L’auteure, essayiste et journaliste Joan Didion est morte il y a quelques jours. Octogénaire à la vie riche et productive, Joan Didion était influençeuse bien avant que le mot soit omniprésent dans notre jargon.

Dans l’objectif de la célèbre photographe Annie Leibovitz, Didion pose pour la marque Gap en 1989 à l’âge de 55 ans. Puis elle se prête à nouveau au jeu, 26 ans plus tard, cette fois-ci pour la marque et dans l’œil de Juergen Teller. Le tout, avec une assurance que plusieurs d’entre nous, des décennies plus jeunes, n’ont pas encore.

De l’immense œuvre de Joan Didion, je retiens d’abord son livre Miami – que j’ai lu 10 ans après sa parution et quelques mois avant d’aller vivre dans cette ville bouillonnante, modèle exemplaire de la richesse de l’immigration. C’est notamment d’elle que parle Didion dans Miami. Un livre qui présentait une autre perspective de la communauté cubano-américaine, qui à l’époque de la sortie du livre, était trop souvent réduite aux clichés qui passaient en boucle dans les bulletins de nouvelles.

À travers les pages et les interlocuteurs, l’auteure nous présente le déchirement qu’est l’exil en traçant des portraits qui, sans les ignorer, allaient au-delà des crises politiques, au-delà de Castro, au-delà de la CIA.

Aller plus loin, différemment et en profondeur. Voilà ce que faisait Joan Didion, avec passion et élégance.

J’ai une révérence inébranlable pour les femmes de cette génération. Tant parmi elles ont souvent été de tous les combats, mais surtout de toutes les solutions.

Et, pour chaque première ceci et chaque première cela qui est aujourd’hui célébrée avec raison, mais aussi avec tambours, fanfares et frontispices, il y a eu des pionnières bien avant, qui ont débroussaillé le chemin, et ce, sans éclats ni accolades. Ou sinon, trop peu. Plusieurs sont de la génération de Didion et de Walters, comme Barbara.

L’effet Barbara Walters

Maintenant à la retraite de l’écran, l’animatrice, journaliste et productrice Barbara Walters est aujourd’hui âgée de 92 ans. Comme Joan Didion, elle présentait les histoires et leurs protagonistes différemment, en profondeur et avec passion. En 1977, Walters fut la première journaliste américaine à interviewer Fidel Castro, et ce, pendant cinq heures. C’est une de ses nombreuses interviews qu’il ne serait pas exagéré de qualifier d’iconiques, comme tant d’autres de son illustre carrière. Cinquante ans marqués notamment par des entretiens avec tous les présidents américains de Gerald Ford à Barack Obama.

Mais comment mesurer l’effet Walters, encore aujourd’hui ? D’abord, par les nombreux journalistes qu’elle a inspirés. Parmi eux, les plus grands noms du métier comme celui d’Oprah Winfrey. Puis, par sa gestion du métier derrière la caméra.

Notamment, en étant la première journaliste à marier les départements des nouvelles à celui des variétés pour ses émissions, augmentant ainsi les budgets, les ressources, les revenus et, surtout, lui donnant plus de libertés.

Le succès de The View est aussi un bon baromètre. L’émission qu’elle a créée a célébré sa 25e saison à l’automne. En 1997, Walters a réuni cinq femmes autour d’une table, pour parler des sujets de l’heure. Elles étaient de différentes générations, de différentes expériences, et elles représentaient la mosaïque que sont les États-Unis.

Le concept de cette émission quotidienne peut paraître simple aujourd’hui, parce qu’il a été copié tant de fois, et ce, même à l’extérieur des frontières américaines. Au Canada, par exemple, pensons à l’émission Les lionnes, qui a été diffusée à l’antenne de Radio-Canada, pendant plusieurs saisons. Sur CTV, The Social est en ondes depuis 2013.

La formule de The View est encore la même aujourd’hui. On y commente les plus récentes tendances et on y présente des recettes de plats favoris, mais surtout, on y parle de politique. L’animatrice de MSNBC Nicolle Wallace, jadis directrice des communications du président George W. Bush, puis stratège pour l’ancien sénateur républicain et candidat à la présidence John McCain, est brièvement passée par la coanimation de The View. Elle a déjà affirmé que lorsque les politiciens de Washington veulent prendre le pouls du pays, ils regardent The View. Pas mal, pour un talk show diffusé en avant-midi.

Un rendez-vous télévisuel

Mais malgré cette indéniable influence, le magnus opus de Barbara Walters demeure, à mes yeux de grande fan, son annuelle émission de fin d’année des 10 personnalités les plus fascinantes, en ondes de 1993 à 2015. Le 10 Most Fascinating People de Walters était un rendez-vous télévisuel, comme il en existe peu aujourd’hui. L’émission était un retour sur ceux qui n’ont pas seulement fait la nouvelle mais qui avaient aussi, à leur façon, marqué l’imaginaire. À travers les années, on y a vu notamment le pape François, Hillary Clinton, Tiger Woods, Andre Agassi et LeBron James.

Je me souviens de la première édition de ce 10 Most Fascinating People, dans les années 90, l’ayant regardée en la commentant, pendant les pauses publicitaires, au téléphone avec Isabelle Racicot –aujourd’hui elle-même animatrice et productrice.

Cette émission était notre Super Bowl, nos Jeux olympiques et un début de tradition pour nous. Et près de 30 ans plus tard, cette tradition a une nouvelle mouture.

Le 8 janvier prochain et pour la deuxième année, Isabelle animera Les Dix sur les ondes d’ICI TÉLÉ – un palmarès des dix personnalités québécoises les plus fascinantes de l’année. Et comme celle qui l’inspire depuis des décennies, Isabelle brille dans ce genre d’entretiens. Elle va plus loin, en profondeur, avec passion et élégance.

Et au lieu de faire le commentariat au téléphone, je le ferai sur le plateau, accompagnée de l’historien Laurent Turcot et du sociologue Jean-Philippe Warren. Je ne sais pas pour les trois autres, mais moi, je me pince encore.

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