Tout amateur de lutte des années 1980 se souvient du Honky Tonk Man. Cet insupportable imitateur d’Elvis avait conservé le titre Intercontinental de la WWF pendant 454 jours, jusqu’à ce que l’Ultimate Warrior, propulsé par les cris du Madison Square Garden et qui sait quelles substances, le batte en 31 petites secondes à l’été 1988.

Trente-cinq ans plus tard, Sami Zayn pourrait reproduire ce scénario, sans les substances, entendons-nous. Le Québécois sera une des têtes d’affiche de WrestleMania XL (comme dans 40, pas extra-large) cette fin de semaine.

Zayn a rendez-vous avec Gunther, qui détient ce même titre Intercontinental depuis près de deux ans.

On est à l’ère du contenu, tout est disponible tout le temps. Le plus dur, ce n’est pas de faire quelque chose de bon. C’est de faire quelque chose dont les gens vont se souvenir.

Sami Zayn

« Là, j’ai la chance d’avoir une histoire avec Gunther, souligne Zayn, en entrevue téléphonique avec La Presse. Si je peux faire de quoi de bon, si je gagne, c’est l’occasion de faire quelque chose dont les gens vont se souvenir. Je suis content d’avoir encore cette chance, parce qu’un jour, ça ne sera plus là. »

La comparaison consacrée, c’est que WrestleMania est le Super Bowl de la lutte. Les similitudes vont au-delà de la numérotation des événements ; comme la finale de la NFL, tous les yeux intéressés se tournent vers WrestleMania. Tout joueur de football peut livrer une grande performance un dimanche après-midi en octobre. Mais on se souviendra bien plus de ceux qui le font un dimanche soir en février.

À la lutte, un grand combat un lundi soir, c’est bien. Un grand combat à WrestleMania, c’est mieux.

Un an plus tard

L’an passé, Zayn avait justement créé un de ces moments magiques. Lui et son compatriote québécois Kevin Owens avaient remporté les titres par équipe en finale du premier des deux soirs de WrestleMania. Les quelque 70 000 spectateurs présents au SoFi Stadium en avaient eu pour leur argent, si on se fie à leurs rugissements incessants.

Voyez le combat de Sami Zayn et Kevin Owens à WrestleMania 39

Selon le scénario de son combat, Zayn pourrait créer un autre de ces moments dont les amateurs se souviendront.

Ce sera plus difficile pour Owens. Pas parce qu’il a perdu ses capacités de lutteur ou son charisme, au contraire. Mais plutôt parce qu’il se retrouve dans un scénario moins en vue, un combat à trois pour le titre des États-Unis. Ses adversaires : l’influenceur Logan Paul (l’homme derrière les satanées boissons Prime que vos enfants réclament toujours) et le vétéran Randy Orton (le fils de Cowboy Bob Orton, l’homme dont la fracture de l’avant-bras ne semblait jamais guérir dans les années 1980).

Owens avait été gâté au cours des dernières années, avec le combat par équipe susmentionné, et celui d’il y a deux ans contre le légendaire Stone Cold Steve Austin.

« Côté envergure, ce n’est peut-être pas aussi gros que le combat contre Stone Cold ou celui par équipe, convient Owens. Mais ce qui me fait capoter, c’est la chance de lutter avec des gars qui ont été mes idoles, et Randy Orton en fait partie. Beaucoup de gars avec qui je lutte, je les respecte, mais ça fait partie de la job. Mais quand j’entre dans le ring avec Randy Orton, c’est irréel. C’est du même niveau que Stone Cold, John Cena ou l’Undertaker. C’est un autre moment que je n’oublierai jamais. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Le lutteur de Marieville, Kevin Owens

À défaut de faire partie d’une aussi grande affiche que l’an dernier, Owens a gagné en qualité de vie ces derniers mois. Bon an, mal an, il livrait près de 80 combats par année, si on exclut le ralentissement lié à la pandémie. En 2016, il avait même atteint un sommet de 193 combats, selon le site de référence CageMatch.

Selon cette même base de données, le lutteur de Marieville n’a livré que huit combats en 2024. Ce ralentissement est lié à deux facteurs. D’une part, il s’est fracturé un pied en janvier. D’autre part, il est dispensé des spectacles non télévisés. Ces spectacles sont généralement liés aux histoires que l’on voit à la télévision, et Logan Paul, son ennemi du moment, ne participe pas à ces événements de plus petite envergure.

Owens apprécie cette pause. « C’est comme ça que la WWE s’occupe des gars qui sont là depuis un bout. Ils savent que j’ai une famille et que je n’ai pas eu de pause depuis que je suis arrivé, sauf quand je me suis fait opérer au genou. »

Owens aura donc le temps de faire le plein d’énergie, afin d’en donner pour leur argent aux 62 000 fidèles attendus.

Revoici The Rock

PHOTO DON FERIA, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

The Rock est de retour pour se produire dans l’un des principaux événements de WrestleMania de ce week-end.

WrestleMania XL marque par ailleurs le retour de l’enfant chéri. Onze ans après son dernier « vrai » combat, The Rock, connu au cinéma comme Dwayne Johnson, est de retour à la WWE et participera à la finale du premier soir, un combat en équipe avec son cousin Roman Reigns, contre Cody Rhodes et Seth Rollins. The Rock a fait plusieurs apparitions à la télévision au cours des dernières semaines, recréant chaque fois la magie qui avait fait de lui le visage de la lutte au tournant du millénaire. « On a vu à Raw [le 25 mars], il a été tellement vicieux avec Cody. Côté personnage, c’est son plus intéressant en 20 ans, estime Sami Zayn. Et il est devenu une vedette mondiale en dehors de la lutte, donc ça peut seulement être bon pour la business. Si ça aide à ce que plus de gens nous regardent, c’est excellent. » Kevin Owens apporte quant à lui une nuance. « Des gens qui ne regardent pas la lutte vont le suivre. C’est cool de l’avoir, mais je ne pense pas que son retour change de quoi à notre mentalité. Tout le monde essaie de travailler le plus fort possible. Ça fait plus d’un an que les arénas sont toujours pleins, qu’on bat des records de foule. C’est peut-être même ça qui a poussé The Rock à vouloir revenir, il voit que tout va bien. » Notons que The Rock fait par ailleurs partie du conseil de direction du Groupe TKO, l’entité qui chapeaute maintenant la WWE.

Sans Vince McMahon

PHOTO JESSE DITTMAR, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES

Vince McMahon fait face à des accusations d’agressions sexuelles graves.

À ce sujet, il s’agira officiellement d’un premier WrestleMania sans Vince McMahon. L’ancien propriétaire et grand manitou de la lutte a quitté l’entreprise dans des circonstances troublantes, quand des allégations d’inconduite sexuelle grave ont refait surface. Une plainte en Cour fédérale a été déposée par une ancienne employée. La symbolique de son départ est forte, mais dans les faits, l’impact de l’homme de 78 ans sur WrestleMania allait déjà en diminuant, selon Owens. « L’an passé, il était à peine là. Il est venu le soir même, mais tout était déjà déterminé et il n’avait eu aucun impact sur mon combat. Donc je ne sens pas que c’est le premier Mania sans Vince. Dans ma tête, c’est fini, il est parti. Ce qui s’est passé, ce qui est vrai et pas vrai, je ne peux pas en juger. Comme compagnie, on était déjà prêts pour son départ depuis longtemps, simplement en raison de son âge. »

Lisez le texte « Sami Zayn : “C’était comme un rêve” »