Confession post-campagne: j'ai grandement sous-estimé, surtout après le deuxième débat des chefs, la capacité de François Legault de remonter la pente, lui dont le parti stagnait sous la barre des 15% en début de campagne.

Après avoir vu son début de campagne, après l'avoir suivi quelques jours sur les routes du 450, après avoir assisté à ses visites de circonscriptions et à ses points de presse, j'ai conclu, trop hâtivement, qu'il était coincé pour de bon derrière le mur d'indifférence.

La CAQ a remonté, évitant la catastrophe, c'est vrai, et c'est largement dû à la persévérance de son chef, mais dans plusieurs circonscriptions, le parti de François Legault a, dans les faits, gagné ou gardé des sièges avec moins d'appuis qu'en 2012. En pourcentage, comme en nombre de votes, les chiffres de la CAQ sont moins élevés qu'en 2012 (1 180 235 votes et 27,05% en 2012; 975 607 votes et 23,05% en 2014 soit 204 628 votes en moins).

L'analyse plus pointue des résultats dans certaines circonscriptions démontre que c'est la poussée du Parti libéral, dans des coins traditionnellement hostiles, qui a provoqué des luttes à trois profitables à la CAQ.

Aussi étrange que cela puisse paraître, il est donc tout à fait plausible que des électeurs aient tourné le dos au PQ pour aller... au PLQ. Ce serait déjà une mauvaise nouvelle pour le PQ qu'une partie de ses partisans restent à la maison (possible, puisque le taux de participation est plus faible de 6% en moyenne dans les circonscriptions en question) ou alors, décident de voter CAQ, mais le passage au PLQ est une double gifle.

En gros, dans Groulx, Chambly, Borduas, Montarville, Masson, La Prairie et Laval-des-Rapides: baisse du taux de participation, hausse du PLQ de 6 à 12%, baisse du PQ de 4 à 9%, légère baisse ou même résultat qu'en 2012 de la CAQ (sauf dans Masson, + 2%).

Plus précisément, Groulx, où Martine Desjardins a perdu, terminant troisième, est un exemple marquant: La CAQ l'a emporté lundi en récoltant pourtant 4000 votes de moins qu'en 2012; le PQ a perdu 2500 votes et les libéraux ont fait un bond spectaculaire de près de 4000 votes. Le taux de participation a chuté de près de 6%. On ne peut savoir avec certitude pour qui les abstentionnistes ont voté en 2012, mais il est clair que le PLQ a fait des gains. Dans la plupart des cas analysés, le PLQ est d'ailleurs le seul parti a faire des gains (près de 400 000 votes de plus au total).

Ces résultats sont évidemment inquiétants pour le PQ et réjouissants pour le PLQ, mais ils ont de quoi encourager la CAQ. Si François Legault réussit à mettre sur pied une base et à remobiliser les électeurs attirés par une troisième voie (en 2007 avec l'ADQ et en 2012 avec la CAQ), il peut espérer des jours meilleurs. Il est hasardeux de s'en remettre à des luttes à trois favorables pour croître.

Quant au vote souverainiste, il est, sans surprise, en baisse (cumul PQ, Québec solidaire et Option nationale: 39,87% en 2012, 33,74% en 2014). On y revient encore une fois: l'option a du plomb dans l'aile. Et ce, devant un chef libéral très fédéraliste et devant un gouvernement fédéral de plus en plus distant du Québec.

En 1994, Jacques Parizeau avait remporté une majorité en promettant un référendum dans un «horizon de 12 mois». Cette fois, 20 ans plus tard, Pauline Marois n'a même pas été capable de préserver son gouvernement minoritaire en promettant de ne pas en tenir.

Précision

J'ai écrit dans ma chronique de mercredi que les anciens ministres Yves Bolduc et Marguerite Blais ont été interrogés par l'UPAC. En fait, l'UPAC a pris contact avec eux et un rendez-vous était prévu, mais l'UPAC a reporté les rencontres en raison du déclenchement des élections.

Pour joindre notre chroniqueur: vincent.marissal@lapresse.ca