(Tokyo, Japon) Autant nous, Canadiens, adorons le hockey, autant les Japonais sont passionnés de baseball.

Leur histoire d’amour avec ce sport est plus que centenaire. Mais c’est en 1934 que la popularité du baseball dans l’archipel a vraiment explosé. Cet automne-là, les plus grandes étoiles américaines – Babe Ruth, Lou Gehrig, Jimmie Foxx – sont venues ici, en paquebot, pour disputer une série de 12 parties contre les meilleurs joueurs locaux. Une tournée qui a marqué les esprits.

Et l’histoire.

C’est qu’au sein de l’équipe américaine, il y avait un joueur pas mal moins bon que les autres. Un receveur réserviste qui avait frappé seulement trois circuits en carrière dans les ligues majeures. Son nom ? Moe Berg. Que faisait-il dans cette formation ? Des tâches connexes. Comme de l’espionnage.

Pendant une partie, Berg s’est rendu dans un hôpital de Tokyo pour visiter la fille de l’ambassadeur des États-Unis. Un prétexte bidon pour accéder au toit de l’édifice, l’un des plus élevés de la capitale. De là, il a filmé le port et le centre-ville. Des images précieuses, dont l’armée américaine s’est servie pour préparer le bombardement de Tokyo, pendant la Seconde Guerre mondiale.

Fin de la parenthèse historique.

Aujourd’hui, le baseball est le sport le plus populaire au Japon. Le pays a ses propres ligues majeures. Ses propres grands clubs. Son propre star system. Avant la pandémie, les parties en première division attiraient des foules moyennes de 30 000 personnes. C’est énorme. Parmi toutes les ligues au monde – tous sports confondus –, seul le baseball majeur nord-américain a vendu plus de billets.

Vous ne serez donc pas surpris d’apprendre qu’après avoir remporté l’organisation des Jeux olympiques de 2020, le Japon a fortement insisté auprès du Comité international olympique pour réintégrer le baseball dans le programme officiel des Jeux.

Le CIO a acquiescé.

Sauf qu’aujourd’hui, il y a un problème.

Le baseball majeur nord-américain refuse de collaborer et de libérer ses joueurs. Conséquence : le Japon amorcera le tournoi olympique sans Shohei Ohtani, l’athlète le plus populaire du pays (avec la joueuse de tennis Naomi Osaka).

C’est une honte.

Si les étoiles du baseball ne vous sont pas familières, sachez qu’Ohtani est le Babe Ruth des temps modernes. Un très, très rare joueur qui excelle autant au bâton qu’au monticule. Comme frappeur, il mène les ligues majeures pour les circuits. Comme lanceur, il retire plus d’un frappeur par manche sur des prises. Au match des Étoiles, à la mi-juillet, Ohtani était à la fois le lanceur partant ET le premier frappeur de la Ligue américaine.

Sa présence aux Jeux – ainsi que celle des autres étoiles des ligues majeures – aurait suscité un intérêt monstre pour le tournoi de baseball. Non seulement dans les médias japonais, mais aussi dans la presse internationale. C’est tout le baseball qui aurait profité de cette tribune exceptionnelle.

Mais non. Une querelle pour le partage des revenus entre le CIO et le baseball majeur, qui dure depuis une dizaine d’années, nous prive d’un spectacle qui s’annonçait mémorable. Du moins, plus que la Classique mondiale créée par le baseball majeur, dont la dernière édition remonte à 2017. En lieu et place d’une compétition relevée, nous aurons droit à un simulacre de tournoi, animé par des vedettes d’antan et des joueurs des ligues mineures.

Prenez la formation de la République dominicaine. Une superpuissance du baseball. Sa grande vedette est l’ancien joueur des Blue Jays de Toronto José Bautista, 40 ans et retraité depuis 2018. Le Mexique misera sur Óliver Pérez et Adrian Gonzalez, deux joueurs de 39 ans qui ont connu leurs meilleures saisons il y a plus de 10 ans. Les États-Unis compteront sur un fort contingent de retraités et d’espoirs de catégorie B. Israël alignera d’anciens joueurs de confession juive des ligues majeures. Le Japon, lui, fera confiance à des joueurs de ses ligues locales.

Ce n’est pas sérieux. C’est décevant. Une démonstration nette du manque flagrant de leadership du CIO. De la Fédération internationale de baseball. Du commissaire du baseball majeur. Des propriétaires d’équipes. Et des joueurs professionnels, qui devraient imiter ceux de la Ligue nationale de hockey et faire pression sur leurs patrons pour pouvoir participer aux Jeux.

Ça peut porter ses fruits. Après avoir sauté son tour aux Jeux de 2018, la LNH envisage sérieusement d’autoriser la participation de ses joueurs étoiles aux Jeux de Pékin, en 2022. Dans le calendrier de la prochaine saison, diffusé jeudi, il y a même une pause des activités prévue pendant la quinzaine olympique.

Une excellente nouvelle.

C’est tout le sport qui y gagnerait.

Entre-temps, le baseball, lui, sera de nouveau retiré du programme officiel en 2024. Et il ne sera pas réintégré tant que la dispute durera. Un gâchis qui dessert tout le monde. Y compris les partisans.

Mauvais services

Comme les poloïstes, les volleyeurs canadiens sont sur la route depuis plus de deux mois. « Une longue, mais belle préparation, comme je n’en ai jamais vu », raconte l’entraîneur-chef Glenn Hoag, dont ce sont les derniers Jeux.

Son équipe amorçait son tournoi samedi matin contre les Italiens, médaillés d’argent aux Jeux de Rio, en 2016. Une grosse bouchée. « Mais commencer contre une grosse équipe, dans un tournoi, c’est important. Ça nous permet d’améliorer [ensuite] certaines choses. »

PHOTO MANU FERNANDEZ, ASSOCIATED PRESS

Le Québécois Nicholas Hoag et l’équipe canadienne amorçait son tournoi samedi matin contre les Italiens.

Les Canadiens, dixièmes au monde, ont très bien commencé la rencontre. Ils ont remporté les deux premières manches. Au milieu de la troisième, c’était l’égalité. Puis les erreurs au service se sont multipliées. Les Italiens ont remporté cette manche. Et la suivante. Et la dernière, 15-11. Une défaite crève-cœur pour les représentants du Canada.

On les a laissés respirer un peu trop. Sauf que c’est une des meilleures équipes au monde. Ça ne leur prenait pas grand-chose pour revirer [la situation].

Glenn Hoag, entraîneur de la formation canadienne

Est-ce la fin des espoirs pour le Canada ?

Pas du tout. Il lui reste quatre matchs de qualifications. Un contre la Pologne – difficile –, mais trois autres qu’il peut remporter, contre le Japon (11e), l’Iran (12e) et le Venezuela (33e). Les quatre meilleurs passeront en quarts de finale. Dans la défaite, le Québécois Nicholas Hoag, fils de Glenn, a été le meilleur des siens, avec 17 points en attaque et un bloc.