Imaginons un instant qu’il existe une entreprise canadienne appelée Facechinook. Cette entreprise a vu le jour il y a plusieurs années sous forme d’une belle expérience sociale en ligne permettant de maintenir les communautés et les amis en communication les uns avec les autres.

Elle se transforme rapidement en un ramassis confus d’opinions – certaines importantes et d’autres moins documentées – tributaire de la publicité, des clics, et dont le contenu politique est difficile à contenir. Or, cette même entreprise canadienne devient rapidement le plus grand projet de médias sociaux au monde, au point d’influencer les élections internationales et même les guerres.

Un jour, Facechinook, qui domine maintenant la distribution de contenu dans le monde entier à partir de son siège social de Mississauga, en Ontario, décide qu’elle n’aime pas la politique du gouvernement américain et, d’un seul coup, bannit de ses plateformes tous les médias locaux établis aux États-Unis. Quelqu’un active un interrupteur et, boum, 330 millions d’Américains ne peuvent plus accéder à Fox News, à NBC ou au New York Times sur ses plateformes numériques.

Dans ce monde fictif, pensez-vous que les habitants des États-Unis accepteraient que les Canadiens décident de ce qu’ils peuvent ou ne peuvent pas consommer ? Impossible, n’est-ce pas ? Les libertés américaines ne peuvent être bafouées, même dans un « pays imaginaire ».

Eh bien, ce sont précisément ces mêmes droits et libertés démocratiques qui sont aujourd’hui bafoués au Canada.

Facebook a décidé que les contenus produits au Canada ne devaient pas être distribués aux Canadiens, parce que la législation canadienne, conçue et adoptée par des politiciens canadiens élus par les citoyens canadiens, ne répond pas aux besoins de l’entreprise Facebook.

En effet, Meta, la société mère de Facebook, a commencé cette semaine à bloquer les informations à certains utilisateurs canadiens sur ses plateformes, dans le cadre de sa lutte contre le projet de loi sur l’information en ligne du gouvernement libéral.

Certains grands médias, comme La Presse, Le Journal de Montréal et le Financial Post, ont été parmi les premières cibles du blocus de Facebook sur les informations canadiennes, mais les petits médias locaux sont également touchés. ChrisD.ca, une plateforme d’information numérique de Winnipeg, a signalé que certains lecteurs ne peuvent plus accéder à son contenu sur Facebook. Pour les petits organes de presse locaux comme ChrisD.ca ou le nôtre, la majorité du trafic des lecteurs provient des plateformes en ligne. Désormais, plutôt que de recevoir des informations locales sur leur quartier à Winnipeg ou à Montréal, ces mêmes lecteurs se voient imposer du contenu international ou américain.

On peut aimer, détester ou mépriser une partie ou l’ensemble des médias canadiens. Mais là n’est pas la question. Il suffit de constater à quel point il a été facile pour Facebook de décider ce que vous devriez ou ne devriez pas voir – il a suffi d’appuyer sur un bouton au siège de Facebook pour que des dizaines de milliers de créateurs de contenu canadiens dévoués soient soudainement occultés.

Vous entendez depuis des années que lorsque quelque chose est gratuit, vous êtes le produit. Eh bien, maintenant, nous sommes non seulement le produit, mais aussi les esclaves.

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