La plus récente escalade des hostilités dans le territoire palestinien occupé et en Israël, qui a fait 269 morts – dont 66 enfants palestiniens et 2 enfants israéliens – avant de se terminer le 21 mai par un fragile cessez-le-feu, découle largement de l’incapacité des dirigeants politiques à s’attaquer aux causes profondes de la crise israélo-palestinienne.

Dans ce contexte, le Canada a maintenant une occasion historique de réaffirmer sa réputation de leader mondial dans la défense des droits de la personne et du droit international en jouant un rôle actif dans la construction d’une paix durable et juste pour les peuples palestinien et israélien.

Les précédents gouvernements n’ont pas agi en cohérence avec les principes clés de la politique étrangère canadienne. Ils sont restés mitigés sur l’expansion des colonies et ont fréquemment voté contre les résolutions de l’ONU, qui adoptaient pourtant les mêmes positions que le Canada (par exemple, appliquer à la population palestinienne la Convention de Genève qui protège les personnes civiles en temps de guerre).

Il y a quelques jours, lors de sa visite en Israël et en Cisjordanie, le ministre canadien des Affaires étrangères Marc Garneau a réaffirmé la position selon laquelle la construction de colonies est une violation du droit international et un obstacle sérieux à la paix. Il a surtout explicitement demandé à Israël de mettre fin aux activités de colonisation, ainsi qu’aux démolitions de maisons et aux expulsions de Palestiniennes et de Palestiniens.

Bien que ces mots soient importants, ils ne suffisent pas.

« Les Palestiniens de Gaza ont enduré quatre guerres successives rien qu’au cours des dix dernières années », rappelle la conseillère politique d’Oxfam à Gaza, Laila Barhoum. « Nous sommes fatigués. Jour après jour, nous regardons les bombes tomber sur les maisons où vivent nos amis et notre famille… Et jour après jour, nous attendons en vain la condamnation sans équivoque de la communauté internationale qui ne vient jamais. »

Quoique le maintien du cessez-le-feu actuel et la garantie de l’accès à l’aide humanitaire, évoqués par le ministre Garneau lors de son voyage, soient des préoccupations immédiates, elles ne peuvent occulter les causes sous-jacentes de la violence, et la nécessité d’affronter celles-ci.

Les atrocités dont le monde a été témoin découlent de semaines de brutalité et de force excessive de la part des colons et de la police israéliens à l’encontre de résidants palestiniens à Jérusalem-Est occupée ainsi que d’évictions illégales des résidants de Sheikh Jarrah. Elles sont également le résultat d’années d’impunité concernant les politiques d’oppression de l’État israélien, notamment l’occupation militaire depuis 54 ans du territoire palestinien occupé – y compris Jérusalem-Est –, et le blocus de 14 ans de la bande de Gaza.

Afin que des intérêts politiques ou économiques étroits ne nuisent pas à son engagement déclaré envers un ordre international fondé sur des règles et une paix à long terme, le Canada doit adopter une approche cohérente face au conflit. Au minimum, le gouvernement devrait demander la levée immédiate du blocus de Gaza. Toutefois, ce qui est réellement nécessaire aujourd’hui, c’est une politique étrangère audacieuse qui reconnaît sans ambages que l’occupation est au cœur de la pauvreté et de l’injustice dans le territoire palestinien occupé et qu’elle prive des générations de Palestiniennes et de Palestiniens de leurs libertés et droits fondamentaux.

Il est grand temps que le Canada prenne des mesures concrètes pour reconnaître et affronter les causes sous-jacentes du conflit. En tant qu’État partie au Traité sur le commerce des armes, le Canada a l’obligation de ne pas exporter d’armes lorsqu’il existe un risque clair qu’elles soient utilisées pour commettre une violation grave du droit international. Une mesure importante que le Canada devrait donc adopter serait la suspension de toutes les ventes d’armes à Israël.

Alors que les peuples palestinien et israélien continuent de vivre dans la crainte de la violence, le Canada doit utiliser tous les outils diplomatiques à sa disposition pour briser le cycle destructeur qui ne fait qu’accroître les violations des droits de la personne, les inégalités, la pauvreté et la souffrance. Les récents affrontements ont confirmé que l’inaction n’était désormais plus une option. Car si certains manquements ne mettent en jeu que la réputation de ceux qui les commettent, ici ils se mesureront en millions de vies brisées et d’espoirs anéantis.

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