(Lorgues) Avec son bâtiment entouré d’oliviers et de vignes, bercé par le chant des cigales, Château La Martinette correspond en tous points aux clichés des vignobles de Provence. À une exception près : c’est un Québécois, Jean-Denis Aurouze, qui dirige le domaine.

Il faut beaucoup de volonté pour se rendre à Château La Martinette. Sur plusieurs kilomètres, la route de campagne étroite et sinueuse ne semble mener nulle part. Jusqu’à ce qu’enfin les terrasses en pierre sèche parsemées d’oliviers se dévoilent aux visiteurs.

Château La Martinette a célébré ses 400 ans en 2020. Pourtant, l’architecture moderne du bâtiment principal est digne des plus beaux domaines viticoles.

« Les gens font un effort pour se rendre jusqu’à nous, convient le responsable du domaine, le Québécois Jean-Denis Aurouze. On veut les accueillir comme il le faut. Quand on a fait les rénovations, on a créé une salle de dégustation et un restaurant. »

PHOTO KARYNE DUPLESSIS-PICHÉ, COLLABORATION SPÉCIALE

Le Québécois Jean-Denis Aurouze dirige le domaine Château La Martinette.

Tout un défi

Jean-Denis Aurouze n’avait pas planifié de travailler dans le monde du vin lorsqu’il a traversé l’Atlantique en 2001. Il s’est installé dans la Ville Lumière pour poursuivre ses études de gestion. Originaire de Québec, il était toutefois passionné par le vin. Le hasard a bien fait les choses. Il s’est lié d’amitié avec Guillaume Harant, ingénieur agronome et œnologue de formation. Lorsque ce dernier a pris la direction de Château La Martinette, il a proposé à Jean-Denis de se joindre à lui pour prendre en charge la gestion. Il n’a pas hésité, mais surtout, il est rapidement sorti du bureau pour s’impliquer dans les vignes et dans le chai. À l’époque, tout était à faire.

PHOTO GRÉGOIRE KOULBANIS, FOURNIE PAR CHÂTEAU LA MARTINETTE

L’immense propriété fait 400 hectares.

Trois associés venaient de reprendre l’immense propriété de 400 hectares. Les bâtiments anciens devaient être restaurés, certaines variétés de raisins devaient être retirées et, surtout, dans l’océan de rosé des Côtes de Provence, il fallait que les vins se démarquent.

PHOTO GAEL DELATE, FOURNIE PAR CHÂTEAU LA MARTINETTE

Le domaine s’est doté de plusieurs œufs en grès pour les vinifications.

« On a arraché 15 hectares, explique M. Aurouze. On a allongé les élevages pour ajouter de la complexité. On s’est dotés de plusieurs œufs en grès pour effectuer les vinifications. »

Les travaux entamés en 2017 portent maintenant leurs fruits. Mais la transformation est loin d’être terminée, soutient-il, surtout avec les changements climatiques, qui rendent la viticulture toujours plus compliquée.

PHOTO FOURNIE PAR CHÂTEAU LA MARTINETTE

Château La Martinette est entouré de forêt.

Moins de rosé, plus de blanc 

Lové entre la mer Méditerranée et la montagne Sainte-Victoire, Château La Martinette est entouré de forêt. Cette particularité apporte de la fraîcheur aux vignes dans une région réputée pour ses températures estivales élevées. Malgré cet atout, Jean-Denis Aurouze teste de nouveaux cépages plus résistants à la sécheresse.

PHOTO GAEL DELATE, FOURNIE PAR CHÂTEAU LA MARTINETTE

De nouveaux cépages ont été plantés, dont l’assyrtiko.

Il a entre autres planté un hectare d’assyrtiko. Cette variété grecque, typique de l’île de Santorin, n’est pas très fruitée, mais ses raisins conservent beaucoup d’acidité malgré la chaleur.

Guillaume [Harant] et moi adorons l’assyrtiko. On sait ce que ce cépage donne sur un sol volcanique, mais on n’en a aucune idée sur un sol calcaire comme en Provence.

Jean-Denis Aurouze, à la tête du domaine Château La Martinette

L’assyrtiko n’est pas le seul cépage grec qui prend racine dans le sud de la France. Avec les changements climatiques, l’appellation Côtes de Provence a autorisé en 2021 l’intégration de l’agiorgitiko, du xinomavro ainsi que du moschofilero dans ses assemblages.

PHOTO CLAUDIA DEVILLAZ, FOURNIE PAR CHÂTEAU LA MARTINETTE

Le domaine misera davantage sur les blancs dans les années à venir.

Outre les nouvelles variétés, le véritable changement s’effectue sur le plan de la couleur des vins. « On produit 70 % de rosé, mais on va descendre de 10 % dans les prochaines années. On a trouvé notre style de rosé ; ce n’est pas avec cette couleur qu’on va innover », explique le Québécois.

Pour augmenter sa production de blancs, il a planté davantage de clairette, une variété typique de la région qui connaît une forte croissance, ainsi que de la roussanne. Il a également converti une parcelle de cabernet franc en petit manseng, un cépage blanc du sud-ouest de la France.

Au-delà de la couleur et des cépages, Jean-Denis Aurouze croit que ce qui démarque vraiment Château La Martinette, c’est l’accueil cool, plus décontracté. Même s’il a adopté l’accent chantant du sud de la France, ses racines québécoises y sont sans doute pour quelque chose.

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Deux rosés de Château La Martinette à déguster

PHOTO TIRÉE DU SITE DE LA SAQ

Château la Martinette Rollier de la Martinette 2022

Rollier

La cuvée Rollier est certifiée biologique depuis 2020. Elle est composée en majorité de grenache ; l’attaque est gourmande et fruitée. Le vin contient également du tibouren. Cet ancien cépage de Provence ajoute un côté épicé et de la structure à ce rosé au bouquet rempli de pêche et de fleurs.

Château la Martinette Rollier de la Martinette 2022 (13448699), 21,10 $

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PHOTO TIRÉE DU SITE DE LA SAQ

Château la Martinette Côtes de Provence 2022

Rosé de table

Autant en ce qui concerne ses parfums que sa structure, la cuvée du Château est plus complexe. Elle doit entre autres son secret à un cépage blanc, le rolle, qui représente plus de 10 % de l’assemblage. Celui-ci apporte des notes d’agrumes et de fruits jaunes. Le vin est en partie vinifié dans de grandes cuves en béton, ce qui ajoute de la rondeur et de la longueur. S’il est servi avec une salade de fruits de mer et de pesto, on entend presque les cigales chanter dans le verre.

Château la Martinette Côtes de Provence 2022 (15174134), 27,80 $

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