Le meurtre gratuit du jeune Thomas Trudel à Montréal me rappelle plusieurs autres drames gratuits dont celui de Polytechnique et de la Mosquée de Québec. Dans tous les cas, beaucoup de larmes contre les armes, mais peu de résultats pour leurs contrôles. Comment expliquer un tel échec ?

Malgré la bonne volonté exprimée par tous nos gouvernants, quel que soit le palier de décision, fédéral, provincial et municipal, tous s’avouent impuissants à contrer ce phénomène de société qui ronge petit à petit notre climat de sécurité.

La nature a horreur du vide, diront certains, et c’est pourtant ce dont il s’agit. Force est de constater que nous faisons face à un vide politique où les ordres de gouvernement se renvoient la balle prétextant que la responsabilité du contrôle des armes à feu relève d’un autre ordre de gouvernement. Bien sûr, je suis triste de toute cette situation, des larmes contre les armes ne suffisent plus à contrer ce phénomène qui pourrit depuis trop longtemps nos voisins américains.

Un aveu d’impuissance

Pendant ce temps, la peur se normalise et nos institutions s’enlisent en avouant leur impuissance (police, élus, groupes communautaires).

Face à cette situation, plusieurs citoyens désespérés fuiront les quartiers violents de Montréal, d’autres accuseront la police de ne rien faire et, finalement, d’autres diront qu’ils manquent de ressources pour combattre la pauvreté et l’exclusion, principaux motifs de recrutement de jeunes en manque de modèles parentaux ou d’espoir en l’avenir.

Tous ces motifs m’amènent à conclure à un aveu d’impuissance de nos institutions. Tous ceux qui connaissent les membres de gangs de rue ont la peur au ventre, sachant qu’ils ne seront pas protégés s’ils les dénoncent publiquement. Alors que faut-il faire ?

Inverser la peur

Qui ne se souvient pas des systèmes de corruption et de collusion à Laval avec le maire Gilles Vaillancourt et à Montréal avec « Monsieur 3 % » qui collectait un dividende sur tous les contrats de la Ville au profit du parti au pouvoir ?

Tout le monde le savait, mais tous craignaient de dénoncer le système en place. Nos institutions s’enlisaient, car se disait-on, la corruption a toujours existé. C’était un « mal nécessaire » au profit de crapules qui s’enrichissaient à la barbe de nos forces policières confinées à la résignation et à l’aveuglement volontaire faute de leadership et de soutien politique.

La Commission d’enquête publique sur la corruption dans le milieu de la construction, la commission Charbonneau, a eu un effet d’électrochoc en permettant une prise de conscience publique et en inversant la peur vers les crapules. Elle a permis de reprendre confiance en nos institutions municipales et nos élus.

Dans le cadre du contrôle des armes de poing ou des armes d’assaut, je suggère une approche différente, sans son caractère judiciaire, une commission de réflexion publique.

Pourquoi en effet ne pas inverser la peur en mettant sur la place publique toutes les sources d’irritation qui empêchent les élus, les policiers et les intervenants communautaires d’être efficace dans leur travail de prévention.

Évitons la « normalisation de la folie » des armes à feu

Qu’attend-on pour contrer ce fléau qui empoisonne notre société ? Voulons-nous imiter le modèle américain où tout le monde achète une arme sous prétexte de se protéger des autres ? Nous devons absolument éviter de « normaliser la folie » de l’usage des armes à feu.

Qui devrait être le grand responsable du contrôle des armes à feu ? Le niveau municipal, provincial ou fédéral ? Devons-nous créer une agence spécialisée de contrôle des armes à feu ?

Qui doit contrôler nos frontières face aux filières de trafiquants ? Comment pouvons-nous contrer les leaders des gangs de rue ? Quel modèle de société devons-nous développer pour inspirer les jeunes afin d’éviter qu’ils se fassent manipuler par l’appât des armes ?

Une commission de réflexion publique permettrait d’obtenir réponses à toutes ces questions, en inversant la peur face aux armes à feu vers ceux qui les possèdent illégalement afin de casser le moule « du pouvoir facile et de la violence gratuite » qu’engendre ce comportement de « normalisation de la folie » des armes à feu !

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