Ce qui ajoute à l'horreur, c'est qu'on est déjà programmé. On s'attend au pire. On ne sait pas quand, ni où, on ne veut pas vraiment le savoir, mais on sait que ça arrivera.

On entre déjà en mode statistique. On compare les chiffres des tués et des blessés...

« Ça » quoi, au fait ? On n'avait pas encore identifié les corps qu'il fallait choisir son camp : une autre manifestation du terrorisme islamiste ou une autre tuerie de masse américaine ?

C'est les deux, évidemment. La force du groupe État islamique est qu'il s'adapte aux terrains, dans sa guerre. Il peut former des combattants hyper-organisés ou inspirer des individus qui agissent seuls en son nom. Des commandos d'Européens venus dans ses camps qui retournent faire des assassinats coordonnés de type militaire, comme à Paris, à Tunis ou à Bruxelles. Ou un couple comme celui de San Bernardino, qui s'en va descendre 14 collègues dans un party de Noël en Californie, et qui le fait au nom du groupe État islamique. Ou un type (apparemment) seul comme dimanche.

L'ex-femme d'Omar Mateen a dit au Washington Post qu'il était violent, pas vraiment religieux et surtout instable psychologiquement. C'est possible. Ça n'en fait pas moins un candidat excellent. Qu'il tue dans une attaque coordonnée avec un commando ou qu'il tue tout seul, ça change beaucoup de choses dans l'enquête. Ça ne change rien au résultat. Il n'en a pas moins tué 50 personnes au nom du même commanditaire.

On n'en sait pas assez long sur l'état mental de Mateen. Mais quoi qu'il en soit, on ne peut pas mettre sur le compte des seuls troubles mentaux un massacre aussi ciblé.

Un discours homophobe violent est bien incrusté dans certaines branches de l'islam.

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En même temps, s'il y a un pays au monde où un type « radicalisé », dérangé ou pas, agissant seul ou pas, peut s'armer facilement et tuer le plus de gens possible, c'est bien aux États-Unis. Depuis un an, dans sept « tueries de masse » (quatre morts ou plus), une arme de combat de type quasi militaire a été utilisée. Comme dimanche.

Ces armes, en vente libre, ont d'énormes chargeurs qui permettent de tuer plein de gens très rapidement.

Mieux encore. Le 3 décembre dernier, le lendemain de la tuerie de San Bernardino, le Sénat à majorité républicaine a voté contre un projet de loi qui interdisait la vente d'armes de combat à des gens placés sur la liste des suspects de terrorisme du FBI. Un projet de loi soutenu par l'administration Obama... mais qui est aussi une version d'un projet de loi présenté par l'administration de George W. Bush en 2007. D'après le Washington Post, entre 2004 et 2014, des individus identifiés comme des suspects de terrorisme par la police fédérale américaine ont acquis plus de 2000 armes. Les autorités reçoivent un avis en principe... mais l'arme est vendue.

Alors, que ce soit un acte de terrorisme djihadiste « pur » ne change rien à ce fait : il a été rendu beaucoup plus facile, en tout cas beaucoup plus meurtrier, par l'accès facile à des armes de guerre.

Les républicains d'aujourd'hui ne veulent même pas légiférer sur la grosseur des chargeurs.

Les mêmes, bien entendu, qui diront qu'il faut une réponse robuste et ferme face à la menace terroriste...

Ah, bien sûr, on peut se procurer des armes de toutes sortes de manières illégales. Il y a un marché noir. Faut-il absolument rendre ça si facile ?

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Ce qui ajoute à l'horreur, c'est que nos corps et nos âmes sont déjà un peu préparés. Chaque nouvel acte terroriste, chaque nouveau massacre produit sa dose de poison social. Nous désensibilise tranquillement.

Ce qui ajoute à l'horreur... c'est qu'on dit « horreur », vu qu'il faut appeler les choses par leur nom, et que c'en est une. Mais déjà le mot s'use. Il se décharge, mine de rien.

Tout ça durera longtemps encore, on le sait bien...

photo tirée d'internet

L’ex-femme d’Omar Mateen a dit au Washington Post qu’il était violent, pas vraiment religieux et surtout instable psychologiquement.