Ces dernières semaines, bien des vies ont été fauchées. D’autres ont été complètement bouleversées. La solitude, qui touchait déjà un aîné sur trois et un jeune sur quatre avant cette crise, pèse encore plus lourd aujourd’hui et les consignes de distanciation physique sont sources d’anxiété pour de nombreuses personnes de tous âge.

En 2019 déjà, 31 % des Québécois de 65 ans et plus vivant seuls chez eux ne recevaient pas de visite ni d’appel téléphonique de leur famille au cours d’une semaine ordinaire. Dans les CHSLD, seul un résidant sur 10 y recevait des visites régulières de ses proches. En 2020, le phénomène d’isolement s’est exacerbé.

Alors que cette crise sanitaire sans précédent a révélé les failles de notre système de santé et de notre société, nous devons tirer les leçons de cette expérience et favoriser d’autres modes de vie, où vieillissement ne rime plus avec isolement.

Le logement intergénérationnel représente une solution de remplacement viable, qui s’inscrit dans les changements de modèles nécessaires pour les milieux de vie des aînés.

Cette pratique résout à la fois le problème du logement étudiant et celui de l’assistance aux personnes âgées. D’un côté, les aînés, qui comblent une chambre laissée vide dans leur domicile, s’offrent un complément de revenu. De l’autre, les étudiants peuvent se loger décemment, à moindre coût tout en donnant une dimension solidaire à leur colocation.

Par la proximité et le lien qu’il crée entre jeunes et aînés, le logement intergénérationnel contribue au dialogue entre les générations et à la lutte contre les préjugés. Les aînés peuvent vivre chez eux le plus longtemps possible et conserver leur place au sein de leur communauté.

Cette formule trouve particulièrement son sens en cette période de confinement, où de nombreuses personnes se retrouvent seules et dépourvues sans une aide quotidienne. Elle restera pertinente après la fin de cette crise, car la solitude mise en lumière ne disparaîtra pas avec les beaux jours. Le logement intergénérationnel doit participer de la relance de la société québécoise en luttant contre la précarité et en perpétuant l’élan de solidarité entre les générations.

Jumelage

Malgré ses nombreux avantages sociaux, économiques et environnementaux, le logement intergénérationnel reste méconnu au Québec. Pourtant, quelques organismes s’efforcent depuis des années de remplir cette mission en jumelant des aînés seuls avec de jeunes adultes en recherche de logement. Le suivi rigoureux qu’offrent ces organismes permet d’éviter plusieurs cas de maltraitance. Un important travail de sensibilisation reste à accomplir pour faire connaître cette offre par la population et reconnaître ce travail par les pouvoirs publics. Des incitatifs fiscaux devraient également encourager les aînés à se lancer dans cette expérience. Et pourquoi ne pas offrir des crédits aux étudiants qui font le choix de la cohabitation intergénérationnelle ?

Au Québec et ailleurs dans le monde, des initiatives innovantes permettent de repenser complètement la cohabitation intergénérationnelle et le mieux vivre-ensemble. Des modèles de milieux de vie ouverts sur la communauté, où tous les âges se côtoient, ont fait leurs preuves, parce qu’en plus d’offrir des avantages économiques et urbanistiques, ils consolident les liens sociaux et la solidarité intergénérationnelle.

La cohabitation intergénérationnelle est une solution efficace pour un Québec ouvert, inclusif et solidaire. Aidons-la !

* Signataires : Anne-Sophie Bornard, responsable du projet CohabitAction ; Pierre Gendron, directeur général des Habitations partagées de l’Outaouais ; Hassan Hassani, directeur général de la Maisonnée ; Karen St-Gelais, directrice des Habitations partagées du Saguenay ; Denise Tessier Trudeau, directrice de Combo2generations

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion