Depuis les débuts de la crise économique causée par la pandémie de COVID-19, on a beaucoup évoqué un retour à des politiques d’achat local comme moyen de relancer l’économie du Québec. Le premier ministre Legault lui-même s’est récemment fait le champion d’une telle politique. Dans un domaine-clé comme celui de la production de médicaments, celle-ci n’aurait pas que des bénéfices économiques, mais pourrait aussi solutionner de graves problèmes d’approvisionnement auxquels notre système de santé est confronté.

La pandémie de COVID-19 a mis en évidence de graves faiblesses de la chaîne d’approvisionnement canadienne en médicaments. Celles-ci étaient déjà présentes auparavant et ont été exacerbées par la COVID-19, à un tel point qu’en avril dernier, nous avons frôlé de près une rupture d’approvisionnement en médicaments essentiels.

Comme le risque de pénurie touche principalement les médicaments génériques, qui représentent 75 % des ordonnances remplies au Canada, cette situation constitue un grave problème qui doit être traité en priorité afin de faire face à la seconde vague de la pandémie.

Au cœur du problème se trouve la dépendance croissante du Canada face à la fabrication à l’étranger des produits pharmaceutiques utilisés ici. Il n’en a pas toujours été ainsi. Dans les années 1970 et 1980, l’approvisionnement des pharmacies et hôpitaux canadiens reposait principalement sur des fabricants locaux. Depuis, cependant, une pression constante a été exercée sur les prix des médicaments génériques, qui ont chuté de 60 % en 10 ans. Cela s’ajoute à des coûts de main-d’œuvre locale plus élevés que ceux de pays concurrents comme l’Inde ou la Chine, d’où proviennent désormais une forte proportion des matières premières et des produits consommés au Canada, et un cadre normatif plus exigeant.

L’addition de tous ces facteurs a défavorisé la production canadienne et nous sommes devenus, au fil du temps, importateurs des médicaments que nous consommons.

La COVID-19 s’est avérée un rappel brutal de la précarité que cause cette dépendance. Les mesures de confinement mises en place partout sur la planète ont affecté la capacité de production de certains pays fournisseurs comme l’Inde. Les transports ont été partiellement interrompus, et les coûts ont explosé. En même temps, on assiste à un protectionnisme croissant à l’échelle planétaire, qui accroît la concurrence entre les pays et nuit à la libre circulation de produits essentiels comme les médicaments.

Fort heureusement, il est encore temps d’agir. Malgré la vulnérabilité de sa chaîne d’approvisionnement, le Canada a su faire face à la première vague de COVID-19. Mais ceci ne doit pas engendrer un faux sentiment de sécurité. Les causes du risque de pénurie n’ont pas été éliminées, et la COVID-19 est toujours tout aussi susceptible de perturber le fonctionnement de notre industrie pharmaceutique générique. Il faut sans tarder mettre en place des mesures consolidant la production et l’approvisionnement locaux.

Les solutions à ce problème passent toutes par des politiques publiques assurant une plus grande autosuffisance en matière de fabrication de médicaments en stimulant la capacité de production locale et en créant des réserves de matières premières et de produits finis. Les gouvernements fédéral et provinciaux sont les principaux acheteurs de médicaments au Canada.

Les gouvernements ont la capacité, par leurs politiques d’achat, de stimuler la production locale et de l’utiliser afin de rehausser l’autosuffisance.

Pharmascience Inc. est un acteur majeur dans la recherche de solutions à ce problème critique. Nous sommes le deuxième fabricant pharmaceutique en importance au Canada, et le plus important employeur pharmaceutique au Québec. Pharmascience possède la portée, la taille, la capacité et les ressources humaines pour offrir une contribution immédiate et concrète à l’amélioration de l’autosuffisance pharmaceutique du Canada. C’est pourquoi nous avons récemment soumis aux gouvernements du Canada et du Québec nos recommandations pour la mise en place d’un train de mesures visant à rehausser l’achat de médicaments produits au Canada et la sécurité de leur approvisionnement.

Si la raison première des mesures que nous proposons est la protection du public canadien contre un risque de pénurie de médicaments, une telle politique serait aussi un puissant levier de retour à la croissance économique, à un moment où le Québec en a un besoin pressant. La totalité des activités de fabrication et de R&D de Pharmascience ont lieu au Québec, qui bénéficie des emplois qu’elle crée et de leurs retombées économiques. La lutte contre la COVID-19, si elle mène à une consolidation de notre industrie locale, peut donc donner lieu à une stratégie doublement gagnante.

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