L’un des objectifs phares de la COP15 est de protéger 30 % des surfaces marines et 30 % des surfaces terrestres. Ce double objectif apparaît nécessaire pour protéger la biodiversité et même la restaurer, en plus d’avoir la vertu d’être facile à saisir ; la formule 30*30 est aisée à communiquer.

Or, ce double objectif préoccupe les Peuples autochtones et communautés locales (PACL), comme ils l’ont exprimé le 14 décembre, journée organisée par l’International Indigenous Forum on Biodiversity et qui leur a été consacrée dans le cadre de la COP15.

Il s’agit en effet d’un enjeu essentiel dans la mesure où 80 % de la biodiversité répertoriée se trouve sur les terres des PACL (Peuples autochtones et communautés locales), qui savent manifestement la protéger de façon efficace.

Parmi les enjeux soulevés se trouve celui, crucial, du statut des terres protégées. Les PACL se demandent dans quelle mesure les terres des peuples autochtones seront considérées dans les nouvelles aires protégées, dans quelle mesure ces populations seront informées et consultées dans ce processus, et si elles pourront continuer à pratiquer leurs activités traditionnelles, notamment celles en lien avec leur subsistance.

Se pose également l’enjeu du type de conservation envisagé. S’agira-t-il d’une vision écologique, c’est-à-dire qui considère avant tout la biodiversité avec un décompte des espèces ? Ou d’une vision plus ouverte, qualifiée d’intégrale ou bioculturelle, c’est-à-dire qui prend en compte non seulement les populations de ces territoires, mais aussi leurs conceptions du monde, dont les pratiques traditionnelles, spirituelles et de gouvernance ? Dans le premier cas, les mesures de conservation pourraient exclure les populations locales ou limiter leurs activités, tandis que dans le second cas, il devient impératif d’en tenir compte.

Enfin se pose la question du respect des instances de gouvernance locales des communautés, conjointement avec la prise en compte de leurs savoirs et pratiques. Il en va alors de la capacité même de ces communautés à assurer leur existence et leur pérennité, et à mener à bien la conservation des ressources présentes sur leurs territoires, tout en sécurisant leurs besoins alimentaires et leur avenir.

Respect et partenariat

Ce qui est en jeu ici, c’est le respect des droits des peuples autochtones et des communautés locales tels qu’inscrits dans les textes internationaux : la Déclaration universelle des droits de l’homme, la Convention 169 de l’Organisation internationale du travail, la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, de même que la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysans (pour ceux qui exercent des activités agricoles).

Anticipant tous ces débats, les peuples autochtones travaillent main dans la main avec l’UNESCO et l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), et promeuvent les Aires protégées et de conservation autochtones (APCA), dont la reconnaissance va croître.

Ce type d’aire protégée, qui est le plus souvent géré par des peuples autochtones ou des communautés locales (et non par un État), a en effet le potentiel de sécuriser l’accès au territoire, de promouvoir les modes de vie et de favoriser la conservation de la biodiversité par celles et ceux qui la connaissent au plus près et la respectent.

Ces questions sont essentielles, que ce soit dans des pays comme la Tanzanie, le Pérou ou le Brésil, mais également le Canada. En effet, à la lumière des débats qui ont lieu aujourd’hui, bien qu’il soit intéressant de considérer la reconnaissance de nouvelles aires protégées autochtones, il faut rester vigilant sur les tenants et aboutissants de leur mise en œuvre. La participation des PACL est en effet essentielle non seulement pour leur propre bien-être, mais aussi pour l’ensemble de l’humanité.

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