Au même titre que la biodiversité qu’on observe dans la nature, le concept de la neurodiversité se définit comme étant la diversité des cerveaux et des esprits humains⁠1. C’est la reconnaissance d’une variation infinie du fonctionnement neurocognitif au sein de notre espèce.

Le concept de la neurodiversité existe depuis de nombreuses années. C’est en 1998 que le mot fut créé par Judy Singer et largement utilisé dans le milieu anglophone. Depuis 2015, le concept est également popularisé dans le milieu francophone. Si le terme est de plus en plus évoqué au Québec, sa définition, son paradigme et son mouvement sont encore peu compris.

Dans des mots simples, la neurodiversité est un concept qui se compare à la biodiversité. La biodiversité s’apprécie en considérant la diversité des écosystèmes, des espèces et des gènes. En ce sens, le cerveau est comparable à un écosystème : un réseau sain et en équilibre, d’une extrême complexité et infiniment diversifié. La neurodiversité est une réalité biologique. Cette infinie diversité provient d’une combinaison de facteurs innés et acquis qui interagissent entre eux et avec l’environnement pour former l’individualité de chaque être humain.

Tout être humain fait partie de la neurodiversité, que l’on soit neurotypique ou neuroatypique. De par sa définition, ce concept est inclusif et rassemble les êtres humains. Chaque être humain est entier et complexe. Chaque humain possède une énergie et un esprit unique qui évolue à chaque instant.

La neurodiversité ne concerne pas seulement l’autisme. Elle concerne entre autres toutes les divergences cognitives telles que le TDAH, la dyslexie, la dyspraxie, la dysphasie, la douance, l’hypersensibilité, la déficience intellectuelle, etc.

Le paradigme de la neurodiversité est une approche spécifique selon laquelle la dynamique de la neurodiversité agit comme toute autre diversité, c’est-à-dire comme une source de potentiel créatif favorable au développement de l’humanité. Le mouvement de la neurodiversité encourage la justice sociale qui favorise les droits civils, l’égalité, le respect et l’inclusion sociale complète. C’est ainsi que le mouvement souhaite transformer le regard porté sur les différences comportementales. Ainsi, on ne parlerait plus de maladies, de troubles, de lacunes, de handicaps médicaux ou de déséquilibres par rapport à la norme, mais de fonctionnements divergents naturels.

Cette revendication suscite énormément de controverse, il y a des intérêts commerciaux et pécuniaires. Toutefois, l’essence fondamentale de ce mouvement est un cri pour permettre le respect, la dignité, l’intégrité, la considération, l’autonomie, l’autodétermination, l’estime de soi, etc. Ainsi, les militants sensibilisent et informent pour que les appellations péjoratives pathologiques telles que maladies ou troubles soient éliminées du vocabulaire. Ils aspirent à ce que ces conditions neurologiques soient déclarées comme des caractéristiques biologiques représentant diverses formes naturelles de l’espèce humaine au même titre que la diversité culturelle, ethnique, sexuelle, etc.

En ce sens, nous pouvons faire le parallèle avec l’homosexualité, qui était considérée comme une maladie mentale il y a à peine 45 ans ! Traitements de toutes sortes étaient alors utilisés pour guérir ceux « affligés » par cette « maladie ». Aujourd’hui, bien que de nombreux défis et préjugés existent encore, il serait totalement absurde et très mal vu de parler de maladie ou de trouble pour l’homosexualité, alors que toute une communauté LGBTQ+ s’est consolidée au fil des années.

Pourtant, c’est ce qui est fait avec la diversité cognitive encore aujourd’hui, en 2022. La neurodiversité représente la diversité plutôt que l’incapacité et la déficience. Le mouvement ne nie pas les embûches et les multiples défis auxquels une personne neurodivergente peut faire face. Cependant, plutôt que vouloir corriger, guérir ou normaliser la personne, ce mouvement désir apporter soutien à la personne dans le respect de son mode de fonctionnement, avec une écoute véritable, en adaptant l’environnement. Un être humain peut avoir besoin de soutien, plus ou moins important, pendant une courte ou longue période de sa vie.

Le cerveau des personnes neurodivergentes est « câblé » de manière divergente de la norme, ce qui entraîne une tout autre perception de l’environnement avec des forces et des défis.

Ce câblage entraîne également des comportements, des réactions, des modes d’apprentissages, des ressentis si éloignés de la norme qu’il est difficile pour certaines personnes de comprendre. Les comportements, les réactions et l’intensité émotionnelle qui ressortent de la norme et qui semblent parfois incompréhensibles et qui effraient la majorité ne sont pas nécessairement le signe d’un trouble immuable ni d’un dysfonctionnement cérébral⁠2.

Pour comprendre le sens des comportements ou de la souffrance, il est impératif de considérer l’être humain dans un système complexe et dynamique et de concevoir les comportements comme étant une réaction physiologique « normale » et non comme une réaction conséquente à un trouble contre lequel nous devons nous battre.

Ainsi, grâce au concept de la neurodiversité, des militants ont la volonté de donner un éclaircissement probant à ce que certaines personnes perçoivent comme de nombreuses crises de « non-sens », de l’enfermement, un « retard » de langage, des épisodes d’« automutilation », des intérêts « restreints », du « maniérisme », des « stéréotypies », des « autostimulations », de l’opposition, de la procrastination, des réactivités intenses, un repli sur soi, etc⁠3.

L’autisme, comme toute autre divergence neurologique, fait partie intégrante de la diversité humaine et contribue à rendre notre société plus accomplie, plus profonde, plus entière.

* Cosignataires : Mitsiko Miller, coach certifiée, présidente de Famille en harmonie, atypique et mère d’enfants atypiques ; Cindy Boiteau, créatrice de la pédagogie neurosenrorielle Neuro Gym Tonik ; Valérie Labbé, pédiatre ; Chloé Finiels, accompagnement émotionnel et relationnel ; Joël Monzée, médecin en neurosciences ; Stéphane Blackburn, enseignant au cégep et autiste, surdoué, TDAH ; SaBine Gémis, éducatrice spécialisée en art-expression positive ; Johanne Leduc, maman de deux adolescents autistes ; Caroline Baril, intervenante et cofondatrice d’Un pas vers toi ; Fanie Lebrun, neurodivergente ; Nadine Randoll, enseignante au primaire ; Hélène Chartrand, maman d’un adolescent doué et dyslexique, coach de vie spécialisée pour mamans d’ados (TDA/H, DYS) et pour jeunes adultes ; Mélanie Gervais, fondatrice de l’organisme Enfant mode d’emploi ; Claire Stride, consultante et experte en diversités cognitives

1. Consultez le site neurodiversité.com 2. Consultez un article sur le site de Neuromanité

3. La neurodiversité – L’autisme : reconsidérer la nature humaine, de Mélanie Ouimet, Parents Éclairés

Consultez le site Aut’Créatifs, notamment pour l’utilisation de terminologie respectueuse envers les autistes Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion