D'emblée, j'éprouve une certaine déception à la rédaction de ces lignes puisque le public cible de mon propos ne le lira probablement pas. Mais j'entretiens l'espoir qu'une certaine prise de conscience collective puisse être faite afin que des tragédies soient évitées.

D'emblée, j'éprouve une certaine déception à la rédaction de ces lignes puisque le public cible de mon propos ne le lira probablement pas. Mais j'entretiens l'espoir qu'une certaine prise de conscience collective puisse être faite afin que des tragédies soient évitées.

Avec l'été est enfin arrivé le moment de décrocher, de s'amuser et de partir à l'aventure. Depuis quelques semaines, mon amoureux et moi sillonnons les routes du Québec en famille. Avec nos deux enfants de 5 et 2 ans, et un troisième en gestation bien au chaud dans mon bedon rond, nous mordons dans l'été.

Au gré de nos déplacements, j'ai cependant remarqué la présence grandissante sur nos routes d'une race de conducteurs assez inquiétante, qui se situe quelque part entre la bête de cirque et l'animal domestiqué. Je les appelle les cowboys de la route. Le profil de la race est assez uniforme: mâles de 18 à 25 ans, fond de culotte traînant aux genoux, casquette renversée, cigarette au bec et air narquois, ils sont au volant de leur petite Honda modifiée, de leur Acura reconstruite ou encore de la Lexus de papa, ou d'une BMW certainement pas achetée avec leur salaire d'emploi-étudiant. Ce qui m'horripile vraiment par contre, ce n'est pas le bolide au moteur pétaradant qu'ils ont entre les mains mais la façon irresponsable, voire suicidaire, dont ils le conduisent. C'est quoi, cette folie? Une nouvelle religion, un club social, un rite d'adhésion à un gang quelconque? Il faut les voir vous coller aux fesses dans la voie de gauche à 150 km/h, louvoyer d'une voie à l'autre, vous dépasser par la droite en vous jetant un air arrogant vous mettant au défi de courser avec eux. Il y a quelques jours, nous nous sommes retrouvés coincés entre deux de ces cowboys qui jouaient à un petit jeu dont eux seuls connaissaient les règles mais qui, de toute évidence, impliquait notre véhicule. L'unique solution afin de nous soustraire à leurs griffes fut de nous ranger sur l'accotement pour les laisser poursuivre leur délire au-devant de nous.

D'une part, j'ai envie de vous dire, cowboys, que moi aussi, j'ai eu 20 ans, que j'ai été atteinte de la fièvre de la jeunesse, j'ai été animée de cet irrépressible besoin de me sentir vivante et invincible, de repousser les limites simplement pour le plaisir de caresser l'absolu. Puis j'ai vieilli (un peu) et la vie s'est chargée de m'enseigner sa fragilité. Ce n'est certainement pas en mettant votre vie et celle d'honnêtes citoyens en danger que vous parviendrez à assouvir votre désir de sensations fortes. Je vous invite à vous engager dans une mission humanitaire ou de partir sac au dos explorer le monde; vous y vivrez des émotions jusqu'alors inconnues et vous sustenterez votre insatiable appétit d'intensité. Si l'altruisme et la découverte ne sont pas votre tasse de thé, hé bien, je vous saurais gré de vous prêter à vos petits jeux stupides en privé, en roulant la pédale au plancher sur un circuit de karting, en sautant d'une falaise pendus par les pieds ou en choisissant le sport extrême de votre choix que vous pratiquerez dans le confort de votre foyer.

D'autre part, mon instinct animal de maman lion qui me dicte de protéger mes petits me donne envie de rugir devant tant d'imbécillité et d'inconscience. Dans ces moments où mon chemin croise celui d'un d'entre vous, cowboys, je me retiens de hurler de rage et de vous crier que si vous avez si désespérément envie de narguer le destin et de jouer avec les poignées de votre cercueil, libre à vous de le faire mais de grâce, libérez la voie publique.

Dans l'hypothèse où je n'aurais pas réussi à vous convaincre de lever le pied, cowboys de nos routes, je vous offre néanmoins un dernier conseil: ne vous avisez pas d'attenter à ma vie, à celle de papa lion ou de nos lionceaux. Vous ne vous le pardonneriez pas; et moi non plus, d'ailleurs.