Le premier ministre Legault s’envole cette fin de semaine pour la conférence de Glasgow sur le climat. Il aura de quoi être fier puisqu’il y représentera une des sociétés les plus mobilisées au monde sur la question. Il portera nos inquiétudes grandissantes devant l’emballement du climat et nos espoirs de nous en sortir. Comme premier ministre d’une nation ayant adhéré à l’accord de Paris, il a également la responsabilité – comme tous les dirigeants de la planète – d’arriver à Glasgow avec le plus haut niveau d’ambition dont nous sommes capables pour contribuer aux efforts mondiaux.

Le premier ministre a fait de la fierté et de la cohésion sociale des piliers de son action politique. À ce chapitre, les changements climatiques y contribuent puissamment, étant devenus un des marqueurs identitaires de la nation québécoise. Malgré nos incohérences, nous sommes les Nord-Américains les plus préoccupés par la crise climatique et ceux qui exigent le plus d’action de nos dirigeants. On s’approche, chez nous, d’un véritable consensus social.

Les changements climatiques n’ont jamais été ici un enjeu polarisant ou partisan. Au contraire, ils nous rassemblent tous, peu importe où nous sommes sur le territoire. De tout temps, l’Assemblée nationale a parlé d’une seule voix pour appuyer les accords climatiques internationaux et même proclamer l’état d’urgence climatique.

C’est ici qu’est apparue la première taxe sur le carbone du continent pour financer notre premier véritable plan climat. C’est au Québec et en Californie qu’a émergé un des marchés de carbone les mieux conçus au monde. C’est ici aussi que l’électrification des transports est parmi les plus avancées.

Notre vision du développement économique a évolué en faveur d’une économie verte et décarbonée, dans un contexte de transition juste pour les travailleurs et les collectivités. Ces politiques font aujourd’hui largement consensus, peu importe la couleur de nos gouvernements.

Après de vigoureux débats, nous avons également fini par prendre des décisions largement consensuelles, comme la protection d’Anticosti, l’abandon de GNL Québec et maintenant l’interdiction de l’exploration et de l’exploitation d’hydrocarbures sur notre territoire. Et bientôt peut-être abandonnerons-nous ce projet de troisième lien, ce boulet que traîne inutilement le premier ministre et qui plombe toujours notre crédibilité environnementale.

Cette mobilisation des Québécois, on ne le reconnaît pas suffisamment, nous la devons aux innombrables groupes et associations citoyennes dont le travail inlassable nous a ouvert les yeux. Ces emmerdeurs dont on s’est longtemps moqué ont su rallier le reste de la société et continuent de nous secouer pour que nous nous montrions encore davantage à la hauteur. Souhaitons que le premier ministre les écoute et les traite avec respect, d’autant plus que les idées innovantes dont ils sont aujourd’hui porteurs font partie des solutions dont nous avons besoin.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le BIXI, moyen de transport populaire pour manifester pour le climat

La fierté, un sentiment à entretenir

S’il y a un message qu’il faut retenir des manifestations monstres sur le climat – les plus importantes au monde – organisées dans tout le Québec avant la pandémie et sous l’impulsion des générations montantes, c’est que les Québécois ne souhaitent ni s’asseoir sur leurs lauriers ni se complaire dans le pétage de bretelles.

Nous voyons bien que les changements climatiques courent plus vite que notre capacité à les contrer. Nous savons que la conférence de Glasgow ne règlera pas le problème et qu’il faudra redoubler d’efforts au retour.

Nous devons faire plus, mieux, et plus vite. D’autant plus que nous n’atteignons toujours pas les objectifs que nous nous sommes fixés, ce qui devrait nous insuffler une bonne dose d’humilité.

Tous les premiers ministres du Québec ayant participé à une de ces grandes conférences sur le climat en sont revenus transformés. D’abord, parce qu’ils ont été exposés à l’énormité et à la gravité de l’enjeu. Ensuite, parce qu’ils y ont fait des rencontres qui ont profondément changé leurs façons de voir. Et enfin, parce qu’ils auront compris que même leader dans certains domaines, le Québec en a long à apprendre dans une foule de domaines.

Le premier ministre constatera à Glasgow que le monde change très rapidement et que des idées nouvelles apparaissent. Que des solutions audacieuses émergent, en valorisation de la biodiversité, en financement innovant, en technologies, en changements de comportements et en politiques publiques. Et même en matière de remise en question de notre modèle économique qui mise sur une croissance infinie et carbure à la surconsommation. C’est le moment de faire le plein et de revenir chez nous galvanisés, inspirés par ce qui se fait de mieux ailleurs.

À Glasgow, le premier ministre Legault portera la fierté d’une société bien mobilisée dans la lutte contre les changements climatiques.

Mais la fierté est un sentiment qui s’entretient.

Son défi, notre défi comme Québécois, c’est que l’on sorte de la conférence de Glasgow la tête haute, avec le sentiment que nous sommes allés aussi loin que nous le pouvions.

Et que nous en revenions un peu plus humbles, mais convaincus et déterminés à en faire encore davantage.

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