C'est un Stephen Harper embarrassé qui tentait, en mai dernier, de minimiser l'impact de la relation «intime» de son ministre des Affaires étrangères avec une ancienne conjointe au passé trouble.

«Une histoire relevant de la vie privée» était devenu son mantra.

De son côté, Julie Couillard devait donner deux entrevues, l'une à TVA, l'autre, à 7 jours.

Elle y révélait avoir rendu au gouvernement, par le biais de son avocat, les documents classés confidentiels «oubliés» chez elle pendant cinq semaines par Maxime Bernier.

«Au lendemain de son assermentation à Rideau Hall, j'ai compris qu'il (Bernier) s'était servi de moi pour faire un blast médiatique», avait-elle confié à l'hebdomadaire.

Elle ajoutait, avec une candeur relative, s'être rendue compte que son «rêve» relevait du mirage et qu'elle se sentait «déçue» par un amant qui «n'avait pas la colonne» qu'elle croyait.

Elle devait ensuite affirmer sérieusement n'avoir jamais cherché à profiter de sa relation avec un ministre fédéral:

«Je suis constamment en relation avec des hommes d'affaires qui gagnent beaucoup de sous, disait-elle. Un ministre, ça n'a pas d'argent».

Compte tenu des suites de l'affaire Bernier-Couillard, que certains ont rebaptisé «couillardgate », on ne peut réprimer un sourire devant les allégations de l'ex-mannequin.

Nous passerons sur l'épisode du système d'alarme neutralisé et du microphone dans le matelas, qualifié d'«invraisemblable» par plusieurs experts en sécurité, dont

Michel Juneau-Katsuya, ex-cadre au SCRS et patron de la firme Northgate.

«Une chérie qui a voulu se venger », affirmait Monique Jérôme-Forget.

Ou distraire en vain de ses douteux antécédents.

Dans un cas comme dans l'autre, Couillard pourrait le regretter.

En incriminant son ex, elle a reconnu avoir conservé, sans y être autorisée, des documents relevant de la sécurité nationale, pendant une durée inappropriée.

Quand on a frayé avec le crime organisé, attirer ainsi l'attention des médias peut se retourner contre soi.

Des organisations subversives auraient pu donner cher pour consulter le profil des membres de l'OTAN, dans ces papiers.

Les soupçons de vol deviennent inévitables.

Une autre tuile s'est abattue sur l'infortunée.

La Presse a révélé qu'un dirigeant de Kevlar avait organisé la rencontre entre elle, devenue courtière immobilière, et Bernier, fin avril, au Cavalli, un restaurant accueillant parfois des membres du crime organisé.

Kevlar espérait intéresser Michael Fortier, ministre des Travaux publics, à choisir un de ses sites de Québec pour y construire un «édifice-phare» destiné à 700 fonctionnaires.

Sitôt liée à Bernier, Couillard le presse d'intervenir auprès du gouvernement pour qu'il favorise Kevlar.

Le Beauceron refuse catégoriquement.

Tant pis, elle entreprendra une liaison avec Bernard Côté, conseiller de Michael Fortier, aussi infructueusement.

Le stratège démissionnera toutefois pour avoir dissimulé son potentiel conflit d'intérêt.

Depuis belle lurette, un petit immeuble à bureaux de Laval, abritant certains locataires liés au crime organisé, retient l'attention de la police.

Maintenant, ce sont les médias qui l'ont dans leur mire.

Julie Couillard y a justement un bureau.

Cette fois, la «chérie» n'aura plus de ministre à blâmer lors d'un éventuel blast médiatique.

Olivier Kaestlé

Trois-Rivières