La récente sortie antisyndicale du chef adéquiste Gérard Deltell et, paradoxalement, l'élection de Louis Roy à la présidence de la CSN mercredi dernier offrent une occasion en or aux jeunes progressistes et syndicalistes d'être davantage écouté dans leurs organisations mais, également, un formidable prétexte pour mettre un peu de tension dans le lasso syndical.

La récente sortie antisyndicale du chef adéquiste Gérard Deltell et, paradoxalement, l'élection de Louis Roy à la présidence de la CSN mercredi dernier offrent une occasion en or aux jeunes progressistes et syndicalistes d'être davantage écouté dans leurs organisations mais, également, un formidable prétexte pour mettre un peu de tension dans le lasso syndical.

M. Deltell a le mérite de rappeler que nous vivons dans une opposition fondamentale d'intérêts. N'en déplaise à plusieurs, parmi nos rangs entre autres, celle-ci existe toujours et est à la base même de l'existence de nos organisations. Il nous appartient donc de continuer (recommencer?) à convaincre les travailleuses et les travailleurs qu'ils méritent une juste reconnaissance, et ce, sans en être mal à l'aise. Les générations émergentes peuvent, à ce titre, représenter un auditoire sur mesure puisqu'ils n'éprouvent souvent que peu de fidélité envers leurs employeurs, mais exigent de bonnes conditions dans l'exercice d'une activité qui leur permettra de se réaliser. Le «jeune» est un germe prometteur s'il est convenablement abordé.

Ironiquement, alors que certains voudraient voir le mouvement s'affaiblir, la jeunesse syndicale se trouve en mal de défis à relever, d'espace pour agir et tenter. Ils veulent du «temps de glace»! Demandons-leur d'expliquer ce dont ils discutent à mots couverts avec d'autres, craignant bien souvent d'être mal compris par les «grands». À la bravade adéquiste, «vous en faites trop», la jeunesse syndicale répond: faisons-en davantage!

Concernant la politique, les résultats parlent d'eux-mêmes. Nos interventions causent l'insomnie des forces de droite? Soit. Merci du tuyau. Il y aura toujours assez de place pour une revendication affilée aux intérêts et volontés de salariés de plus en plus éduqués et informés. Inquiétons-nous au passage que seul un tiers ose nous critiquer ouvertement à cet effet. Peut-être devrions-nous en faire plus encore auprès des vrais décideurs?

Dans le cas où nous aurions oublié sur quel terrain les employeurs préfèrent nous affronter, pour plus facilement nous combattre, M. Deltell nous enjoint à nous concentrer sur la négociation en entreprise et livre même un touchant plaidoyer de démocratie industrielle. Ici encore, merci Gérard. Parlons-en aux syndicats, tant CSN que FTQ qui s'aventurent dans ce qui nous a fait: la lutte pour l'association en secteurs défavorables. Ces épopées nous rappellent combien il est difficile, mais essentiel, de suivre la main-d'oeuvre là où elle va et non le contraire. Profitons, ici encore, de l'occasion pour jouer le premier coup, tout en imposant notre stratégie et non l'inverse.

La relève ne craint pas l'action. Les difficultés actuelles ne sont certainement pas plus insurmontables qu'à l'époque où une carte d'adhésion s'échangeait facilement contre un séjour à l'hôpital ou en prison. Pourquoi, donc, ne pas en profiter, par exemple, pour se lancer le défi de rééquilibrer la représentation des salariés du secteur privé dans le taux de syndicalisation québécois? Il s'agirait là, certes, d'un beau projet et l'occasion d'une saine compétition intersyndicale, vouée à un objectif commun.

Le fameux corporatisme, entendu comme celui qui prône le «main dans la main» avec les employeurs comme si nos intérêts étaient identiques, n'a rien donné de tangible, pas plus qu'un engouement chez des jeunes. Nous voulons nous battre, peut-être seulement de manière originale et moderne. Concernant l'autre forme de corporatisme, celle où l'organisation met à profit ses argents, son pouvoir et son influence au service de ses «actionnaires», notons que personne à droite ne peut nous faire la leçon à ce sujet mais, heureusement encore, l'agacement qu'il cause au patronat devrait nous encourager à enfoncer plus loin le dard.

Au final, avouons que le contexte actuel est porteur de défis qui demandent ténacité et optimisme. C'est précisément l'approche préconisée par une majorité de jeunes syndicalistes. Ceux-ci répondent à MM. Deltell et Roy: «Défi relevé!» Et vous, que répondrez-vous?