On le pensait mort et enterré: voici que le déséquilibre fiscal revient à l'avant-scène. Selon Jean Charest et sa ministre des Finances, le premier ministre fédéral, Stephen Harper, a tort de prétendre que le problème est réglé. «Cette question n'est pas réglée et on va continuer à réclamer le financement, entre autres pour l'éducation postsecondaire», a dit le premier ministre du Québec cette semaine.

On comprend que M. Charest est désormais résolu à ne pas se faire doubler par le PQ ou l'ADQ sur le terrain de la «défense des intérêts du Québec». Mais de là à devenir plus péquiste que les péquistes Car soyons clairs, M. Harper a raison, le déséquilibre fiscal n'existe plus.

 

Rappelons quel était le problème identifié il y a quelques années par le gouvernement de Bernard Landry. Un: le gouvernement central enregistrait année après année des surplus de plusieurs milliards de dollars. Deux: de leur côté, les gouvernements provinciaux, malgré des taux d'imposition élevés, peinaient à financer des programmes aussi essentiels que la santé et l'éducation.

Quelle est la situation aujourd'hui? Un: l'époque des surplus faramineux à Ottawa est révolue. Certains commencent même à s'inquiéter du risque d'un déficit. Deux: le fédéral a accru de façon extrêmement importante ses transferts aux provinces. Dans le cas du Québec, depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux en 2003, ces transferts ont augmenté de près de 5 milliards. En fait, ces transferts représentent aujourd'hui 22% des revenus budgétaires du gouvernement québécois, la même part qu'en 1995, avant les compressions draconiennes imposées par Ottawa.

Trois: la plupart des gouvernements provinciaux ont réussi à diminuer le fardeau fiscal qu'ils imposent à leurs contribuables, ce qui indique à tout le moins que ces gouvernements jouissent d'une certaine marge de manoeuvre.

Les systèmes de santé et d'éducation ont besoin d'encore plus d'argent? Sans doute, mais cela ne signifie pas qu'il y a déséquilibre fiscal. «L'argent est à Ottawa, les besoins sont à Québec», disait M. Landry. Or, s'il existe encore des besoins à Québec - ça sera toujours le cas - l'argent, lui, n'est plus à Ottawa. Avec l'augmentation de ses transferts, la baisse de deux points de la TPS et la hausse de ses dépenses dans SES champs de compétence, le gouvernement fédéral a réduit ses surplus au minimum.

En ressuscitant le problème du déséquilibre fiscal, le premier ministre Charest redore sans doute son blason de défenseur du Québec. Toutefois, il relance inutilement une querelle fédérale-provinciale qui n'a plus sa raison d'être. De plus, il nuit à un parti fédéral dont la conception du fédéralisme correspond à celle de bien des Québécois, notamment à celle que défend M. Charest lui-même depuis des années. De toute évidence, dans ce cas-ci, le premier ministre a sacrifié les principes à ses intérêts partisans.

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