Une manchette récente dans la section des sports de La Presse m’a fait réagir. Et si, à l’instar du hockey américain, de plus en plus resplendissant au cœur de notre sport national, notre télévision québécoise parvenait à prendre ses marques chez nos voisins du Sud, en y faisant briller notre exceptionnel réservoir de talents ?

L’annonce de la présence de Jamie Lee Curtis dans l’alliance de production d’une télésérie d’inspiration québécoise donne le signal d’une percée hors frontières de plus en plus importante du talent et de la compétence qu’on trouve à profusion ici sur nos écrans.

Il faut dire que la télévision québécoise, sans être totalement refermée sur elle-même, n’était pas encore parvenue à se faire valoir solidement à l’extérieur du pays, les succès internationaux demeurant souvent à l’échelle de l’anecdote. Contrairement à d’autres territoires de dimensions similaires ou même plus petits, comme Israël, les Pays-Bas, la Norvège, la Suède, et même l’Islande forte d’une population d’à peine 350 000 habitants.

Mais voilà qu’un grand diffuseur numérique décide d’ouvrir ses grilles de programmation de façon significative aux idées et aux productions québécoises. Ce qui est d’autant plus réjouissant par rapport au leadership de Prime Video (Amazon) dans cette histoire, c’est qu’il ne semble pas s’exprimer sous la pression des gouvernements et des régulateurs. Les effets contraignants des mesures législatives et réglementaires ne se feront pas sentir de toute manière avant quelques années, pas avant que la loi fédérale ne soit adoptée et que le CRTC (le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes) n’ait défini et mis en place le cadre réglementaire afférent. Au rythme où se redéfinissent les structures de diffusion des contenus audiovisuels, le train de l’internationalisation aurait pu carrément nous passer sous le nez très souvent !

Mais heureusement, Prime Video semble déterminée à donner un souffle nouveau et structurant à notre industrie créative de l’audiovisuel en multipliant ces temps-ci les accords passés avec les créateurs et producteurs québécois.

Je cite ici le commentaire de Josée Vallée, vice-présidente de Sphère Média, qui travaillera aux côtés de Jamie Lee Curtis à la production de la série The Sticky, inspirée du vol inimaginable de cargaisons géantes de sirop d’érable en 2012 au Cœur-du-Québec, pour lequel l’auteur vient tout juste d’être condamné à une amende de 9 millions de dollars. Josée Vallée avait toutes les raisons de se réjouir face à « l’occasion offerte de montrer ce qu’on sait faire ».

Chez Prime, The Sticky n’est pas une première incursion au sein du système québécois de la création et de la production. Pas moins de 10 projets québécois verront le jour sur ses plateformes. Même l’emblématique Patrick Huard sera à la barre d’une série humoristique sur Prime Video dans une production d’Attraction Media. Le diffuseur en continu montre aussi sa confiance auprès de Muse, une autre entreprise importante de production, mais aussi de jeunes talents comme l’acteur, scénariste et producteur Julian Doucet et la documentariste Nathalie Bibeau. Pour alourdir son coup de tonnerre hier, Prime Video annonce aussi une série d’animation faite au Québec avec les comédiens de The Kids in the Hall.

Chapeau, Amazon Prime, les Québécois ne devraient pas hésiter à accepter la hausse annoncée des tarifs d’abonnement à la plateforme. Et souhaitons que votre reconnaissance du talent québécois puisse inspirer à la fois d’autres diffuseurs étrangers et des créateurs et producteurs qui oseront davantage cogner à leurs portes.

L’essor de la télévision québécoise a davantage intérêt à prendre racine dans le talent créatif et le savoir-faire que dans la contrainte réglementaire. La télévision est fondamentalement un monde d’idées qui repose sur la valeur de création, l’émulation et l’audace. Alors que le marché de la diffusion en continu commence à montrer des signes préoccupants de saturation, la bataille pour conserver les abonnés va porter encore davantage sur les meilleures idées, conformes à leurs lignes éditoriales distinctives. Il est primordial que la télévision québécoise soit sur la glace à ce moment-là pour montrer tout ce qu’elle a dans le cœur et dans le ventre.

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