Né le 24 août 1922, René Lévesque, qui aurait eu 100 ans cette année, a été sans contredit la figure marquante de la scène politique québécoise depuis la Révolution tranquille.

Qu’ils soient bleus, rouges, orange ou autres, tous les politiciens aujourd’hui se revendiquent de l’héritage de René Lévesque. Selon un sondage mené récemment auprès de la population québécoise, 66 % des gens considèrent qu’il a été le premier ministre le plus marquant du Québec depuis les années 1960. Robert Bourassa arrive bon deuxième, mais loin derrière avec seulement 8 %, suivi des Jean Lesage, Jacques Parizeau, Lucien Bouchard, Bernard Landry, Jean Charest, Pauline Marois et Philippe Couillard qui ne récoltent que des miettes.

Fait intéressant à noter, on ne voit plus René Lévesque comme un homme politique représentant un parti politique en particulier, mais comme quelqu’un qui a su incarner les aspirations des Québécois en quête d’une identité propre. Personne ne met en doute aujourd’hui, peu importe son allégeance politique, l’engagement de René Lévesque envers la population et les liens particuliers qu’il a su développer avec les gens du pays, que ce soit comme journaliste ou comme homme politique.

Son surnom Ti-Poil pourrait être interprété par certains comme un manque de respect envers l’homme peu imposant physiquement, fumeur invétéré et gros buveur qu’il était, mais on peut également le comprendre comme définissant un gars facile d’approche, sans prétention et près des gens.

Poussé vers l’action et voulant changer les choses, René Lévesque représentait l’antiestablishment et il était loin de donner l’impression d’être en politique pour lui-même et se faire les poches. Si Pierre Elliott Trudeau avait l’air d’un dandy avec sa rose à la boutonnière, en comparaison, René Lévesque semblait plutôt habillé comme la chienne à Jacques et se souciait bien peu de son apparence. Il n’était pas en politique pour se servir, mais pour servir. C’était l’homme d’une cause : la souveraineté du Québec, et peu importe que l’on soit d’accord avec ses opinions politiques ou non, personne n’a jamais remis en question son intégrité et le fait qu’il était un homme de conviction. Ayant grandi à New Carlisle, en Gaspésie, une petite ville à la fois francophone et anglophone, il a toujours fait preuve de respect pour la minorité anglophone au Québec.

De nombreuses réalisations

Quand vient le temps pour les Québécois de se rappeler les principales réalisations de René Lévesque, on retient notamment la Charte de la langue française, la nationalisation de l’électricité et la création d’Hydro-Québec, la fondation du Parti québécois, la création du ministère de l’Environnement et la réglementation portant sur l’assurance automobile, le financement des partis politiques, la protection de la jeunesse, les droits ancestraux des Premières Nations, la protection des terres agricoles et la protection du consommateur.

On ne retient pas seulement ce qu’il a fait, mais ce qu’il était. Grand communicateur, il n’avait pas la langue de bois. Charismatique, il était facile d’accès et semblait plus à l’aise devant une foule qu’en privé. Il se reconnaissait dans les Québécois, et ces derniers le lui rendaient bien. Les Québécois francophones partaient de très loin lorsque René Lévesque est devenu premier ministre de la Belle Province en 1976. Il en a fait un peuple fier. Il en a fait quelque chose comme un grand peuple.

Il nous a quittés le 1er novembre 1987, il y a 35 ans. On aurait pu se souvenir de lui pour ses échecs.

Mais malgré son rendez-vous manqué lors du référendum de 1980, il incarne, plus que tout autre leader de sa génération et ses successeurs dans la Vieille Capitale, l’âme québécoise.

Il est devenu, comme le père de la Turquie moderne, une sorte d’Atatürk québécois, celui auquel on se réfère comme un incontournable quand on veut se rattacher et s’identifier à l’histoire récente du Québec.

Sa statue à New Carlisle, la petite ville gaspésienne où il a grandi, rappelle celle de Carlos Gardel, le plus grand chanteur de tango de tous les temps que l’on peut voir dans un cimetière à Buenos Aires. Et on a le goût, comme le font les admirateurs de Carlos Gardel sur sa tombe, d’allumer une cigarette et de la mettre entre ses doigts, idée de faire comme s’il était toujours vivant.

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