Il y a quelques jours, l'éditorial du Canadian Medical Association Journal (CMAJ) déplorait le décès accidentel, en 2005, d'un nourrisson allaité. La mère consommait de la codéine à la dose recommandée, mais à cause d'une caractéristique génétique qu'elle possédait, son corps transformait de façon accélérée la codéine en morphine, ce qui a causé une intoxication involontaire, mais fatale. Pourquoi donc autant d'écarts d'une personne à une autre?

Il y a quelques jours, l'éditorial du Canadian Medical Association Journal (CMAJ) déplorait le décès accidentel, en 2005, d'un nourrisson allaité. La mère consommait de la codéine à la dose recommandée, mais à cause d'une caractéristique génétique qu'elle possédait, son corps transformait de façon accélérée la codéine en morphine, ce qui a causé une intoxication involontaire, mais fatale. Pourquoi donc autant d'écarts d'une personne à une autre?

Parce que chaque humain est constitué différemment. Si nous avions eu accès à des tests génétiques, nous aurions pu savoir que cette femme métabolisait différemment la codéine de la majorité des gens. Devant une telle information, le dosage du médicament aurait pu être ajusté en fonction de son profil génétique et le décès de son enfant aurait ainsi pu être évité.

Cette nouvelle approche s'appelle la thérapie médicamenteuse personnalisée et elle est déjà utilisée notamment dans le traitement du cancer.

Si vous êtes atteinte d'un cancer du sein et que vous possédez le récepteur HER-2, un médicament comme l'Herceptin, par exemple, fonctionnera dans des proportions d'environ 80%. Sans la présence de ce récepteur, vous n'aurez aucun effet bénéfique et vous ne subirez que les effets secondaires. Ce médicament est un bel exemple des molécules du futur qui prendront de plus en plus de place en pharmacie.

Il y a quelques années, ce médicament a pourtant frôlé le retrait du marché. Étudiés dans le cadre d'études cliniques sur de grands groupes de femmes, les résultats présentaient des écarts d'efficacité très importants. La persistance des recherches aura permis de comprendre que le médicament donnait des résultats très positifs chez les femmes possédant des caractéristiques spécifiques, dont le récepteur HER-2. Aujourd'hui, c'est uniquement à ces femmes que l'on administre ce médicament avec lequel on obtient des résultats impressionnants.

Il en va de même quant aux ajustements de doses et aux suivis génétiques qui sont requis pour éviter les toxicités importantes, lors de l'utilisation du Ziagen, médicament servant à traiter les personnes atteintes du VIH. En fait, sans ajustement personnalisé des doses, le médicament risque de nuire plutôt que d'aider.

Les progrès que l'on constate en matière de traitements médicamenteux sont comparables à ceux des sciences judiciaires. Auparavant, on pouvait identifier un criminel par ses seules empreintes digitales. Aujourd'hui, l'ADN joue un rôle de premier plan et élargit les possibilités et l'exactitude des résultats. La comparaison s'applique aux médicaments, l'avenir est à l'approche personnalisée qui tient compte des particularités biologiques de chacun, comme l'âge, la présence de maladies, les facteurs physiologiques, l'environnement, etc. On remarque également que certaines maladies sont absentes de l'hémisphère sud où la dose d'un médicament devra être ajustée si vous êtes porteur d'un enzyme du foie en particulier, etc.

L'ère des médicaments one size fits all que l'on administre à grande échelle, sans nuance, tire à sa fin. D'ailleurs, les grandes pharmaceutiques ont peu de nouveautés de cet ordre en développement. Elles devront raffiner leurs techniques, pousser leurs études, accroître leur niveau d'éthique pour présenter à la population des médicaments plus sophistiqués.

Les progrès de la science interpellent aussi les professionnels de la santé, médecins et pharmaciens en particulier. Les médecins auront à leur disposition un arsenal thérapeutique plus pointu, mais qui requiert une mise à jour de leurs connaissances plus exigeante et l'accès à des marqueurs biologiques ou des tests génétiques. Les pharmaciens devront, quant à eux, surveiller et ajuster encore plus efficacement le traitement pour s'assurer que leurs patients ont le bon médicament, au bon moment et à la bonne dose.

Pour les élus et les administrateurs de régimes, il faudra cesser de regarder les coûts des médicaments en silo. Offrir à un patient un médicament plus onéreux au départ est certainement plus bénéfique, à tous points de vue, que de les astreindre à des séries d'essais-erreurs qui, en bout de piste, finissent par coûter très cher, en termes de dollars et sur le plan humain.