Lorsque le Dr Philippe Couillard a annoncé son départ après cinq longues et tumultueuses années à la barre du ministère québécois de la Santé, on pouvait croire qu'il mettrait ses qualités au service de la santé dans le monde, et pas nécessairement au Québec. Deux mois plus tard, voilà qu'il vient d'annoncer qu'il travaillera pour un fonds d'investissement privé, Persistence Capital Partners. PCP cherchera à tirer profit de la part grandissante que le secteur privé se prépare à jouer dans le système de santé au Québec et au Canada.

Lorsque le Dr Philippe Couillard a annoncé son départ après cinq longues et tumultueuses années à la barre du ministère québécois de la Santé, on pouvait croire qu'il mettrait ses qualités au service de la santé dans le monde, et pas nécessairement au Québec. Deux mois plus tard, voilà qu'il vient d'annoncer qu'il travaillera pour un fonds d'investissement privé, Persistence Capital Partners. PCP cherchera à tirer profit de la part grandissante que le secteur privé se prépare à jouer dans le système de santé au Québec et au Canada.

Lundi, l'ex-ministre a reconnu avoir eu "des rencontres" avec celui qui allait devenir son futur employeur alors qu'il était toujours ministre. "Uniquement des conversations générales", a précisé M. Couillard. Finalement, "ça s'est concrétisé après le 25 juin", date de son départ.

Ces contacts étaient mal venus. Il ne s'agissait pas de rencontres fortuites, mais bien de discussions sur le système de santé et son avenir, peut-on deviner. Mise à part la météo, de quoi un investisseur dans le système de santé voudrait-il s'entretenir avec le ministre en poste ? Ces contacts ont été imprudents et malavisés de la part de M. Couillard, et justifient le scepticisme des Québécois à son endroit aujourd'hui.

Par surcroît, le Québec s'apprêtait alors à adopter la loi 33 qui encadre une cinquantaine de traitements médicaux qui peuvent maintenant être offerts dans des cliniques privées. Que M. Couillard ait eu des entretiens généraux avec des investisseurs dans des cliniques privées - discussions qui pourraient mener à un emploi futur - alors que la gamme des traitements à y être offerts est sous étude par les élus, voilà qui est doublement inconvenant pour un ministre de la Santé.

Philippe Couillard a habitué les Québécois à une rigueur et un professionnalisme pendant ses années en politique. Les circonstances qui entourent son départ viennent tristement assombrir ce souvenir.

Le modèle ontarien

Dans la foulée des émeutes à Montréal-Nord, l'annonce que la Sûreté du Québec allait enquêter sur les actions de la Police de Montréal a soulevé le cynisme. C'est pourtant pratique courante au Québec qu'un corps policier enquête sur un autre, lorsque ce dernier a posé des gestes potentiellement inconvenants pour les forces de l'ordre.

Les émeutes de Montréal-Nord, qui ont déclenché à la suite du décès de Fredy Villanueva, ont soulevé une foule de questions de société. Entre autres sur les mesures d'appui à la disposition des jeunes immigrants visant à une meilleure intégration.

Certains s'interrogent aussi s'il est encore logique et souhaitable, en 2008, que les corps policiers enquêtent sur d'autres corps policiers, et s'il n'y a pas là matière à conflit d'intérêts. Cette procédure doit faire l'objet d'une réflexion ; la société québécoise arrive peut-être à une intersection quant à cette pratique qui, lorsqu'on s'y attarde un peu, n'offre pas toutes les apparences d'une enquête indépendante.

À ce chapitre, l'exemple de l'Ontario peut servir d'exemple. L'Unité des enquêtes spéciales (UES, ou SIU, pour "Special Investigative Unit", en anglais) a justement été créée à la suite de conflits raciaux survenus en 1988. Les mêmes doutes avaient alors surgi : est-il souhaitable que des corps policiers soient chargés des enquêtes sur les gestes posés par des collègues à la solde d'autres corps policiers ? L'Ontario a finalement répondu que non. Deux années plus tard, l'UES était créée.

Elle pourrait constituer une avenue intéressante pour le Québec qui doit surmonter ses propres défis avec ses minorités raciales. Elle n'est pas idéale, et se retrouve elle-même sous enquête par l'Ombudsman de l'Ontario, mais il semble que la création d'un corps civil d'enquête contribuerait à réduire le cynisme de bien des citoyens quant aux enquêtes menés sur des gestes posés par des policiers.