Finalement, si je comprends bien, les gens du hockey junior viennent d'écrire un règlement pour empêcher des délires de violence qui ne se produisent à peu près jamais - du genre Jonathan Roy.

Mais pour la violence ordinaire, rien n'a changé.C'est ça, la tolérance zéro? Appelons plutôt ça la tolérance 0,9, qui est le nombre moyen de bagarres dans les matchs de la LHJMQ la saison dernière.

Car une bagarre n'entraînera cette année, comme l'an dernier, qu'une punition de cinq minutes. Ce n'est qu'à la deuxième bagarre du match que le joueur sera expulsé.

Quelle belle occasion ratée. Quel manque de vision. Quel dommage de voir la ministre de l'Éducation, mais aussi des Sports, cautionner la permission de se battre dans une ligue où l'on peut entrer à 16 ans.

Le problème vient peut-être du fait que le monde en général ne parle pas le même langage que le monde du hockey.

Prenons un exemple. Hier, Gilles Courteau déclare: «Nous n'allons rien accepter qui dépasse le cadre normal d'un match de hockey. Nous voulons changer la culture du hockey. Des situations de débordement, nous n'en voulons plus.»

Voilà, en trois phrases, résumé tout le malentendu. Pour les gens de cette ligue commerciale, les bagarres entre deux joueurs consentants dans l'exercice passionné de leur sport ne dépassent pas «le cadre normal d'un match de hockey». Ça fait partie de la game, comme ils disent. Ça fait partie du show, en tout cas.

Bien entendu, on peut s'attendre à ce qu'il y en ait toujours, quel que soit le règlement, dans ce sport de contact. Mais ne pas les punir par l'expulsion pure et simple, c'est l'accepter. Les Européens, qui forment le noyau dur de l'élite mondiale, les collèges américains, qui forment une part grandissante de l'élite, ne l'acceptent pas. Il y a aussi des bagarres. Mais elles sont punies d'expulsion.

Ici? On baisse les bras. On dit: que voulez-vous, c'est la vie, y a rien qu'on peut faire.

Et on fait un règlement sur mesure pour des cas rarissimes comme celui de Jonathan Roy. Expulsion automatique de 15 matchs? Parfait. Je n'ironise pas: les nouvelles sanctions sont correctes. C'est celles qu'on oublie qui posent problème.

Question, en passant: puisque le préfet de discipline avait le pouvoir d'imposer une punition de ce genre l'an dernier dans l'affaire Roy, puisqu'il pouvait sévir contre le premier responsable, l'entraîneur Patrick Roy, pourquoi n'a-t-il pas été plus sévère? Comment l'avoir laissé revenir derrière le banc si vite?

Ils ne l'ont pas fait à cause de ce que M. Courteau appelle la «culture du hockey». Mais réjouissons-nous, il veut la changer. Tranquillement, pas vite.

Séparer la violence «qui ne dépasse pas le cadre d'un match» et la violence excessive, c'est accepter qu'il y ait une bonne violence et une mauvaise. En réalité, la bagarre librement consentie (l'est-elle vraiment, au fait?) n'est séparée de l'agression que par quelques degrés. Dans les deux cas, on n'est plus dans le sport. On n'est certainement pas dans les «valeurs» que devrait cautionner le ministère de l'Éducation non plus - on n'est pas encore dans la LNH, les boys!

Au total, donc, il n'y a pas de changement de philosophie. Seulement un tour de vis dans les règlements. Un tour de vis bienvenu, certes. S'il est appliqué sérieusement par la ligue, il aura sans doute pour effet d'améliorer les statistiques de violence. C'est déjà ça.

Mais ne venez pas nous parler de virage, ni de tolérance zéro, il n'y en a pas à l'horizon.

Il est vrai que cette ligue a grandement évolué depuis 25 ans. Il est vrai qu'une «culture», ça ne se change pas du jour au lendemain.

Mais, tout aussi vrai, quand les leaders ne veulent pas vraiment changer, quand ils sont résignés au statu quo amélioré, on n'avance pas vite.

L'école

Plus important que cette histoire de violence à mon point de vue: l'école. Hier, en entrevue à CKAC, Gilles Courteau a déclaré que les journalistes triturent les statistiques scolaires des joueurs de la LHJMQ. Comme j'ai écrit là-dessus la semaine dernière, je crois que j'étais directement visé.

Les statistiques que j'ai données vendredi venaient entièrement de la LHJMQ. Elles viennent d'un communiqué du mois de mai, que la ligue m'a retransmis la semaine dernière, et qui dit ceci: pour l'automne 2007, 147 joueurs fréquentaient le cégep; ils ont suivi 374 cours, soit très exactement 2,54 cours par joueur en moyenne. Ils en ont réussi 313, soit 2,13 par joueur.

Hier, M. Courteau nous dit qu'ils ont suivi 3,15 cours en moyenne. Je ne conteste pas ce nouveau chiffre. Mais il est nouveau. Je n'aime pas me faire accuser d'avoir fabriqué des statistiques. La ligue devrait donc faire une rétractation avant d'accuser les journalistes.

Le reste relève de l'opinion. Si la ligue et les parents et le ministère se satisfont d'une moyenne de cours suivis de 3,15 cours de cégep (le temps plein étant de huit), grand bien leur fasse. Si on trouve ça intelligent, 68 matchs réguliers, plus des hors-concours, plus les séries, de Rouyn à Halifax, je n'y peux rien.

Au football collégial québécois, par comparaison, on doit obligatoirement réussir (pas seulement suivre) neuf cours sur deux sessions.

En ce qui me concerne, mais ce n'est qu'une opinion, ce sport extraordinaire qu'est le hockey devrait être intégré à l'école.

On pourrait changer les choses. Mais on dirait que ceux qui pourraient faire la différence n'y voient aucun intérêt.

Hey, bonne saison et bon voyage, les enfants.