Il fait trop chaud. Il fait trop froid. C’est un samedi. L’après-midi, les enfants font la sieste. Le soir, ils doivent dormir.

C’est trop de stations en métro. C’est trop loin de Sainte-Julie. C’est trop loin de Laval. Il y a trop de cônes orange à Montréal. Pas assez d’espaces de stationnement. Il manque de toilettes. Ils ne servent pas ma bière préférée. Le logo est trop ci. L’uniforme est trop ça. L’adversaire est trop mouais. En plus, il y a des règles sur les fumigènes.

Non, mais ça suffit, le concours de la meilleure excuse pour ne pas se déplacer au stade Saputo ! On se croirait dans la chanson Le dîner, de Bénabar. La connaissez-vous ? Elle raconte l’histoire d’un gars qui propose des alibis ridicules à son amoureuse pour éviter d’aller souper avec des amis.

« Y a un super bon film / À la télé ce soir / Un chef-d’œuvre du septième art / Que je voudrais revoir / Un drame très engagé / Sur la police de Saint-Tropez / C’est une satire sociale / Dont le personnage central / Est joué par de Funès / En plus y a des extraterrestres. »

Je comprends très bien que les partisans de la première heure du club se soient sentis méprisés pendant la présidence de Kevin Gilmore. Le changement d’identité était une erreur énorme. L’entêtement qui a suivi, encore plus. Des milliers d’amateurs ne se sentaient plus les bienvenus au stade. En plus, les résultats sportifs étaient décourageants.

Quand l’équipe décidait de jouer avec cinq défenseurs, c’était franchement plate à regarder. Même moi, qui participais à des pools de la MLS, qui collectionnais les maillots de la ligue et qui allais au stade Saputo une demi-douzaine de fois par été, j’ai cessé d’assister aux rencontres.

Heureusement, cette période de grande noirceur est terminée. Kevin Gilmore est parti. Gabriel Gervais l’a remplacé. Le ton a changé. Gervais et le propriétaire, Joey Saputo, ont tendu la main aux groupes de partisans. Ils ont ramené un logo fleurdelysé. Ils ont suggéré aux partisans de porter l’ancien maillot de l’Impact lors d’une soirée-hommage à Mauro Biello. Ils ne voient aucun inconvénient à ce que les partisans préfèrent le nom de l’Impact à celui du CF Montréal. Des gestes qui, la saison dernière, auraient été impensables.

Mais surtout, surtout, le onze est redevenu amusant. Excitant. Attrayant. L’Impact occupe le troisième rang dans l’Association Est. Le club marque et accorde des buts à la pelletée. Résultat : des matchs à haut pointage, dans lesquels tout est possible. Juste dans la dernière quinzaine, l’Impact a battu les champions en titre de la Ligue des champions CONCACAF, les Sounders de Seattle, sur la route. Un exploit. Puis il a concédé quatre buts au Galaxy de Los Angeles, dans un match où il a pourtant possédé le ballon 62 % du temps.

L’action ne manque jamais — pour le meilleur et pour le pire.

C’est vrai, il n’y a plus de supervedettes, comme Didier Drogba, Nacho Piatti ou Marco DiVaio. Je l’ai souvent déploré. Ce qui ne signifie pas que le club manque de joueurs intéressants. Au contraire. Djordje Mihailovic est dans la conversation pour le titre de joueur de l’année. Pas juste pour l’Impact. Pour toute la ligue. Kei Kamara, 37 ans, est un des meilleurs joueurs de l’histoire du circuit. Un des plus sympathiques, aussi. Pour la petite histoire, Mihailovic et lui font l’effort d’apprendre quelques phrases en français pour mieux communiquer avec les partisans. Kamal Miller, lui, est titulaire au sein de l’équipe canadienne, qui participera à la Coupe du monde, en novembre prochain.

Et les joueurs locaux ? L’Impact leur fait une très belle place. Samuel Piette est le capitaine du club. Alistair Johnston est un pilier en défense. Ismaël Koné, de Saint-Laurent, a disputé 14 parties. Mathieu Choinière, qui a grandi sur la Rive-Sud, a joué 11 matchs. Sebastian Breza, formé au club de Sainte-Julie, est le gardien de confiance de l’entraîneur-chef Wilfried Nancy, qui a lui-même fait ses classes comme entraîneur dans les parcs du Québec.

Autant l’Impact méritait d’être boudé, ces dernières années, autant il mérite une nouvelle chance aujourd’hui. Et si, malgré les performances sur le terrain et les efforts de la haute direction, vous préférez continuer de bougonner à la maison, j’ai une suggestion pour vous.

Un drame très engagé sur la police de Saint-Tropez.

Paraît qu’il y a même des extraterrestres.

Le CF Montréal recevra le Sporting de Kansas City ce samedi à 19 h 30, au stade Saputo.