Le gouvernement fédéral a enregistré un déficit de 517 millions $ en avril et mai de cette année. Bien qu'on nous dise que ça ne doit pas être une source d'inquiétude, il faut malgré tout s'en préoccuper. Parce que les conservateurs ont mis en place un train de mesures pour tarir les revenus de l'État : notamment par la baisse de la TPS de 7 % à 6 %, puis 5 % et une baisse de l'impôt aux entreprises, en même temps qu'il augmentait ses dépenses (armée, transfert aux provinces).

Le gouvernement fédéral a enregistré un déficit de 517 millions $ en avril et mai de cette année. Bien qu'on nous dise que ça ne doit pas être une source d'inquiétude, il faut malgré tout s'en préoccuper. Parce que les conservateurs ont mis en place un train de mesures pour tarir les revenus de l'État : notamment par la baisse de la TPS de 7 % à 6 %, puis 5 % et une baisse de l'impôt aux entreprises, en même temps qu'il augmentait ses dépenses (armée, transfert aux provinces).

Moins d'argent perçu par le gouvernement signifie qu'il en reste plus dans les poches des citoyens : voilà le genre de credo conservateur que la bande à Stephen Harper veut nous convaincre. Elle a raison, en bonne partie. Même si la baisse des revenus du gouvernement central n'est pas la meilleure manière de mener les finances publiques, et en particulier, d'aider les Canadiens et les secteurs économiques qui en ont le plus besoin. Ce message a été dit et redit depuis la campagne électorale précédant l'élection de janvier 2006 : il faudra s'y faire, les conservateurs sont intraitables sur le sujet.

Le déficit enregistré en avril et mai dernier n'est peut-être qu'un hoquet dans l'économie nationale. Cela est bien possible et c'était même arrivé en 2002. Cela n'avait pas empêché le fédéral d'enregistrer un surplus de 7 milliards $.

C'est pourquoi l'avis d'observateurs des finances publiques est partagé sur le signal qu'envoie ce déficit de 517 millions $ sur deux mois. Ce pourrait être le signe annonciateur de mauvais temps, ce ne pourrait être qu'un nuage passager dans un ciel clairsemé.

Évidemment, le ministre des Finances, Jim Flaherty, s'est voulu rassurant : "Les résultats [...] ne sont pas révélateurs pour l'année au complet, a-t-il fait savoir. Le gouvernement prévoit un excédent de 2,3 milliards $ pour l'exercice 2008-2009. Nous avons bon espoir de réaliser cet excédent."

À l'opposé, le chef libéral Stéphane Dion en a profité pour attaquer la crédibilité des conservateurs à gérer les finances publiques. "Ils n'ont rien vu venir du ralentissement économique mondial. On les avait prévenus, pourtant, et maintenant on fait face aux mêmes erreurs que les conservateurs ont commis dans le passé."

Pendant sa décennie au ministère des Finances, Paul Martin s'était fait une fierté de livrer un bilan supérieur aux attentes. Au point où les prévisions économiques dévoilées dans le budget annuel du printemps n'avaient aucune commune mesure avec l'état final des finances publiques. Il prévoyait trois, ça finissait à 12. Il prévoyait huit, ça finissait à 18 !

Ce qui était frustrant, c'est que bien des Canadiens avaient l'impression de se serrer la ceinture pendant 11 mois... pour apprendre au fil d'arrivée que leur gouvernement nageait dans l'argent. Et pendant ce temps, plusieurs provinces - en particulier celles qui n'ont pas de revenus pétroliers, comme le Québec et l'Ontario - voyaient leur situation budgétaire s'empirer. Les Canadiens ont vu leurs infrastructures se désagréger - le viaduc de la Concorde, les 100 millions $ pour rénover des ponts, ça vous dit quelque chose ? -, leurs soins de santé aussi. Cet écart entre les finances fédérales et celles des provinces n'est pas étranger non plus à tout ce roman-savon sur le déséquilibre fiscal, pas mal réglé lorsque les conservateurs ont haussé leurs versements aux provinces.

La prudence est de mise en ce début d'année financière. Il faut être particulièrement allergique aux propos de certains qui disent qu'il ne faut pas s'inquiéter de l'état des finances publiques, en partie parce que le fédéral vient de se faire garantir 4,25 milliards $ lors de l'enchère d'une partie du spectre pour la téléphonie cellulaire. Cela a beau être trois fois plus que prévu, compter sur cette somme pour rétablir le bilan du fédéral est l'équivalent de vendre une partie de son troupeau de vaches pour se payer une nouvelle trayeuse : à un moment donné, à force de tarir ses sources de revenus, il sera trop tard. Le diable sera aux vaches !