Un stade plein. Une foule déchaînée. Une ambiance électrique. Une équipe soudée, déterminée à se rendre jusqu’au bout.

Toutes les conditions gagnantes étaient réunies pour une soirée magique au stade Saputo, dimanche. Et ce premier match éliminatoire du CF Montréal, face à l’Orlando City SC, a livré ses promesses. Le party a levé. Solide. Les joueurs et les spectateurs n’ont fait qu’un contre les adversaires, qui multipliaient les mises en échec. Contre Pedro Gallese, aussi, qui s’éternisait sur les remises en jeu. Le gardien d’Orlando a pu réciter toute l’œuvre de Jacques Prévert avant de recevoir un avertissement officiel de l’arbitre Ismail Elfath, lui aussi visé par les huées de la foule et les doléances des joueurs montréalais.

Sur le terrain, dans les tribunes nord, sud, est et ouest, c’était un pour tous, tous pour un. Lorsque, vers la 40e minute, avec un pointage vierge, les joueurs de l’Impact ont démontré des signes de frustration, les spectateurs les ont suivis. À la 65e minute, l’impatience a succédé à la frustration. La défense d’Orlando, tricotée serré, tuait toutes les attaques de l’Impact. Laser de Kamal Miller ? Bloqué. Frappe de Samuel Piette ? Bloquée. Coup franc de Djordje Mihailovic tout juste à l’extérieur de la surface ? Bloqué itou.

Puis à la 68e minute, Ismaël Koné a trouvé un trou dans la maille. Il s’est faufilé entre deux joueurs et a redirigé une passe de Mihailovic derrière Gallese. But. Un premier en carrière, au stade Saputo, pour ce jeune joueur qui a grandi sur les terrains de l’arrondissement de Saint-Laurent, dans le nord de l’île.

Ce but de Koné a allumé le stade. Presque littéralement. Les sections 114, 127, 132 sont disparues sous les fumigènes bleus et blancs. Laurent Duvernay-Tardif a brassé la cloche comme si c’était un simple grelot de Noël. Joyeux vacarme. On se serait crus à Saint-Lambert, pendant un spectacle de Rammstein, de l’autre côté de la Voie maritime.

Après ? Ce fut une fête endiablée, qui a culminé avec un autre but, celui de Mihailovic sur un tir de pénalité, dans les arrêts de jeu. Pointage final : 2-0. Une fois leurs adversaires rentrés au vestiaire, les joueurs du CF sont allés danser avec le Collectif Impact Montréal, puis chanter Sweet Caroline devant Laurent Duvernay-Tardif et les 1642. Moi, c’est une autre chanson qui m’est venue en tête.

Celle de Stéphane Venne, chantée par Emmanuelle, puis par les Académiciens.

Et c’est pas fini, c’est rien qu’un début /

Le vrai soleil on ne l’a pas encore vu /

Et jusqu’aujourd’hui, on n’a rien vécu /

La grande extase, on ne l’a pas encore eue /

Non c’est pas fini, c’est rien qu’un début /

Mais c’est le plus beau des commencements /

Han han han han han han haaaaaaaaaan !

Le Canadien a besoin de renforts

Le Canadien a besoin de renfort en défense. Et vite.

Pas tant pour gagner que pour atteindre l’objectif affiché cette saison : développer les espoirs. Avec les absences prolongées de Michael Matheson et Joel Edmundson, le Tricolore offre du temps de jeu de qualité à Kaiden Guhle, Jordan Harris, Arber Xhekaj et Johnathan Kovasevic. C’est très bien. Encore faut-il qu’ils touchent à la rondelle.

Les indicateurs de possession de rondelle sont inquiétants. Surtout pour Guhle. Depuis le début de la saison, le défenseur albertain a passé plus des deux tiers du temps à forces égales à défendre son territoire. Les optimistes diront qu’il améliore son jeu sans la rondelle. Hum. Ouais. Les réalistes auront compris que ce n’est pas l’idéal.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Kaiden Guhle

D’habitude, lorsqu’un jeune défenseur amorce sa carrière dans la LNH, son entraîneur-chef le chouchoute. Le protège. Comment ? En l’envoyant dans la mêlée contre le troisième ou le quatrième trio. Ou encore, en lui offrant des mises en jeu favorables.

La saison dernière, 36 des 47 défenseurs recrues de la LNH ont pris part à plus ou autant de mises en jeu en zone offensive que défensive. Ce fut le cas, notamment, de Mattias Norlinder et Jordan Harris, avec le Canadien. Cet automne, avec quatre recrues dans son alignement, Martin St-Louis n’a pas ce luxe. Il est forcé d’envoyer ses jeunes contre les meilleurs attaquants des autres équipes — même dans leur zone. Parmi les 13 défenseurs recrues de la LNH cette saison, Guhle et Kovacevic sont ceux qui ont le plus souvent participé à une mise en jeu dans leur territoire.

Évidemment, ça paraît dans les statistiques. Prenez les occasions de compter de qualité du Canadien lorsque ces joueurs sont sur la patinoire. Soustrayez ensuite celles des adversaires. Vous obtiendrez un différentiel pertinent.

Différentiel de chances de qualité*

Johnathan Kovacevic : + 1

Jordan Harris : 0

Chris Wideman : - 7

Arber Xhekaj : - 8

Kaiden Guhle : - 9

David Savard : - 12

* À forces égales.

Source : Natural Stat Trick

Oui, trois matchs, c’est un petit échantillon. Sauf que ces statistiques sont le prolongement de celles du camp d’entraînement, au cours duquel Guhle, Harris et Xhekaj étaient en territoire négatif.

Que ce soit clair : je n’insinue pas que les défenseurs recrues du Canadien jouent mal. Ils sont même parmi les meilleurs joueurs du club depuis le début de la saison. L’enjeu, c’est le collectif qui les entoure, et leur charge de travail en l’absence de Matheson et d’Edmundson.

Tous bénéficieraient de renforts.

Le problème, c’est que c’est plus facile de cultiver des citrouilles en janvier que de transiger maintenant. Pour arracher un titulaire à un adversaire, le Canadien devra verser une prime digne d’un prêt usuraire. Ça ne se produira pas. De façon réaliste, Kent Hughes devra espérer qu’un réserviste potable se retrouve au ballottage.

Plus tôt que tard.