L’article de Mme Lacoursière publié samedi dernier qui se penche sur les bonnes pratiques de la Colombie-Britannique dans les CHSLD était très éclairant. On y constate que la Colombie-Britannique a rapidement établi des pratiques exemplaires, mais aussi que sa situation avant la pandémie offrait des conditions de réussite qu’on ne retrouvait malheureusement pas au Québec.

Un des problèmes soulevés dans l’article est celui de la mobilité du personnel de la santé. On sait maintenant que cette mobilité d’un établissement à l’autre a accentué la contagion et a provoqué des éclosions dans plusieurs CHSLD. Cette pratique de mobilité des ressources humaines était généralisée à ce moment-là. Quelques mois plus tard, la mobilité n’est plus une pratique courante.

Comme le souligne avec justesse l’article, la Colombie-Britannique a réussi à embaucher 7000 travailleurs avant la pandémie. Notre gouvernement a débloqué des budgets pour l’embauche de personnel, mais sans succès. Les professions de préposé aux bénéficiaires et d’infirmière, notamment, n’ont pas été valorisées au cours des dernières années. L’attractivité a été difficile. Nous avions également annoncé notre intention de mieux payer les préposés.

Malheureusement, la pandémie a frappé avant le redressement de notre système de santé. Le manque criant de préposés, additionné à un fort taux de contamination chez les employés, nous a contraints à tolérer les mouvements de personnel. On en a vu les conséquences rapidement. Le manque de formation en prévention et en contrôle des infections et les difficultés dans la distribution des équipements de protection individuelle ont aussi affecté particulièrement les CHSLD. À cela s’ajoute la méconnaissance du virus : on ne savait pas que les personnes asymptomatiques étaient contagieuses.

Le premier ministre a cependant réagi avec force et nous avons augmenté les salaires des préposés au moyen de primes et réussi à former plus de 7000 préposés en quelques mois cet été.

Je salue d’ailleurs cet exploit de notre service public, et le courage de ces personnes de dédier leur carrière à prendre soin des autres. Cet ajout de personnel, conjugué à des milliers de retours au travail, nous a permis de mettre fin à cette culture de gestion basée sur la mobilité des préposés en CHSLD. On a appris de la première vague. Et dès le dépôt du plan d’action en préparation à la deuxième vague de la COVID-19, j’ai précisé que la mobilité de la main-d’œuvre pour les préposés aux bénéficiaires serait interdite, alors que pour les infirmières et infirmières auxiliaires, les déplacements seraient limités au minimum, faute de ressources.

Pour donner un peu d’oxygène au réseau et venir en aide au personnel infirmier déjà en place, nous avons fait appel aux infirmières et infirmières auxiliaires retraitées et aux étudiantes en soins infirmiers. Nous avons aussi fait appel à d’autres professionnels du réseau pour que ces derniers puissent dégager les infirmières de certaines tâches et, ainsi, leur permettre d’être là où nous en avons besoin. Mais on ne peut pas les inventer ni les former en quelques mois.

Partout dans le réseau, la règle est claire : on doit éviter les déplacements des professionnels en soins d’un établissement à l’autre, sauf exception. Des mesures exceptionnelles peuvent être mises de l’avant par les gestionnaires dans des situations extraordinaires, mais chacune des décisions doit être documentée et justifiée. Surtout, les mesures de prévention et de contrôle des infections doivent être mises en place scrupuleusement. On le voit, cette pratique connaît déjà du succès dans nos milieux de vie pour aînés.

Parce que ce qui est pire que de déplacer un professionnel d’un endroit à un autre, c’est de priver une personne vulnérable en CHSLD de soins. On en convient tous.

L’article mentionne une autre condition préalable qui a beaucoup aidé la Colombie-Britannique ; il s’agit du nombre beaucoup moins élevé de chambres multiples. Au Québec, et en particulier à Montréal, beaucoup de nos CHSLD sont vétustes et beaucoup de chambres sont multiples, ce qui a favorisé la contagion. Le gouvernement s’attelait déjà à corriger ce problème avec un plan d’investissement de plusieurs milliards pour rénover les CHSLD et construire des maisons des aînés, ces dernières comportant seulement des chambres individuelles. Encore là, la pandémie a frappé. Mais depuis, nous veillons à réduire le plus possible le nombre de chambres multiples.

Je dois aussi souligner un autre travers du système dont nous avons hérité à notre arrivée au gouvernement : l’absence d’un gestionnaire responsable dans chaque établissement, capable d’évaluer les besoins et les capacités en personnel et en matériel en temps réel.

Une personne responsable de la bonne marche d’un CHSLD, d’une gestion rigoureuse et humaine du personnel et des besoins des résidents. Cette lacune a été corrigée. Nous avons mis un gestionnaire en place pour chacun des CHSLD du Québec. Et nous nous dotons aussi de responsables de prévention et de contrôle des infections à même ces milieux de vie.

Tout est loin d’être parfait, mais nous avons parcouru beaucoup de chemin depuis le printemps dernier. Avec mes collègues Marguerite Blais et Lionel Carmant, nous avons mis fin à la pratique généralisée de la mobilité du personnel comme mode de gestion des ressources humaines. Nous avons formé plus de 7000 préposés et 3000 autres personnes viendront s’ajouter au réseau d’ici la fin de l’automne. Nous sommes en train d’accélérer la formation et l’embauche de nouvelles infirmières et infirmières auxiliaires. Nous diminuons le nombre de chambres avec plusieurs résidents, nous rénovons les CHSLD et nous construisons des maisons des aînés. Nous avons embauché un gestionnaire dans chaque CHSLD. Nous appliquons avec beaucoup plus de rigueur les procédures de prévention des infections et nous nous sommes assurés que les CHSLD aient en tout temps les équipements de protection individuelle suffisants.

En terminant, je suis sincère en vous disant que le gouvernement n’a ménagé aucun effort pour lutter contre la COVID-19 et protéger les personnes qui nous soignent. Nous devons individuellement aussi faire notre part pour arrêter la contagion en réduisant nos contacts au minimum. Ce virus se nourrit des contacts entre les êtres humains, et nous devons l’affamer en restant à la maison.

Une forme d’Action de grâce pour soulager et protéger celles et ceux qui travaillent dans nos hôpitaux et nos milieux de vie pour aînés.

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