Il y aura trois ans, demain, Barack Obama entrait à la Maison-Blanche après un parcours politique presque miraculeux. Ainsi qu'une campagne électorale qui lui donna une stature messianique, le faisant accéder à 47 ans à la plus haute fonction du pays le plus puissant de la planète.

Or, rapidement, on s'est mis à faire des bilans, la plupart du temps négatifs, faisant principalement le compte... des miracles non accomplis.

À 10 mois de la prochaine élection présidentielle, il existe un autre angle sous lequel voir l'affaire. Et c'est celui qu'adopte Jodi Kantor, reporter au New York Times, dans The Obamas (non traduit en français). Ce qu'elle décrit, c'est la façon dont, à bien des égards et pas seulement parce qu'il s'agissait des premiers Afro-Américains à y entrer, les Obama instaurèrent à la Maison-Blanche une chimie familiale particulière.

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À la sortie du bouquin, il y a quelques jours, on a surtout retenu le récit des désaccords existant entre l'Aile Ouest (le personnel politique du président) et Michelle Obama (logée dans l'Aile Est). L'expression qui demeure est celle, peu flatteuse, d'«angry black woman» pour désigner la première dame!

Il est exact qu'elle est un cas. Elle rappelle un peu une première dame du passé, Eleanor Roosevelt, la turbulente épouse du grand FDR.

Michelle Obama est entrée à la Maison-Blanche à reculons. Et elle se montra longtemps déçue de ne pas s'y trouver un rôle. Déçue de ce qu'elle estimait être la faiblesse de l'entourage du président. Déçue de voir son mari ligoté par la petite politique politicienne - la version républicaine de celle-ci étant en effet d'une formidable médiocrité. Pourtant, c'est elle, Michelle, qui apparaît aujourd'hui aux yeux de Jodi Kantor la plus forte des Obama.

L'exercice du pouvoir a en effet affaibli le président, encore moins tenté que Michelle par les basses oeuvres politiques, mais parfois obligé d'y sacrifier. Et privé au jour le jour de l'inspiration des grandes idées qu'il peut manier de brillante façon, on le sait, mais ne sont pas bienvenues en mode gouvernance.

Autre observation: «Le président est élitiste, mais d'une manière inhabituelle», écrit Kantor. «Il manifeste souvent un profond dédain pour des classes entières de puissants - membres du Congrès, banquiers - et est naturellement attiré par les moins privilégiés, ceux qui lui semblent vulnérables, ignorés, abandonnés». Or, une pareille attitude n'est-elle pas aussi essentielle en politique que la collaboration avec les divers autres pouvoirs?

On sent beaucoup d'admiration sous la plume de Jodi Kantor. Et on acquiert la conviction que cette admiration n'est pas gratuite même si, dans les deux ailes de la Maison-Blanche, les trois années écoulées ont anéanti bien des illusions.