La saga de la flottille pour Gaza est en danger. On ne voit pas comment, en effet, malgré les efforts considérables qu'ils déploient, les grands médias seraient capables d'entretenir encore longtemps l'intérêt pour le petit jeu du gendarme et du voleur auxquels les navigateurs se livrent dans les îles grecques avec la garde côtière...

La saga de la flottille pour Gaza est en danger. On ne voit pas comment, en effet, malgré les efforts considérables qu'ils déploient, les grands médias seraient capables d'entretenir encore longtemps l'intérêt pour le petit jeu du gendarme et du voleur auxquels les navigateurs se livrent dans les îles grecques avec la garde côtière...

Car le scénario n'est plus du tout celui initialement conçu.

Il était prévu qu'on voguerait vers un affrontement avec la redoutable armée israélienne. Pas avec la bureaucratie flottante d'un État au bord de la faillite! Les humanitaires ne peuvent pas ignorer que leur période grecque va les conduire à la ruine. Que, lorsqu'il s'enlise, le type de stunt politique qu'ils ont monté peut épuiser plusieurs ressources non renouvelables (visibilité, audience, sympathie) dont on ne peut abuser impunément.

Illustration.

Saviez-vous qu'en ce moment même, une autre expédition humanitaire canadienne est en cours? Celle-ci tente de faire parvenir des secours aux Cubains victimes du «blocus»* américain. Vous ne saviez pas? Normal: personne n'en parle.

Les pro-castristes des sociétés ouvertes et libres, qui étaient à l'époque les chouchous de l'élite de ces mêmes sociétés, n'intéressent plus personne. Cette fois encore, au lieu d'envoyer directement leur marchandise à La Havane, ces belles âmes ont pourtant pris la précaution de la faire transiter par les États-Unis, seule et unique façon d'avoir des problèmes!

Mais rien à faire. Zéro réaction. Zéro intérêt. Dure leçon à encaisser.

* * *

Maintenant, ce serait bien que toutes ces énergies ne soient pas perdues.

Ainsi, les Soudanais auraient bien besoin que deux ou trois militants humanitaires médiatiques de gauche, conscientisés et progressistes, s'intéressent enfin à eux; leur pays est en effet exsangue, à feu et à sang depuis des décennies, gouverné par un homme accusé par l'ONU de crimes contre l'humanité. Les Zimbabwéens aussi accepteraient volontiers de l'aide, eux qui meurent dans un pays méthodiquement ruiné, détruit et affamé par son chef d'État. Par contre, les Coréens du Nord ne peuvent rien espérer: toute embarcation approchant leurs côtes serait certainement envoyée par le fond sans avertissement...

Bien sûr, aucun de ceux-là n'est «opprimé» par Israël ou par les États-Unis. À la longue, on finit d'ailleurs par se demander si, aux yeux de l'opinion dite éclairée, il ne s'agit pas de leur plus sérieux problème.

* Il ne s'agit pas d'un «blocus», mais d'un embargo, certes devenu ridicule, mais de plus en plus souple: les États-Unis comptent aujourd'hui parmi les cinq plus grands fournisseurs de Cuba, notamment de produits agricoles et médicaux, de devises et de visiteurs!