La plus importante manifestation visible et immédiate de la collaboration d'équipe entre les Nations unies et le mouvement olympique est la trêve olympique. Une telle trêve, qui est limitée dans le temps, peut permettre une pause afin de reconsidérer le coût élevé de la guerre, une ouverture pour initier un dialogue et une fenêtre pour fournir de l'aide aux populations qui souffrent."

La plus importante manifestation visible et immédiate de la collaboration d'équipe entre les Nations unies et le mouvement olympique est la trêve olympique. Une telle trêve, qui est limitée dans le temps, peut permettre une pause afin de reconsidérer le coût élevé de la guerre, une ouverture pour initier un dialogue et une fenêtre pour fournir de l'aide aux populations qui souffrent."

Inutile de se faire d'illusion et de porter des lunettes roses, on est bien loin de l'idéal de la Grèce antique et de l'appel du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon, à l'occasion de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Pékin. En fait, la trêve olympique est un idéal peut-être souhaitable, mais complètement dépassé par les événements, les conflits, les tensions et les intérêts, tant politiques que militaires ou économiques. Ce que l'on n'arrive pas à régler en des décennies de tensions et de paix larvée ne se réglera pas du jour au lendemain parce qu'on fait semblant de s'aimer. D'autant plus que la trêve antique était bien davantage un sauf-conduit pour les athlètes qu'une absence de conflits.

Pendant que les peuples du monde défilaient en harmonie dans le stade olympique, et le premier ministre russe Vladimir Poutine, la Géorgie pro-occidentale "envahissait" une de ses propres régions séparatiste et pro-russe, l'Ossétie-du-Sud, provoquant de ce fait une réaction militaire tout aussi musclée de la Russie qui "envahissait" alors la région. Les affrontements auraient fait des milliers de victimes tant chez les belligérants que dans la population. Doit-on vraiment s'en étonner ? Pendant que l'état de paix règne sur les Jeux olympiques, l'état de guerre enflamme donc une autre région du globe et met en évidence les tensions entre les peuples et les blocs d'intérêt. On aura ainsi profité de ce que les projecteurs étaient concentrés sur Pékin pour réveiller de vieilles querelles qui remontent au démantèlement de l'Union soviétique et qui vont exacerber les tensions entre la Russie, d'une part, et les États-Unis, l'Europe ainsi que les anciennes républiques de l'URSS, comme l'Ukraine. De plus, la Russie ne cache pas ses velléités d'annexion non seulement sur l'Ossétie-du-Sud mais également sur une autre région géorgienne, l'Abkhazie.

Le Conseil de sécurité n'était toujours pas arrivé hier à s'entendre sur un appel à la trêve, compte tenu de l'extrême complexité de la crise et de ses répercussions géopolitiques, sur fond pétrolier. En effet, ce sont des militaires américains qui forment l'armée géorgienne. La Géorgie a envoyé un contingent de 1 000 soldats en Irak. Les Américains voudraient utiliser la Géorgie comme base pour leur projet de bouclier antimissile. Par-dessus toutes ces considérations, le pipeline anglo-américain Baku-Tbilisi-Ceyhan permet d'acheminer le pétrole des immenses champs gaziers et pétrolifères de la mer Caspienne de l'Azerbaïdjan, via la Géorgie et la Turquie jusqu'au port turc de Ceyhan sur la Méditerranée. C'est pourquoi, George W. Bush, ainsi que les candidats à sa succession, le républicain John McCain et le démocrate Barack Obama, se sont d'ailleurs empressés de condamner l'intervention militaire russe et de demander l'intervention d'un médiateur "vraiment neutre".

Hormis les Nations unies, il y a peu de médiateurs "vraiment neutres" pour changer un état de guerre en état de paix.

Comme les Américains ont toujours besoin des Russes sur d'autres dossiers tout aussi délicats comme le dossier nucléaire en Iran, il est évident que tout le monde marche sur des oeufs et que les solutions à la crise passent d'abord par le court terme, soit un cessez-le-feu dans les plus brefs délais avant d'envisager des solutions à long terme. Furieux de l'empressement des nations occidentales à reconnaître l'indépendance du Kosovo de la Serbie, la Russie a sorti les gros bras.

On est loin des JO et de l'idéal de paix qui les sous-tend. Or, hier, lors de la remise des médailles à la compétition de pistolet à air comprimé, une Russe et une Géorgienne se sont embrassées sur le podium. La réalité des tensions entre leurs deux pays est tout autre, mais le symbole olympique est toujours porteur d'espoir.

pbergeron@ledroit.com