Les partis politiques fédéraux ont uni leurs forces pour bloquer le pardon qui aurait bientôt pu être accordé à Karla Homolka. Il s'agissait d'adopter en vitesse un projet de loi qui redéfinit l'octroi des pardons et qui empêchera Mme Homolka d'obtenir le sien.

Les partis politiques fédéraux ont uni leurs forces pour bloquer le pardon qui aurait bientôt pu être accordé à Karla Homolka. Il s'agissait d'adopter en vitesse un projet de loi qui redéfinit l'octroi des pardons et qui empêchera Mme Homolka d'obtenir le sien.

D'après ce que j'en sais, les preuves qui ont été recueillies, notamment par des enregistrements vidéo, auraient permis de croire que sa culpabilité dans les agressions et les meurtres commis avec la complicité de Paul Bernardo, aurait été claire et sa responsabilité sensiblement comparable à celle de son complice. La Couronne, si je ne m'abuse, a requis et obtenu une condamnation à vie et la caractérisation de M. Bernardo comme criminel dangereux, ce qui assurerait, en principe, qu'il ne sortira pas de prison de son vivant. Pendant ce temps, Mme Homolka a été accusée et reconnue coupable sous des chefs d'inculpation moins accablants et elle a été condamnée à quelques années de prison.

C'est à la suite de négociations entre la Couronne et Mme Homolka que des accusations moins sévères ont été convenues, en échange d'une collaboration de Karla Homolka à titre de témoin à charge contre son complice. Si c'est bien le cas, on peut supposer que la Couronne craignait à l'époque que la preuve recueillie à la suite des enquêtes policières ne soit pas suffisante pour obtenir la condamnation souhaitée contre M. Bernardo. Les autorités auraient fait un choix: jouer Homolka contre Bernardo.

Il serait apparu par la suite que des preuves existaient qui auraient permis de condamner M. Bernardo, même sans la collaboration de Mme Homolka, et de porter contre celle-ci des accusations plus sévères.

Aujourd'hui, les politiciens s'unissent pour empêcher un pardon.

Personnellement, j'aurais souhaité que le système judiciaire fonctionne au mieux et condamne Mme Homolka à une peine correspondant à la gravité de son crime. Si elle a eu dans la perpétration des crimes qui lui ont été reprochés une responsabilité aussi grande que celle de M. Bernardo, il aurait été juste qu'elle subisse les mêmes peines. Cela n'a pas été le cas. Cet écart dans le traitement des complices a-t-il été le résultat d'une responsabilité moindre de Mme Homolka ? De déficiences de l'enquête policière ? De mauvaises décisions de la Couronne?

Quoi qu'il en soit, Mme Homolka a purgé les années de prisons auxquelles elle a été condamnée et aujourd'hui elle serait admissible à l'octroi d'un pardon, selon nos lois.

Le pardon devra être accordé par un organisme mandaté à cette fin, en fonction de règles explicites et après examen de son dossier.

Les crimes commis par Mme Homolka et M. Bernardo sont répugnants. Il est facile de comprendre que l'opinion publique soit révoltée d'un éventuel pardon à Mme Homolka. Je pense quant à moi que ce pardon résulterait tout bêtement de l'application de règles qui sont les mêmes pour tous. S'il y a une injustice dans cette affaire, elle ne résulte pas de l'application des règles concernant le pardon, mais d'un fonctionnement moins qu'optimal du système judiciaire, aux étapes de l'enquête, de l'accusation et du jugement de cour.

Ce qui me révolte, aujourd'hui, c'est que nos politiciens, sensibles à l'opinion publique et soucieux de ne pas s'aliéner l'électorat, s'unissent pour adopter une loi qui vise un cas particulier, une citoyenne, si peu sympathique puisse-t-elle être. Je crois qu'il y a une dérive inquiétante, en démocratie, lorsque le parlement adopte une loi à l'encontre d'un citoyen. Et une loi dont l'effet, au surplus, peut être considéré, dans la situation de la personne visée, comme rétroactif.

Les citoyens soucieux du respect de la démocratie et des droits devraient penser au-delà des crimes odieux dont Mme Homolka s'est rendue coupable et s'inquiéter d'une initiative démagogique de nos politiciens.