Le Bureau du tourisme et des congrès de Dallas a lancé une campagne promotionnelle qui, à ce moment-ci, est d'un goût vraiment douteux. Le slogan? «Big things happen in Dallas». C'est-à-dire: «De grandes choses se produisent à Dallas». Vrai. C'est là que John Fitzgerald Kennedy a été assassiné il y aura 50 ans le 22 novembre prochain...

Ce fut big, en effet.

Aussi, l'événement sera-t-il abondamment commémoré. Colloques et expositions. Conférences, notamment d'Oliver Stone, dont le divertissant JFK reprendra l'affiche. Livres et albums. «missions télé et films.

Le plus intéressant sera peut-être The Kennedy Detail, de Stephen Gyllenhaal, prévu en novembre. Le film s'appuie sur le récit de Gerald Blaine, un des agents des services secrets qui était en fonction ce jour-là. Il faut en effet avoir lu The Kennedy Detail, le livre, pour comprendre à quel point la sécurité du président était alors rudimentaire. Comprendre comment l'impensable a pu se produire. Comprendre pourquoi certains agents chargés de protéger Kennedy ne s'en sont jamais remis. En attendant, un premier film sur l'affaire, Parkland, est déjà à l'affiche.

Il est signé Peter Landesman, un journaliste dont c'est le premier long métrage, et s'intéresse à ce qui s'est passé après l'assassinat. À l'hôpital Parkland. Au sein de la famille de Lee Harvey Oswald. Chez les agents des services secrets et les autorités de Dallas. Dans la vie d'Abraham Zapruder, celui qui a immortalisé sur Kodachrome 8mm les 26 secondes de l'assassinat. Les critiques sont mitigées, mais peu importe: c'est un film historiquement nécessaire, instructif, efficace. Et très dur.

Cependant, le plus remarquable est que Parkland ignore les théories du complot. Landesman n'y croit pas. On a débusqué une telle quantité de conspirateurs, ironise-t-il (au Star-Telegram, Texas), qu'«ils devaient se réunir au Madison Square Garden!» La tragédie engendra la mère de toutes les conspirations, en effet, un phénomène d'hallucination collective plus tard turbopropulsé par le web et les médias sociaux. Aujourd'hui encore, 59% des Américains croient que le meurtre de Kennedy relève d'un complot.

Et 41%, que Jésus va redescendre sur Terre d'ici 2050.

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Le cerveau humain n'est pas programmé pour admettre qu'un homme, un seul, insignifiant de surcroît, ait pu changer le cours de l'Histoire en tuant un autre homme qui, lui, incarnait les espoirs de la nation et même de la planète entière.

Eût-il vécu, John Fitzgerald Kennedy aurait-il été à la hauteur de ces attentes? Probablement pas. Le pouvoir et l'opposition l'auraient usé, freiné, menotté.

On ne peut s'empêcher d'établir un parallèle avec Barack Obama, un charismatique porteur d'espérance lui aussi, usé, freiné, menotté par le pouvoir et l'opposition. C'est ainsi qu'agit le principe de réalité, ce grand destructeur d'espoirs et d'hallucinations.