Certaines épreuves deviennent des révélateurs de failles existantes. Par exemple, des femmes découvrent qu’elles sont susceptibles d’être diabétiques lorsqu’elles sont enceintes, le diabète de grossesse pouvant être un révélateur de cette condition qui se développe généralement plus tard dans la vie d’un individu.

De même, la crise sanitaire a jeté une lumière crue sur l’ampleur de la faille qui sépare Montréal et le reste du Québec. Au-delà de la crainte justifiée de voir le virus sortir du premier foyer d’infection du pays, on a pu sentir, ces dernières semaines, un rejet de la métropole, des Montréalais et du mode de vie propre aux grandes villes.

Cette division ne date pas d’hier, et n’est pas propre au Québec. On peut par exemple la lire dans la fable sur le Rat de ville qui invite son ami, le Rat des champs, à venir le visiter. Ce dernier met abruptement fin à son séjour, dégoûté par les conditions de vie des urbains. Écrite au XVIIe siècle par Jean de la Fontaine, la fable est inspirée d’un poème d’Horace, qui s’était lui-même inspiré d’une fable d’Ésope… rédigée il y a plus de 2600 ans.

N’empêche, quelque chose m’inquiète dans le fait de voir Montréal et le Québec s’ériger, peu à peu, en deux solitudes. Montréal est unique sur le continent pour être la métropole d’un vaste territoire animé d’une histoire et d’une culture distinctes. Et les régions du Québec sont branchées sur le monde grâce, en très grande partie, aux réseaux développés à partir de la métropole.

À bas le dénigrement de « la clique du Plateau ». À bas les discours qui nous divisent.

Aussi, trois gestes forts pourraient contribuer à inverser la tendance. Le premier serait que Montréal soit davantage complice avec sa propre région, la région métropolitaine. Autrefois décrite comme la ville et « sa banlieue », le territoire, qui regroupe 82 municipalités et 4 millions de citoyens, est aujourd’hui un écosystème complexe où l’on retrouve des zones densifiées et de nombreux centres d’intérêt. Il faut prendre acte de cette évolution et commencer à rêver, ensemble, à l’avenir de notre territoire commun.

Conçu par la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), le Plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD) est une première bonne étape en ce sens. On pourrait cependant pousser l’exercice plus loin, par exemple en revoyant la gouvernance de la CMM. En particulier, on pourrait s’inspirer de la gouvernance de l’Union européenne, et transformer la présidence de la CMM en présidence tournante. Tous les six mois, une municipalité de la région assumerait le poste de direction, ce qui obligerait un minimum de réflexion et de communication sur ce qu’on veut faire, ensemble, du Grand Montréal.

Un deuxième geste serait de lancer un cycle de partenariats entre les grandes institutions de la métropole et des organisations régionales qui œuvrent dans le même secteur. Le dernier grand geste à cet égard date de 1968 avec la création du réseau des universités du Québec. Plutôt que de créer de nouvelles structures, on pourrait encourager les institutions de savoir et de recherche, les grandes institutions culturelles et les autres grands acteurs de la vie civique montréalaise à établir des liens formels avec des organismes régionaux, ce qui favoriserait les échanges d’idées et surtout, rapprocherait Montréal des régions.

Finalement, un troisième geste serait de faciliter les déplacements interrégionaux. Un lien ferroviaire fiable et rapide entre la Capitale nationale et la métropole est attendu depuis des décennies. Qu’on s’y mette enfin.

Par ailleurs, pour ce qui est des régions éloignées, j’ai déjà proposé, dans ces pages, la création d’une coopérative d’aviation.

Lisez « À quand une coopérative d’aviation ? »

Les coopératives apparaissent là où les forces du marché n’arrivent pas à répondre à des besoins réels, et seraient l’outil idéal pour combler ce besoin criant. Aussi, permettre le transport rapide et efficace des personnes sur tout le territoire du Québec permettrait assurément de rapprocher Montréal des régions.

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