John Parisella propose un pas de recul sur l’actualité aux États-Unis afin de mieux comprendre les enjeux qui émergent dans la course pour la Maison-Blanche.

Le 3 avril dernier, un sondage commandité par le Wall Street Journal indiquait que l’ancien président des États-Unis et aspirant républicain à l’élection présidentielle de 2024, Donald Trump, serait en avance dans six des sept États clés pour remporter la majorité du Collège électoral américain.

Certes, il est encore tôt, mais il faut reconnaître que malgré ses déboires devant les tribunaux – il est devenu lundi le premier ex-président américain à comparaître devant la justice pénale –, Trump pourrait bel et bien être de nouveau élu président en novembre prochain.

Le parcours politique de Trump

Lors de l’élection présidentielle de 2016 qu’il avait remportée, Trump avait émergé du lot des prétendants républicains en se présentant en candidat anticonformiste.

Il avait revêtu des habits de « nouveau républicain » qui n’hésitait pas à prendre de front ceux qui avaient dominé le parti depuis la présidence charnière de Ronald Reagan.

Lorsqu’il a été choisi candidat à la convention républicaine de juillet 2016, ses premières paroles ont été : « Je serai votre voix. » La campagne qui a suivi a été très axée sur sa personne, sur sa personnalité d’homme d’affaires milliardaire et de vedette de la télévision. Son profil se distinguait nettement du profil traditionnel de politicien de carrière auquel les Américains ont été exposés depuis plusieurs décennies. C’est ainsi qu’à la surprise des observateurs aguerris, il a remporté l’élection de novembre 2016.

Mais la surprise ne s’est pas limitée à l’élection de 2016.

Après son arrivée au pouvoir, Trump a mis en place une administration fort polarisante, a fait des gestes souvent imprévisibles et improvisés, et a gouverné dans une dynamique d’affrontement face à plusieurs autres instances gouvernementales. Un style de gouvernance qui contrastait avec nombre de traditions et de conventions de la politique américaine. Sa proximité avec certains dirigeants autoritaires comme Vladimir Poutine et Kim Jong-un a aussi déstabilisé les alliés des États-Unis.

Tout au long de son mandat, on se souviendra que Trump a fait des efforts pour démolir l’héritage de son prédécesseur, Barack Obama, en matière d’accessibilité aux soins de santé, ce qu’il n’a pas réussi à faire. Il a cependant retiré les États-Unis de l’accord de Paris sur les changements climatiques, ainsi que de l’accord sur le contrôle des armes nucléaires avec l’Iran.

Après avoir perdu le contrôle de la Chambre des représentants aux élections de mi-mandat de 2018, le président Trump a été mis en accusation une première fois dans le cadre d’un processus d’impeachment (destitution) pour « abus de pouvoir » et « entrave à la bonne marche du Congrès ». En 2020, il a perdu la Maison-Blanche contre Joe Biden. Le Parti républicain a dû céder à la même occasion le contrôle du Sénat. Trump n’a jamais accepté sa défaite et a fait obstacle à la transition pacifique du pouvoir.

Les évènements qui ont suivi cette élection, comme l’émeute du 6 janvier 2021, qui avait tout d’une tentative d’insurrection, ont mené à une nouvelle mise en accusation dans le cadre d’une deuxième procédure de destitution.

Ainsi, de 2016 à 2021, le caractère imprévisible et anticonformiste de Donald Trump a contribué à alimenter un climat politique marqué par la surprise des frasques du président et de son administration.

Trump en 2024 : la continuité de l’anticonformisme

Aujourd’hui, on constate que le candidat Trump version 2024 peut compter sur une base beaucoup plus large et bien plus engagée qu’en 2016, séduite par son slogan MAGA (Make America Great Again) ainsi que sa vision conservatrice et populiste. Beaucoup de ses partisans croient toujours que l’élection de 2020 a été volée. L’équipe qui gère sa campagne a pris le contrôle de l’organisation du Parti républicain et a éliminé toute dissidence à l’interne. Trump exerce lui-même beaucoup d’influence sur les caucus républicains au sein de la Chambre des représentants et du Sénat.

L’ancien président parle de vengeance contre ses adversaires et contre certains de ceux qui l’ont largué depuis sa défaite de 2020. Il promet de transformer la fonction publique et de la mettre au diapason de ses politiques. Il a également affirmé qu’il entend être un « dictateur pour une journée », ce qui lui permettrait de fermer la frontière avec le Mexique. Il a aussi qualifié les personnes actuellement emprisonnées ou en voie de l’être pour leur implication dans l’émeute du 6 janvier 2021 d’« otages », et promet de leur accorder le pardon présidentiel s’il est élu. De plus, il se considère comme une victime de la politisation du système de justice américain par les démocrates et la « gauche radicale », une situation qu’il promet de corriger. Voilà des actions qui s’annoncent fort clivantes s’il est de nouveau élu président.

Sur la scène internationale, Trump continue de se méfier des organisations intergouvernementales et ses récents propos concernant certains membres mauvais payeurs de l’OTAN sèment beaucoup d’inquiétude chez les alliés occidentaux des États-Unis. Le président hongrois Viktor Orbán a confié, à la suite d’une rencontre avec Trump, que ce dernier n’avait pas l’intention d’appuyer l’Ukraine face à l’agression russe.

Bref, la version 2024 de Donald Trump s’inscrit dans la continuité de l’anticonformisme qui a marqué sa présidence de 2017 à 2021. S’il est élu à nouveau, il n’y aura pas de surprise cette fois-ci.

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