il a toujours une petite carte cachée dans sa poche.

Kim Clavel

Pour sa relance, Clavel (17-2, 3 K.-O.) se mesurera à l’Espagnole d’origine marocaine Fara El Bousairi (8-3, 3 K.-O.). « C’est une fille très agressive, baveuse, cocky, qui sort la langue, qui est tatouée », l’a décrite la native de Joliette, à qui ce profil semble plaire. « Elle a une prestance impressionnante. »

La confrontation se déroulera à un poids négocié de 110 lb. « Ce n’est pas une balade dans le parc, ça va être un bon combat », a promis la protégée de l’entraîneuse Danielle Bouchard, qui a retrouvé le bonheur après la pause de quelques mois qui a suivi la deuxième défaite de sa carrière. « Je suis née pour être en camp d’entraînement, je suis née pour boxer. »

Houle veut « faire mal »

Yvon Michel a réitéré qu’il ambitionne d’organiser à l’automne une bagarre d’unification des quatre ceintures mondiales des mi-mouches qui opposerait les deux dernières tombeuses de Clavel, Bermudez et la Mexicaine Yesica Nery Plata. La vainqueure affronterait ensuite la Québécoise, qui prévoit se rebattre le 16 mai.

Le 4 avril, Clavel sera épaulée par Marie-Pier Houle (9-1, 2 K.-O.), qui s’est donné le défi de faire subir un premier K.-O. à sa prochaine adversaire, l’expérimentée Argentine Marisa Joana Portillo (20-18-3, 4 K.-O.).

« C’est une fille à qui je peux faire mal, a anticipé Houle. C’est un peu mon objectif. Je suis la Marie-Pier Houle méchante qui a vraiment envie de faire mal présentement ! »

De la musique aux oreilles d’Yvon Michel, toujours sous le coup d’une suspension pour avoir apostrophé un juge, mais dont le coin est loin de jeter l’éponge.

Akdeniz s’affûte contre un ex-champion mondial

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Mazlum Akdeniz et Yvon Michel

La finale du gala du 16 mai sera assurée par Mazlum Akdeniz (19-0, 8 K.-O.), qui s’y préparera en agissant comme partenaire d’entraînement du Britannique Josh Taylor, ex-champion incontesté des légers qui remontera dans le ring contre Jack Catterall, un gaucher. Le Groupe GYM cherche d’ailleurs un prochain rival gaucher au « southpaw » longueuillois.

Réplique au clan Veyre

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Caroline Veyre

Yvon Michel est revenu en long et en large sur le départ surprise de Caroline Veyre (7-0), qui a choisi de s’installer à Las Vegas après sa séparation avec son entraîneuse Danielle Bouchard et le Groupe GYM, que sa gérante Katia Banel a écorchés dans des articles de Radio-Canada et du Journal de Montréal. Le promoteur d’expérience a assuré que son ex-protégée recevrait l’entièreté des 10 000 $ encore dus par GYM pour la dernière année, qui prévoyait un revenu plancher.

« Elle n’a pas atteint les [paramètres] minimums de son contrat et ça, c’est très, très rare, a-t-il répliqué. Les rémunérations sont établies en fonction de l’importance de l’adversaire et de sa position sur l’évènement. Tout ce que je peux dire, c’est qu’elle n’a juste pas satisfait aux critères. »

Le promoteur a souligné que la boxeuse olympique avait été son athlète la plus active ces 18 derniers mois. Il réfute donc le reproche voulant que GYM n’aurait pas convenablement présidé au développement de Veyre. « Mon matchmaker Vincent Morin m’a dit qu’au contraire, il se faisait refuser des adversaires plus souvent qu’elles étaient acceptées [par les représentants de Veyre]. »

Quant à la récrimination voulant qu’il ait exigé que la boxeuse finance elle-même une sanction pour un duel impliquant une ceinture mineure, il soutient que la demande est venue du clan Veyre lui-même. Or, a-t-il expliqué, il jugeait la recherche d’un tel titre inutile sur le plan stratégique à ce stade de sa carrière.

« Elle a décidé d’aller dans une autre direction, et je n’ai pas essayé de la retenir », a résumé Yvon Michel, qui croit toujours que Caroline Veyre possède « le talent pour devenir championne du monde ».