Apple a publié cette semaine les résultats du dernier trimestre de 2011, des chiffres spectaculaires qui ont dépassé de loin les prévisions des analystes.

Les ventes de l'entreprise ont bondi de 73% par rapport à celles du même trimestre en 2010 pour atteindre 46,3 milliards US. Cette performance s'explique essentiellement par le succès phénoménal de l'iPhone (37 millions d'appareils vendus) et de l'iPad (15,4 millions de tablettes vendues). Avec une capitalisation boursière de plus de 400 milliards, Apple vaut aujourd'hui presque autant qu'ExxonMobil, deux fois plus que Wal-Mart et cinq fois plus qu'Amazon.com.

Apple récolte les fruits du génie de Steve Jobs, décédé en octobre dernier. L'iPod, l'iPhone et enfin l'iPad ont tous trois révolutionné le marché. Chacun représentait une avancée technologique importante. Chacun a séduit le consommateur par son design, sa qualité de fabrication et son utilité (y compris pour répondre à des besoins que l'appareil lui-même créait!). Les concurrents ont été forcés de copier ces produits à la hâte, avec des résultats pas toujours heureux.

À bien des égards, Apple est donc une compagnie admirable. Mais elle a un côté sombre, bien décrit dans un grand reportage publié ces jours-ci par le New York Times. Fruits d'entrevues avec des dizaines d'employés actuels et passés d'Apple et de ses fournisseurs, ces articles montrent comment les exploits de l'entreprise reposent en grande partie sur l'incroyable productivité des usines installées en Asie, en particulier en Chine. Et cette productivité vient au prix de conditions de travail pénibles, voire dangereuses, pour des dizaines de milliers d'ouvriers.

L'an dernier, une explosion a fait 4 morts et 18 blessés dans une usine du plus important fournisseur d'Apple, Foxconn, à Chengdu. Une autre explosion a fait 59 blessés dans une usine de Shanghai. Dans les deux cas, la poussière d'aluminium dégagée par le polissage des boîtiers des iPad était à l'origine de l'accident. Au cours des dernières années, on a rapporté plusieurs tentatives de suicide parmi les employés de Foxconn. Chez un autre fournisseur, des dizaines d'employés ont été blessés par les vapeurs d'un produit chimique utilisé pour nettoyer les écrans d'iPhone.

Il y a sept ans, Apple a rédigé un code de conduite pour ses fournisseurs et amorcé une série de vérifications dans leurs usines. Chaque année depuis 2007, la compagnie publie un rapport complet des résultats de ses vérifications. Nul doute qu'Apple est sincère dans ses efforts pour améliorer le sort des travailleurs qui fabriquent ses produits. Mais ces efforts se heurtent aux autres exigences qu'elle impose à ses fournisseurs: coûts minimaux, rapidité et flexibilité maximaux. De dire un cadre d'Apple au New York Times: «Les consommateurs sont plus intéressés par les caractéristiques du nouveau iPhone que par les conditions de travail en Chine.»