Les prophètes de malheur se trompent. L'actualité internationale est source légitime d'inquiétudes. Pourtant, malgré des crises successives, les révolutions parfois souhaitées, souvent appréhendées, demeurent l'exception. Je reviens en trois temps sur les évènements exceptionnels des derniers mois, lesquels, confrontés aux théories catastrophistes en vogue, deviennent, a contrario, source d'un optimisme prudent.

Les prophètes de malheur se trompent. L'actualité internationale est source légitime d'inquiétudes. Pourtant, malgré des crises successives, les révolutions parfois souhaitées, souvent appréhendées, demeurent l'exception. Je reviens en trois temps sur les évènements exceptionnels des derniers mois, lesquels, confrontés aux théories catastrophistes en vogue, deviennent, a contrario, source d'un optimisme prudent.

L'apocalypse du choc des civilisations n'aura pas lieu. Parue en 1996, la thèse du professeur Samuel Huntington, selon laquelle le monde serait désormais soumis aux affrontements «civilisationnels», a volé en éclats. La peur et la volonté aveugle de représailles, engendrées par l'attentat du 11 septembre, ont cautionné cette interprétation tragique de l'histoire.

Les soulèvements populaires et pacifiques réunissant des milliers de manifestants en Tunisie et en Égypte montrent que les aspirations démocratiques des populations musulmanes sont équivalentes aux nôtres.

La menace islamiste longtemps invoquée pour justifier l'autoritarisme ne fonctionne plus. Une fois le mur de la peur abattu, aucun dictateur n'est à l'abri de l'aspiration de liberté de son peuple. Les jeunes mobilisés ont engagé un processus de changement politique profond et bénéfique dont les effets seront durables. J'en veux pour preuve, quelle qu'en soit l'issue, le soutien des puissances de l'OTAN aux forces de libération qui combattent en Libye.

«Le capitalisme touche à sa fin», affirmait sans rire le professeur Immanuel Wallerstein qui a consacré sa carrière à annoncer la crise imminente du capitalisme (Le Monde, 12 octobre 2008). Au lendemain de l'effondrement des marchés à l'automne 2008, il était certain que le système financier, frappé au coeur, ne s'en remettrait pas. La crise spéculative a détruit à jamais la confiance et, plus important, balayé les économies des baby-boomers. Passée la chute abyssale des marchés et grâce aux fortunes engagées par les gouvernements pour soutenir le crédit, la reprise était bien engagée dès l'automne 2009 et, au début de 2010, la croissance de l'économie mondiale venait retrouver le niveau d'avant la crise.  

Évidemment, des sommes considérables ont changé de main. La redistribution a avantagé les pays émergents pendant que les États-Unis et l'Europe s'enfoncent dans les dettes. Ne serait-ce que des réformes engagées par le groupe de Bâle, destinées à discipliner les flux financiers internationaux, le capitalisme, inchangé pour l'essentiel, prospère, jusqu'à la prochaine crise.

L'alarmisme fait aussi partie de l'arsenal écologique. Les cataclysmes appréhendés se succèdent et s'alimentent, jusqu'au point «naturel» de bascule entraînant l'effondrement de notre civilisation du gaspillage. C'est le thème du livre World on the Edge (2011) de Lester R. Brown, président de l'Earth Policy Institute. L'idée est terrifiante. La poussée démographique exerce une pression considérable sur les ressources. À terme, les terres cultivables s'épuiseront, l'eau viendra à manquer. L'augmentation du prix des aliments provoquera des émeutes et des famines. Jusqu'aux abeilles, atteintes d'un mal inconnu, qui sont menacées et la pollinisation avec elles (unep.org). Il faut donc appréhender la «tempête parfaite», l'enchaînement catastrophique des événements, que la moindre sécheresse peut déclencher, ou alors un accident nucléaire. Pourtant.

Rappelez-vous, en juillet 2008, le pétrole se transigeait au prix de 147$US. Il est tombé à moins de 50$US au plus fort de la crise pour remonter doucement et se stabiliser autour de 80$US. Les mobilisations dans les pays arabes, jointes aux affrontements en Libye, important producteur de pétrole, font craindre la contagion dans les grands pays producteurs. Les prix sautent à la mesure de l'inquiétude, ils atteignent 110$US le baril. La crise nucléaire japonaise vient ajouter aux incertitudes.

Tous les éléments de l'enchaînement catastrophique sont réunis. Pourtant, malgré les tensions vives, les hausses de prix demeurent modérées. Les appels à l'apaisement sont entendus. L'Arabie Saoudite et les grands producteurs de l'OPEP annoncent une augmentation de la production destinée à compenser l'interruption de l'approvisionnement en provenance de la Libye. La catastrophe, toujours possible, est encore une fois évitée.

Enhardi par ces observations, je risque à mon tour une prédiction. N'en déplaise aux Mayas, il ne se passera rien de particulier le 21 décembre 2012. La fin du monde attendra encore quelques millénaires.