L’annonce d’une série de mesures visant à limiter les rassemblements publics à un maximum de 250 personnes et la fermeture de tous les établissements d’enseignement et les garderies pour une période de 14 jours font ressortir les pouvoirs exceptionnels du directeur national de la santé publique du Québec lorsqu’il est question de protéger la population contre une menace réelle à la santé.

Ce pouvoir, exercé à ce jour avec rigueur par l’équipe de la santé publique, démontre le sérieux de la situation à laquelle nous faisons face. Par ailleurs, le directeur de la santé publique du Québec, Horacio Arruda, a affirmé n’exclure aucune mesure qui lui permettrait d’enrayer la progression de la COVID-19 pendant qu’il est encore temps.

Dans ce contexte, d’où viennent ces pouvoirs et quelles pourraient être ces nouvelles mesures ? Quelle serait la portée de celles-ci ?

C’est de la Loi sur la santé publique que découlent tous les pouvoirs qui sont conférés aux directeurs régionaux et au directeur national de la santé publique en matière de protection de la population.

Cette loi prévoit notamment la possibilité de décréter la mise en place d’une campagne de vaccination massive comme lors de la pandémie de H1N1 en 2009, mais également lors de la présence de plusieurs cas de méningite en 1992.

Dans le contexte de la COVID-19, c’est fort probablement de l’article 106 de la Loi que s’est servi le Dr Arruda pour ordonner la cessation des rassemblements de plus de 250 personnes ainsi que la fermeture des écoles.

Il pourrait également, en vertu de l’alinéa 9 de l’article 106, ordonner toute autre mesure qu’il estime nécessaire pour empêcher que ne s’aggrave une menace à la santé de la population, en diminuer les effets ou l’éliminer.

De surcroît, il lui est possible de demander au gouvernement de déclarer un état d’urgence sanitaire selon l’article 118 — ce qui a été fait samedi —, et d’ordonner un confinement volontaire ou obligatoire.

Le confinement volontaire ou obligatoire

Dans l’éventualité où un confinement volontaire ou obligatoire d’une partie ou de la totalité de la population était ordonné, la population devrait notamment s’attendre à : 

 – L’interdiction de fréquenter les personnes âgées dans les CHSLD (tel qu’ordonné samedi) ;

 – La fermeture des commerces non essentiels au maintien de la vie tels que : salons de coiffure, nettoyeurs, centres commerciaux, magasins de meubles, quincailleries, cinémas, restaurants, etc. ;

 – L’interruption de toutes les activités des chantiers de construction ;

 – La fermeture des bureaux, des banques et autres institutions financières associées, les cabinets comptables et professionnels ;

 – Les ministères, etc.

Ne seront pas touchés par ces mesures les services essentiels à la population tels que : 

 – Les services de transports publics ;

 – Les services de santé (publics et privés) ;

 – Les services de protection publics (pompiers, ambulanciers, policiers) ;

 – Les épiceries et les pharmacies ;

 – Le transport par camion et par train ;

 – Les opérateurs de télécommunication ;

 – Les producteurs et distributeurs d’énergie (électricité, gaz propane et gaz naturel, etc.) ;

 – Les activités de production agroalimentaire ;

 – Les médias d’information.

La réalité d’un confinement volontaire ou obligatoire

De telles mesures de protection seraient sans précédent au Québec et au Canada. Toutefois, l’ordre de confinement volontaire ou obligatoire n’est pas un couvre-feu tel que décrété pendant la crise d’octobre de 1970 et les mesures de guerre.

En fait, l’expérience récente des autres pays comme l’Italie et l’Espagne démontre que la population peut continuer de s’approvisionner dans les supermarchés, renouveler ses ordonnances de médicaments, prendre l’air, promener son chien, etc.

Il n’y a donc pas lieu de paniquer et il importe de continuer d’être rationnel face à la situation. Toutefois, nous devrons faire preuve de patience.

Un Québec résilient

Je travaille dans le domaine des mesures d’urgence, de la sécurité civile et de la gestion de crise au Québec depuis 38 ans.

Au fil du temps, j’ai constaté comment les Québécois, ses entreprises et son économie étaient résilients face aux événements. Nous avons une capacité exceptionnelle de faire face aux sinistres et aux aléas et de nous rétablir comme personne dans le monde.

Nous avons démontré collectivement à maintes reprises notre solidarité lors du déluge au Saguenay, du grand verglas, des inondations, du déraillement de train de Lac-Mégantic, et j’en passe.

Nous devons aujourd’hui être plus forts que jamais et démontrer comme adultes un civisme exemplaire pour nos enfants. Nous serons invités à mettre à profit notre expertise, notre savoir et notre savoir-faire afin d’atténuer les conséquences de la COVID-19 sur le Québec.

Les prochains jours et les prochaines semaines seront probablement difficiles sur plusieurs plans. Un très grand défi de société que nous devons tous collectivement relever.

Personnellement, j’ai confiance en notre gouvernement, en nos organisations de sécurité publique ainsi qu’en tous les praticiens du milieu de la santé ainsi qu’en nos scientifiques.

Mais j’ai aussi et surtout confiance en vous, qui lirez ce texte, afin de contribuer à la résilience collective du Québec grâce à vos actions individuelles de civisme et de solidarité sociale.

Collectivement, nous sortirons plus forts de ce moment historique pour le Québec.

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