Dimanche dernier à Tout le monde en parle, Marie-Louise Arsenault, l’animatrice de Plus on est de fous plus on lit, a été questionnée sur le caractère « woke » de son émission. Elle a paré l’accusation en disant que ce mot était aujourd’hui « galvaudé », « vidé de son sens » et qu’il servait « à insulter ».

Arsenault a poursuivi sa réflexion en disant qu’être « woke » signifiait simplement être « éveillé » aux injustices sociales. Elle posa même cette question rhétorique aux invités sur le plateau : « Est-ce que quelqu’un ici ce soir n’est pas concerné par l’injustice sociale ? » Le téléspectateur comprenait ainsi que tout le monde devrait adopter cette posture, sa posture. Bref, il n’y aurait rien d’idéologique dans ce mot.

Pourtant, ce sont bien les idéologies qui définissent à la fois les types d’injustice sociale qui sont à combattre ainsi que la manière de les corriger.

Dans le cas de l’idéologie woke, c’est en partie sa défense de l’égalité radicale pensée au travers du prisme racial qui la caractérise. Concrètement, elle propose la mise en place de politiques de discrimination positive en fonction de la couleur de la peau ou condamne publiquement un Blanc en raison de sa mise en scène de chants d’esclaves noirs.

Un mot galvaudé ?

Cela dit, il faut reconnaître que Marie-Louise Arsenault a raison lorsqu’elle dit que ce terme est aujourd’hui galvaudé. Ce qu’elle oublie en revanche, c’est que c’est le cas pour toutes les étiquettes politiques. Combien de fois les mots « communiste », « néolibérale » ou « conservateur » sont-ils lancés à tout vent sur les réseaux sociaux ?

Autrement dit, ce n’est pas parce que certains prennent prétexte du mot pour l’utiliser comme insulte qu’il ne pointe pas adéquatement une idéologie politique.

Certes, certains pourraient penser que le mot « woke » manque de précision et c’est en ce sens que le débat sur les mots que l’on utilise dans la sphère publique est important et qu’il doit rester ouvert.

Quelle définition est orwellienne ?

Marie-Louise Arsenault conclut sa réflexion en paraphrasant George Orwell qui s’inquiétait d’une époque où les mots limitent la pensée. Or, on le voit bien, le mot « woke », loin de limiter la pensée, permet d’identifier un réel mouvement politique qui prend de plus en plus de place dans l’espace public.

À l’inverse, refuser de voir qu’il y a une idéologie woke en prétendant que cela se résume à se soucier des injustices sociales, c’est prétendre à une forme d’objectivité et c’est aussi ne pas assumer que nos propositions en matière de justice sociale sont partielles et partiales.

En ce sens, Marie-Louise Arsenault fait un peu ce qu’elle dénonce : en réduisant la définition d’un mot à celle d’une posture « d’éveillé », elle limite notre pensée et le débat public.

Il n’y a pas à dire, on n’en a pas fini avec le mot « woke » et c’est tant mieux.

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