La soirée aura été dure pour les coeurs sensibles, mais Pauline Marois a finalement gagné son pari hier dans Kamouraska-Témiscouata, elle qui avait fait du mécontentement des électeurs envers le gouvernement Charest le moteur d'une victoire dans une circonscription qui boude le Parti québécois depuis un quart de siècle.

Pour le Parti libéral, le résultat est aussi dur à avaler que la leçon de la soirée: vous avez beau avoir la meilleure machine électorale, de l'argent, un bon pointage, des appuis et une candidate connue et respectée, si vos sympathisants décident de rester à la maison, vous ne pourrez pas les faire sortir de force.

Évincé de K.-T. depuis plus de 25 ans, le PQ a réussi hier soir à «sortir» plus de votes, dans cette élection partielle, qu'il ne l'a fait en 2008 et en 2007 lors des générales. En 2007, le PQ d'André Boisclair avait obtenu 4804 voix et avait terminé troisième. Quelques mois plus tard, en 2008, le PQ dirigé par Pauline Marois n'avait pu faire mieux que 4351 voix, toujours troisième. Hier soir, le PQ a largement fracassé la barre des 7000 votes.

Les libéraux, eux, passent de 11 000 votes en 2008 à 7000 cette fois. Bien sûr, on dira que c'est une partielle, mais le taux de participation de 58% (largement supérieur à la moyenne des partielles) n'est que trois points en deçà de celui des générales de 2008. Calculez cela comme vous voudrez, la conclusion, c'est que bien des libéraux ont décidé de passer un tour ou de voter pour un autre parti.

Parlant d'un autre parti, l'ADQ, avec près de 25%, fait moins bien qu'en 2007 (deuxième avec 37%), mais mieux qu'en 2008 (21%). Pour Gérard Deltell, voilà un résultat inespéré et une bouffée d'air frais.

Jean Charest peut évidemment expliquer cette défaite par la grogne des électeurs contre son gouvernement à mi-mandat, mais il ne peut nier, maintenant, que cette grogne est bien réelle.

Durant toute la campagne, les libéraux ont répété qu'il ne s'agissait pas d'un vote national, mais bien du choix d'un député local, préoccupé par les enjeux locaux.

France Dionne et son équipe ont joué la carte du souvenir de Claude Béchard à fond, en répétant qu'il fallait continuer le «bon travail de Claude».

Cela n'aura pas été suffisant. Pas plus que les nombreuses visites de ministres, que le renfort organisationnel venu de Québec, que les annonces récentes chez Bombardier, que la notoriété de la candidate France Dionne et d'un appui du député fédéral de Montagny-L'Islet-Kamouraska-Rivière-du-Loup, le conservateur Bernard Généreux, ancien maire de La Pocatière.

Les péquistes, de leur côté, ont tout fait pour minimiser la portée d'une possible défaite dans cette circonscription, niant que cela aurait été un dur coup pour le leadership de Pauline Marois à quelques mois d'un vote de confiance de son parti.

À voir la chef du PQ triompher hier soir, on comprenait qu'elle n'avait pas seulement gagné une circonscription.

Une percée de Harper en Ontario?

Autre province, autre percée importante, des conservateurs cette fois, aux portes de Toronto, dans la très libérale circonscription de Vaughan.

Autant l'enjeu était élevé pour Pauline Marois dans Kamouraska-Témiscouata, autant il l'était pour le chef libéral Michael Ignatieff dans Vaughan.

Au moment de mettre sous presse, les conservateurs et leur candidat-vedette étaient sur le point de remporter la mise dans cette forteresse libérale.

Autant Mme Marois se lèvera le coeur léger ce matin, autant Michael Ignatieff aura l'impression d'avoir reçu une tonne de briques sur la tête.