J'ai lu avec beaucoup d'intérêt l'enquête révélatrice de La Presse sur les erreurs médicales. Cette série d'articles et de statistiques très bien documentés met en lumière des cas d'erreurs, de négligence et d'incompétence.

La divulgation de ces histoires si injustes a touché chez moi une corde sensible, celle de la colère et de l'indignation, et a fait remonter à ma mémoire une période difficile.

Cet événement a laissé des traces dans mon inconscient puisque, aujourd'hui encore, je ne pénètre pas dans un milieu hospitalier sans ressentir une vive appréhension et le réflexe d'être sans cesse sur mes gardes.

J'étais alors enceinte de mon deuxième enfant. La grossesse se déroulait a priori normalement et je vaquais allègrement à mes nombreuses occupations familiales et professionnelles. Le vent a tourné, le verdict est tombé : à 26 semaines, on m'a annoncé un diagnostic de placenta praevia complet. C'est seulement 1 % des grossesses.

Mon obstétricien a recommandé de ralentir mon rythme de vie, mais a encouragé les activités physiques comme le jogging. Quelques recherches sur la question ont confirmé mon pressentiment. Afin d'éviter un accouchement prématuré et de graves complications pour le bébé, il faut rester allongé. Inutile de vous dire combien j'étais inquiète. Le placenta praevia complet n'est pas une affaire anodine. Je devais changer de spécialiste !

Une amie m'a recommandée à la Dre Alice Benjamin, sommité dans le domaine des grossesses à risque. Sa simple présence et sa force tranquille ont réussi à m'apaiser. Elle a exigé sur-le-champ un repos total et un alitement à la maison 24 heures sur 24. Pour une « germaine » hyperactive comme moi, déjà maman d'une Biquette de 2 ans, c'était tout un défi ! Mais l'enjeu ne tolérait aucune dérogation !

Mon état inquiétait la Dre Benjamin. Elle a décidé (envers et contre plusieurs de ses confrères) de me garder à l'hôpital plusieurs semaines avant l'accouchement. Il fallait gagner du temps à tout prix.

Un après-midi de fin d'hiver alors que j'étais endormie dans mon lit, un infirmier est entré dans la chambre et m'a dit, d'un ton assuré et presque directif : « I'm here to induce you » ! Malgré mon état de somnolence, j'ai réalisé l'erreur catastrophique qui allait se produire et ma réaction a été violente !

Chaque jour était une victoire précieuse contre le temps afin que mon bébé naisse, si possible, à terme et en santé. En quelques secondes, cet infirmier incompétent allait tout faire basculer en me « provoquant » ! J'imagine qu'il doit encore se souvenir de mes cris de furie...

S'était-il trompé de dossier, de chambre, de patiente, de médecin ? Un fait est sûr, il avait été hautement négligent !

Mon histoire s'est heureusement bien terminée et n'a rien à voir avec celles douloureuses et irréversibles évoquées dans La Presse. Je remercie encore la Dre Benjamin pour sa compétence, sa clairvoyance, son autorité, ainsi que ma famille qui m'a soutenue heure après heure dans cette course contre la montre.

Mon fils de 12 ans est en santé et ces longs mois angoissants et cauchemardesques sont bien loin. Pourtant, des années plus tard, il m'arrive encore souvent de regarder fiston et de me dire : « Et si je n'avais pas suffisamment été alerte ? » J'aurais moi aussi été victime d'une erreur médicale...

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