Cette lettre s’adresse à la ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, Nadine Girault.

Madame la Ministre, nous vous félicitons de votre nomination au poste de ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration.

Nous espérons vivement que votre parcours professionnel et personnel nourrisse votre compréhension des réalités vécues par les familles réfugiées qui ont besoin de la protection du Québec pour préserver leur vie et trouver ici une vie meilleure. Nous souhaitons porter à votre attention nos préoccupations quant au programme de parrainage collectif et des recommandations pour un meilleur engagement humanitaire du Québec.

Nous sommes un collectif de citoyens, certains nés ici, au Québec, d’autres ailleurs, qui avons en commun d’être des parrains et des marraines de personnes réfugiées. Outre le fait d’avoir déposé un dossier le 20 janvier dernier, nous partageons également toutes et tous le respect de l’État de droit ainsi que des principes de justice et d’équité.

Depuis le 20 janvier dernier, qui a marqué pour beaucoup d’entre nous la fin de quatre jours d’attente dans des circonstances extrêmement chaotiques et angoissantes, nous avons tenté à plusieurs reprises d’attirer l’attention de votre prédécesseur, Simon Jolin-Barrette, sur le caractère incohérent et inéquitable de la procédure de dépôt de dossiers. Durant ces cinq mois interminables, nous avons appelé et écrit en vain au ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI) afin d’en savoir plus sur le traitement de notre dossier – qui, rappelons-le, est garant de l’avenir des familles réfugiées que nous nous engageons à accueillir. Sans le moindre accusé de réception, nos demandes légitimes en tant que citoyens ont rebondi d’un service à l’autre du Ministère.

Le plus déchirant durant cette période était de ne pas savoir quoi annoncer aux personnes que nous parrainons. La pandémie de COVID-19 est venue ajouter à notre incertitude et à celle des personnes réfugiées, qui ont quant à elles à faire face au confinement dans des conditions sanitaires et sécuritaires souvent désastreuses dans les camps de réfugiés.

On peut donc imaginer ce que l’attente d’une réponse déterminante pour leur survie et leur avenir combinée aux conditions de vie dégradées en temps de pandémie a pu leur faire vivre.

Malgré nos appels répétés, le couperet est cruellement tombé le 19 juin dernier – la veille de la Journée mondiale des réfugiés – alors que nous apprenions dans les médias que plus de la moitié des dossiers déposés ne seraient pas acceptés. Non pas parce qu’ils ne respectaient pas les exigences administratives ou parce que les organismes de parrainage en région avaient dépassé leurs quotas. Non, le Ministère a fait le choix de priver le Québec de l’apport des personnes réfugiées parrainées à sa vitalité culturelle et économique tout simplement en raison du manque de clarté sur les consignes entourant l’envoi des dossiers par messagers. Cette décision est d’autant plus déplorable étant donnée la diminution conséquente des cibles annoncées dans le programme d’immigration humanitaire.

Nous espérons sincèrement que votre nomination puisse marquer un tournant favorable dans le rétablissement de l’intégrité de notre système d’immigration humanitaire, et ce, dans le respect des droits des personnes réfugiées ainsi que des parrains et des marraines qui s’engagent à les accueillir. Au nom de toutes les familles effondrées par le refus difficilement justifiable de leur dossier, nous vous demandons :

 – D’admettre l’ensemble des dossiers répondant aux exigences administratives du programme qui ont été déposés le 20 janvier dernier ;

 – De relever le plafond des quotas de dossiers de parrainage collectif et que ce nombre soit additionnel aux cibles de réfugiés pris en charge par l’État (RPCE) ;

 – De réduire les délais de traitement ;

 – De mettre en place des processus réguliers de consultation avec les groupes de 2 à 5 et les autres membres de la société civile concernés (regroupements, organismes).

Madame la Ministre, nous espérons pouvoir rétablir la communication et continuer à travailler de concert avec votre ministère afin de respecter les engagements humanitaires du Québec en tablant sur les forces vives des parrains et des marraines prêts à s’engager et à ouvrir grand les bras afin que notre société s’enrichisse des expériences et de la volonté de s’enraciner ici des personnes réfugiées parrainées.

* Parrains et marraines signataires : Florence Bourdeau, Myriam Richard, Marie-Jeanne Blain, Anne Nsimire, Sylvain Thibault, Stéphane Hernandez, Eva Gracia-Turgeon, Jérôme Lajoie, Sophie Ferron, Flower Munezero, Vénancia Mbionigaba, Bashiri Bakari, Pierre LeBel, Alice Dreimanis, Rean Sayegh, Dina Khoury, Monzer Al Romhain, André Saade, Ibtissam Houchane, Mughni Jouhayem, Elias Deeb, Nadine Rayan, Sarah Rayan, Line Arawani, Zein Baroudi, Aden Rahma Hamed, Abdoulkarim Djama moussa, Simon Turcotte, Ziman Monawar Big, Humaira Rahmatullah, Virginie Stinat, Amna Hassan, Parrain. Organismes de parrainage signataires : Église Orthodoxe St George, Société Druze du Canada au Québec et Église Arménienne Évangeline, représentées par Dina Yaziji ; Fondation Baitul Mukkarrm et Masjid Baitul Mukkarram, représentées par Fayza Rifai

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion