C’est le temps des Fêtes, l’odeur enivrante de la tourtière et de la dinde grillée envahit nos maisons. La consommation de viande fait partie de notre folklore, tant en Amérique du Nord que de l’autre côté de l’Atlantique.

Le Québec est le plus gros producteur de porc au Canada. L’industrie emploie 26 500 personnes et 70 % de notre production est destinée à l’exportation. La problématique environnementale du phosphore qui entoure cette industrie nous est bien familière. Le gouvernement a implanté un contrôle des bilans de phosphore à la ferme pour lutter contre ce fléau.

Aux Pays-Bas, on élève quatre fois plus de porcs qu’au Québec, ou autant qu’au Canada, dans un pays 240 fois plus petit que le nôtre. La densité de leurs élevages d’animaux est quatre fois plus grande qu’ailleurs en Europe et serait la plus importante au monde. Là-bas, c’est la crise de l’azote qui fait les manchettes. Pour élever les porcs, les vaches laitières et la volaille, on importe d’Amérique du Sud d’importants tonnages de soya qui contiennent de l’azote. Les déjections animales, riches en ammoniaque, causent du smog, entraînent des pluies acides et menacent la biodiversité. 

L’unique solution pour endiguer cette crise serait de réduire de moitié les troupeaux d’élevage. Les permis d’émission d’azote mis en place ne donnaient aucun résultat tangible. Le leadership gouvernemental pour rectifier la situation n’était pas au rendez-vous. En 2016, des ONG environnementales poursuivent donc le gouvernement et obtiennent gain de cause en Cour de justice de l’Union européenne. Forcé d’agir, le gouvernement fait face au soulèvement des fermiers en colère. Après tout, les Pays-Bas nourrissent littéralement le monde et leurs pratiques sont parmi les plus efficaces sur la planète.

Insectes comestibles

C’est en allant visiter de nouveaux types de fermes qui gagnent en popularité au pays que j’ai été témoin de barrages de tracteurs ornés de slogans exprimant la rogne des éleveurs. C’était la quatrième fois depuis octobre qu’ils paralysaient les autoroutes du pays. Les producteurs les plus innovants, de plus en plus nombreux au pays, délaissent le bétail et se tournent vers des élevages d’insectes comestibles. 

La production d’insectes s’inscrit dans un objectif d’économie circulaire puisqu’ils peuvent se nourrir de nos résidus agroalimentaires et qu’ils peuvent remplacer les rations de soya importées dans les élevages locaux.

Un kilo de protéines de grillons nécessite 85 % moins de nourriture, 90 % moins d’espace et 95 % moins d’eau qu’un kilo de bœuf. Un kilo de ténébrions, aussi appelés vers à farine, génère 4,5 fois moins de gaz à effet de serre qu’un kilo de viande de porc. La production d’insectes est en pleine expansion tant aux Pays-Bas qu’au Québec où l’on dénombre près de 60 producteurs de microbétail.

En guise de cadeau des Fêtes pour ceux qui s’inquiètent de la crise climatique, la Cour de justice de l’Union européenne a rendu un jugement historique forçant le gouvernement néerlandais – encore traîné en justice par des ONG environnementales – à obtenir des résultats concrets de réduction des gaz à effet de serre. Les parallèles entre ce récent jugement et le précédent découlant de la crise de l’azote sont nombreux. 

La réduction drastique de notre consommation de viande conventionnelle est un gain majeur pour le climat. Conséquemment, pour le réveillon cette année, j’accompagnerai ma tourtière bien traditionnelle de délicieux dumplings aux ténébrions, pour célébrer nos traditions culinaires et la transition vers une agriculture plus respectueuse de l’environnement et du climat.

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