Pour courtiser l'électorat, il est désormais obligatoire pour un candidat, peu importe son credo idéologique ou ses attaches partisanes, de promettre du «changement» ainsi qu'une «façon différente de faire de la politique». Ces propositions sont-elles crédibles? Ou seraient-elles plutôt devenues les clichés les plus vides à avoir envahi le champ du discours politique depuis la Grèce antique?

Pour courtiser l'électorat, il est désormais obligatoire pour un candidat, peu importe son credo idéologique ou ses attaches partisanes, de promettre du «changement» ainsi qu'une «façon différente de faire de la politique». Ces propositions sont-elles crédibles? Ou seraient-elles plutôt devenues les clichés les plus vides à avoir envahi le champ du discours politique depuis la Grèce antique?

C'est probablement le cas.

Le mot «changement» ne possède en lui-même aucun contenu. Et il ne peut y avoir de façon de faire de la politique substantiellement différente de celle dont elle s'est toujours faite.

* * *

Parlons ainsi des lectures sur le «thème du changement» auxquelles le député péquiste Bernard Drainville dit s'adonner cet été; elles seront certainement utiles à Pauline Marois, qui a promis: «Les Québécois veulent du changement et on va leur en donner». Souvenons-nous du «vent de changement» récemment soufflé par Jack Layton au visage de Stephen Harper, lui-même porté au pouvoir en 2006 par un «grand pays (qui) vient de voter pour le changement».

Ailleurs, c'est pareil.

En France, le «changement est proche», selon la socialiste Martine Aubry, surtout que Nicolas Sarkozy entend lui aussi «porter le changement». Et aux États-Unis, le «changement auquel on peut croire» a permis à Barack Obama de vaincre John McCain, lui-même un «agent de changement» autoproclamé!

Changer, donc. Mais pour aller vers quoi, on ne le dit jamais. Et, sur ce point, les politiciens ont raison.

Ils savent que, même s'il hurle le contraire en déchirant sa chemise, le citoyen moyen n'est pas du tout friand de changement et ne l'acceptera qu'à la condition qu'il lui convienne. Par exemple, ça change beaucoup ces temps-ci dans la Grèce moderne, mais peu de Grecs rigolent derrière les barricades qu'ils dressent dans les rues...

En somme, une «façon différente de faire de la politique» serait de bannir le mot «changement»!

Mais ça n'arrivera pas.

La politique vient avec un manuel d'instruction qui a peu évolué et impose de strictes façons de faire, souvent en PPP - la Petite Politique Politicienne. La partisanerie parfois bébête. La nécessité de dire ce que les gens veulent entendre et de taire ce qui les hérisserait. Celle de s'incliner devant les modes et les rectitudes les plus absurdes. Celle - médias obligent - d'en dire le moins possible, en soundbites de 15 secondes si possible. Pour un politicien, déchirer ce manuel équivaudrait à se suicider.

C'est pourquoi, ô ironie, parler de «changement» est devenu une façon comme une autre de se conformer aux règles immuables de la politique.