Choisir Mélissa Lavergne m’a fait sourciller, mais je n’ai pas pris le temps de m’en indigner. J’avais de la vaisselle à faire et je suis encore en retard sur mes impôts, donc j’avais d’autres chats à fouetter.

Littéralement.

Des chats.

Est-ce que Mélissa Lavergne était la meilleure personne pour ce poste ? La question est légitime.

C’est comme si on plaçait un homme au ministère de la Condition féminine ou bien un ex-policier au ministère des Affaires autochtones… Oh wait.

Bref, la question est légitime : pourquoi elle ?

Je n’avais pas lu d’articles sur le sujet, seulement des titres, seulement des publications sur les réseaux. Je n’avais pas besoin de lire, je savais quelle était la nouvelle. Je n’avais pas besoin d’y penser, je savais ce que j’en pensais : c’était une erreur de l’avoir choisie.

Heureusement, j’avais vraiment beaucoup de vaisselle à faire, alors, pendant quelques jours, j’ai pu laisser mijoter les idées dans ma tête. (Comme mon presse-ail dans mon eau de vaisselle.)

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Mélissa Lavergne

Et à bien y penser, ce ne sont pas Simon Jolin-Barrette et Richard Martineau qui ont choisi Mme Lavergne, c’est Lamine Touré et son équipe. Critiquer cette nomination, ce n’est pas critiquer Mme Lavergne, c’est critiquer Lamine Touré, fondateur et président du festival depuis près de 40 ans.

Depuis. Près. De. 40 ans.

Lamine Touré, père spirituel de la musique africaine à Montréal, n’a-t-il pas la légitimité de choisir un porte-parole ? N’est-il pas capable de choisir son équipe et de prendre des décisions éclairées ? N’a-t-il pas fait ses preuves ?

Lamine Touré fait rayonner l’Afrique à Montréal depuis plus longtemps que ses détracteurs sont sur Terre.

Ça met les choses en perspective.

On jase là. Mettons qu’il s’est dit que : pendant les 35 dernières années, généralement, les porte-parole, c’était des afrodescendants qui faisaient découvrir la musique africaine aux Québécois, et qu’il serait intéressant de voir ce qui arrive si, de temps en temps, c’était une Québécoise « de souche » qui lançait cette invitation au grand public.

On jase là. Mettons qu’il s’est dit que les festivaliers de Nuits d’Afrique faisaient souvent partie des mêmes groupes démographiques et qu’il serait intéressant (et possiblement rentable) de tester de nouvelles stratégies pour faire découvrir la musique africaine à une autre frange de la population.

On jase là. Mélissa Lavergne s’est fait proposer un poste de porte-parole… c’est du marketing, c’est des relations publiques, du PR.

Après 36 ans d’existence et 2 ans de pandémie, le Festival a-t-il l’indépendance de son propre PR ou doit-il se soumettre aux plaintes d’une minorité (qui n’avait probablement pas l’intention d’acheter de billets, anyway) ?

Elle ne s’est pas fait proposer de prendre d’assaut la programmation du festival, de jouer à la place de Tiken Jah Fakoly ou de faire un show de covers des chansons des Vulgaires Machins « à l’africaine ». (OK, ça aurait été quand même cool, ça !) Elle s’est fait donner une job de PR, that’s it.

Face à la grogne, Mélissa Lavergne s’est retirée et c’est tout à son honneur. I guess.

L’apparence de racisme n’est pas toujours du racisme. L’apparence de discrimination n’est pas toujours de la discrimination.

J’espère que ceux qui se réjouissent de sa démission vont acheter des billets…

Et que ceux qui se réjouissaient de sa nomination vont aussi en acheter.

J’ai l’impression que si on avait pris le temps de digérer la nouvelle au lieu de réagir aux titres clickbait, Mélissa Lavergne serait encore porte-parole du Festival Nuits d’Afrique.

D’un bord comme de l’autre, la prochaine fois, laissons donc tremper notre presse-ail dans l’eau de vaisselle avant de monter au créneau.

La nuit porte conseil.

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