À quoi ressemblerait la société québécoise si on apprenait aux enfants à pratiquer la pleine conscience ? « Je suis peut-être rêveuse ou idéaliste, mais je pense que ça changerait tout », répond la Dre Amélie Veilleux, qui a récemment lancé le livre Une maison juste à moi – Initier son enfant à la pleine conscience.

« On se brosse les dents tous les jours, mais pourquoi on n’a pas une hygiène de sa maison intérieure ? », se demande, en entrevue, la pédopsychiatre qui est aux premières loges pour constater que les effets de la pandémie sur la santé mentale des jeunes se font toujours sentir.

Dans la société actuelle, les gens vivent à un rythme effréné, remarque la médecin, qui avoue avoir elle-même épousé ce style de vie très longtemps. « On est beaucoup dans le stress, dans une espèce de pression de performance. »

« Quand on est dans ce mode, c’est connu en neuroscience, on est plus dans notre système nerveux sympathique, explique la pédopsychiatre. À ce moment-là, notre cerveau réfléchit, mais avec des œillères. On ne voit pas. On est focalisé sur l’objectif. Quand on médite, on relaxe, on tombe dans notre système parasympathique. Là, c’est comme si les œillères s’enlèvent et on a une perspective plus large. »

Résultat ? On est alors en mesure de trouver des solutions créatives aux problèmes qui se présentent devant soi, fait valoir la médecin.

Une pratique régulière de la pleine conscience amène aussi une meilleure régulation des émotions et moins d’anxiété, ont prouvé de nombreuses études.

Au cours de sa vie, toute personne doit faire face à des épreuves, note la pédopsychiatre. À ses yeux, la pleine conscience est un outil qui peut permettre à celui qui l’utilise « de ne pas se sentir happé par les crises et d’être capable de prendre un pas de recul pour relativiser les choses ». « Si les gens étaient capables de s’autoaccompagner comme ça, c’est certain que ça changerait la société », croit la Dre Amélie Veilleux.

Une formule magique ?

La pleine conscience, c’est prendre le temps de s’arrêter, de respirer, d’être dans le moment présent, d’accueillir les émotions : la formule semble si simple, presque magique. Est-ce trop beau pour être vrai ?

« En fait, c’est vrai qu’il faut nuancer, répond la Dre Amélie Veilleux. Ce n’est pas magique. Ça ne va pas régler tous les problèmes d’un coup. Je pense qu’il faut l’essayer et se donner du temps. »

Même si elle a lu une foule d’études qui démontraient les bienfaits de cette pratique, la médecin avoue s’être elle-même montrée sceptique lorsqu’elle a commencé à l’introduire dans sa vie. « Je ne peux pas dire que ç’a été le coup de foudre. Vraiment, vraiment pas. C’était difficile », confie-t-elle, en spécifiant que ses pensées se bousculaient et qu’elle n’arrivait pas à faire le vide.

« C’est vraiment avec la persévérance, en me rappelant pourquoi je le faisais et quels étaient les bénéfices qui pouvaient en découler, que ça m’a incitée à poursuivre », raconte la pédopsychiatre.

Accompagner les parents

Avec son livre, elle souhaite accompagner les parents, habitués ou non à méditer, afin qu’ils soient en mesure d’initier leurs enfants à la pleine conscience. À chacune des notions abordées s’ajoutent de petites histoires destinées aux enfants de 5 ans et plus ainsi que des aventures méditatives audio.

De manière imagée, la Dre Amélie Veilleux (alias Dre A) y explique notamment qu’une respiration lente et profonde permet de pénétrer dans sa maison intérieure. Ses pièces sont parfois remplies de petites visiteuses (les émotions), qu’on doit accueillir chaleureusement si on ne veut pas qu’elles mettent le désordre. Il y a aussi une radio (les pensées) qui joue sans cesse et qu’on doit apprendre à apprivoiser.

Douée pour vulgariser des informations à travers des métaphores et des images, la Dre Amélie Veilleux aurait pu écrire un livre destiné directement aux enfants. Pourquoi n’a-t-elle pas choisi cette voie ?

« Je le vois dans mon bureau. Quand je veux transmettre quelque chose à l’enfant, il faut que j’inclue le parent. Il faut qu’il soit au courant et qu’il travaille avec moi. […] Pour moi, ça n’avait pas de sens d’écrire un livre juste pour les enfants », explique-t-elle.

Aux familles qui voudraient s’initier à la pleine conscience, elle rappelle que c’est un processus qui prend du temps, mais qui, à ses yeux, en vaut la peine. « C’est comme quand on va au gym et qu’on fait des exercices de musculation. Même si c’est plus difficile une journée, on sait que ça a un impact sur la construction de nos muscles à long terme. C’est la même chose chaque fois qu’on se ramène dans le moment présent. On est en train de muscler notre focus attentionnel. On ramène notre système nerveux en équilibre et il le fait plus facilement par lui-même par la suite », affirme-t-elle.

Une maison juste à moi – Initier son enfant à la pleine conscience

Une maison juste à moi – Initier son enfant à la pleine conscience

Éditions Cardinal

239 p.