Naître dans une famille d’athlètes améliore-t-il les chances d’être repêché dans la Ligue nationale de hockey ?

Si je pose la question, c’est parce que parmi les 100 meilleurs espoirs du prochain repêchage, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de fils de sportifs. Près d’une trentaine. Plus on s’approche du sommet, plus le ratio est élevé.

Des exemples ?

Les pères de Joel Kjellberg et de David Spacek ont joué pour le Canadien. Celui de Vinzenz Rohrer, sur le circuit de l’ATP. Le père d’Adam Ingram était un des meilleurs golfeurs du Canada, et la mère de Denton Mateychuk a gagné un demi-marathon.

Cette tendance est aussi très forte chez les espoirs québécois. Les parents de Noah Warren, des Olympiques de Gatineau, se sont tous les deux illustrés en natation. Son père, Claude, comme entraîneur à l’Université Laval et à l’Université de Montréal. Sa mère, Magalie Boutin, comme athlète. « Elle détient encore des records régionaux au Saguenay, dit-il fièrement. Elle a participé à des championnats nationaux, et elle a presque réussi à se qualifier au sein de l’équipe canadienne. »

Maveric Lamoureux, des Voltigeurs de Drummondville, vient lui aussi d’une famille de sportifs. « Mon père a joué dans la LHJMQ, avec les Bisons de Granby, puis dans le senior, avec les Chiefs de Laval. Ma mère était gymnaste. Après sa carrière d’athlète, elle a entraîné des filles au niveau national. Le sport a toujours occupé une grande place à la maison. »

Nathan Gaucher, des Remparts de Québec ?

« Mon père a joué dans le junior majeur, et il est encore dans le hockey, comme directeur général adjoint des Huskies de Rouyn-Noranda. Mon frère joue au hockey. Ma mère et ma sœur ont toujours été sportives. Ça m’a montré le chemin quand j’étais jeune. »

Quant aux parents de Frédéric Brunet, de l’Océanic de Rimouski, ils se sont rencontrés aux Jeux olympiques de Nagano, en 1998. Michel Brunet était patineur artistique. Brigitte Gauthier, physiothérapeute pour l’équipe canadienne de ski acrobatique. L’oncle de Frédéric, Dominick Gauthier, était aussi au Japon, comme athlète, en ski de bosses.

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Faut-il s’étonner de ce phénomène ?

« Pas vraiment. »

L’homme qui parle, c’est Pierre Allard, entraîneur adjoint des Red Bulls de Munich. Avant de déménager en Allemagne, l’année dernière, il était directeur de la science du sport et des performances pour le Canadien. Il a participé aux évaluations des espoirs du repêchage, pendant le règne de Marc Bergevin et de Trevor Timmins.

« Dans nos entrevues, on cherchait à connaître l’historique familial du joueur. On désirait savoir s’il y avait des antécédents d’athlètes de haut niveau dans sa famille. »

Je suis convaincu que toutes les équipes posent cette question, car il y a un lien entre les gènes et le fait de jouer dans la LNH ou non.

Pierre Allard, entraîneur adjoint des Red Bulls de Munich et ancien directeur de la science du sport et des performances pour le Canadien

Plusieurs études scientifiques, notamment celles de Claude Bouchard et Louis Pérusse, ont démontré l’importance de l’hérédité chez les athlètes d’élite. Les gènes ont un impact majeur sur la taille. Sur la masse musculaire. Sur la résistance à l’effort physique. Sur la longueur du tronc, des bras et des jambes.

« Avoir des parents issus du milieu sportif, ça aide, explique Pierre Allard. Ces jeunes-là ont généralement de bons gènes. Chez les Finlandais, par exemple, on voit souvent des fils de fondeurs ou d’athlètes d’endurance. Beaucoup de fils de hockeyeurs, aussi, comme Jesperi Kotkaniemi. »

« C’est sûr que le bagage génétique compte pour beaucoup », renchérit Jean Lemoyne, professeur au département des sciences de l’activité physique de l’Université du Québec à Trois-Rivières.

« Mais il y a d’autres facteurs que les gènes. Les parents avec un passé d’athlète ont une meilleure compréhension de l’environnement du sport d’élite. Ils savent ce qui attend leur enfant. Ils connaissent les meilleurs programmes de développement. » M. Lemoyne souligne aussi les salaires élevés des anciens joueurs de la LNH, qui leur permettent de louer plus d’heures de glace, et d’embaucher les meilleurs entraîneurs privés.

Par ailleurs, la plupart des athlètes de haut niveau font attention à leur poids. À leur corps. À leur alimentation. Ce sont des perfectionnistes. Une étude a démontré que les enfants tentent souvent de reproduire ce trait de caractère.

Cela dit, un parent athlète, ça peut aussi être négatif. Il y a des parents qui voudront s’accrocher à des niveaux qu’ils n’ont pas atteints, et ils peuvent pousser les jeunes dans un processus malsain.

Jean Lemoyne, professeur au département des sciences de l’activité physique de l’Université du Québec à Trois-Rivières

Et quelle valeur les clubs de la LNH accordent-ils au bagage familial ?

« Une certaine importance, confirme Pierre Allard. Mais elle est difficile à quantifier. Je sais que dans d’autres sports, au basketball notamment, ces données sont insérées dans des algorithmes, qui aident les recruteurs à prendre de meilleures décisions. Mais dans la LNH, on n’est pas rendu là. Les joueurs proviennent de plusieurs ligues différentes, et c’est très, très difficile de pondérer tous les éléments. »

Pour la petite histoire, vous ai-je dit qui a déjà terminé 12e aux Championnats d’Europe de natation ?

La mère de Juraj Slafkovsky…

Parents athlètes, enfants hockeyeurs

PHOTO USA HOCKEY, TIRÉE DU COMPTE TWITTER @THEHOCKEYNEWS

Logan Cooley

Owen Beck : David, père, joueur de soccer

Frédéric Brunet : Michel, père, patineur artistique ; Dominick Gauthier, oncle, skieur acrobatique

Logan Cooley : Tom et John Mooney, oncles, hockeyeurs (NCAA)

Jorian Donovan : Shean, père, hockeyeur (LNH)

Samuel Eklund : Per-Erik, père, hockeyeur (LNH)

Josh Filmon : Greg, père, basketteur

Nathan Gaucher : Yannick, père, hockeyeur (LHJMQ)

Marc-André Gaudet : Denis, père, hockeyeur (OHL)

Cutter Gauthier : Sean, père, hockeyeur (LNH)

Conor Geekie : Craig, père, hockeyeur (WHL)

Alexis Gendron : Martin, père, hockeyeur (LNH)

David Goyette : Michel, père, boxeur amateur

Francesco Iasenza : Giovanni, père, hockeyeur (LHJMQ)

Hugo et Mattias Havelid : Niclas, père, hockeyeur (LNH)

Hunter Height : Steve, père, hockeyeur (OHL)

Marek Hejduk : Milan, père, hockeyeur (LNH)

Adam Ingram : Derek, père, golfeur

Marco Kasper : Peter, père, hockeyeur (JO)

Joel Kjellberg : Patric, père, hockeyeur (LNH)

Kevin Korchinski : Larry, père, hockeyeur (WHL)

Brad Lambert : Ross, père, hockeyeur (LAH) ; Lane, oncle, hockeyeur (LNH)

Maveric Lamoureux : Patrick, père, hockeyeur (LHJMQ)

Mats Lindgren : Mats, père, hockeyeur (LNH)

Denton Mateychuk : Keela, mère, coureuse

Rutger McGroarty : Jim, père, hockeyeur (ECHL)

Liam Ohgren : Andreas, père, hockeyeur professionnel

Vinzenz Rohrer : Stefan, père, joueur de tennis professionnel

Reid Schaefer : Jeremy, père, hockeyeur (WHL)

Juraj Slafkovsky : Gabriela, mère, nageuse

Jimmy Snuggerud : Dave, père, hockeyeur (LNH)

David Spacek : Jaroslav, père, hockeyeur (LNH)

James Stefan : Patrik, père, hockeyeur (LNH)

Adam Sykora : Roman, père, hockeyeur (LNH)

Antonin Verreault : Serge Brunet, grand-père, hockeyeur (LHJMQ)

Noah Warren : Magalie Boutin, mère, nageuse