L'eau s'infiltre dans votre cheminée flambant neuve. Les marches de votre nouvel escalier ne sont pas de la même couleur que votre plancher. Ah ! les plaisirs de la rénovation !

Lorsque leur chantier tourne au cauchemar, les consommateurs sont souvent mal outillés pour affronter les entrepreneurs aguerris, constate l'Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC).

Pour les aider en amont, l'ACQC lance donc un programme de formation de trois heures intitulé Rénover sans se faire flouer. Le premier atelier aura lieu samedi prochain, le 25 novembre, à Laval. Il sera offert par Claude Coursol, un avocat qui concentre sa pratique en droit immobilier et de la construction.

J'en ai profité pour faire le tour avec lui des pépins les plus fréquents de la réno.

LES SATANÉS EXTRAS

La majorité des problèmes vécus par les propriétaires qui rénovent leur maison découlent de travaux supplémentaires qui n'étaient pas prévus dans la soumission initiale. « Le diable est dans les extras ! », lance Me Coursol.

Il conseille d'ailleurs de se méfier des soumissions les plus basses. L'entrepreneur qui propose un prix très faible pour décrocher le contrat risque de se rattraper avec les extras qui feront exploser le budget des clients.

Les petits tours de passe-passe sont nombreux. Disons que votre contrat prévoit un budget de 5 $ le pied carré pour le revêtement de sol. Vous pensez que ce budget est largement suffisant... jusqu'à ce que l'entrepreneur vous dise que cela n'inclut pas la pose. Il pourra alors vous imposer le prix qu'il veut pour la main-d'oeuvre nécessaire à l'installation, ce qui dégonflera d'autant votre budget de 5 $ le pied carré. À moins de payer un extra.

Parfois, les extras résultent de découvertes qui surviennent en cours de chantier, comme de la moisissure dans la salle de bains. En démolissant, l'entrepreneur découvre qu'il devra refaire la structure qui est pourrie, ce qui fera grimper la note.

Mais pour éviter ce genre de mauvaises surprises, vous pourriez demander à votre entrepreneur de faire quelques ouvertures pour vérifier l'état des lieux avant de signer le contrat. Si ce n'est pas possible, vous pouvez tout de même prévoir au contrat le prix des travaux additionnels qui pourraient s'avérer nécessaires. 

Il est toujours plus facile de négocier avant de signer que lorsque les murs sont ouverts.

Pour éviter les dérapages, vous devriez aussi insérer une clause dans votre contrat prévoyant que l'entrepreneur devra vous informer, par écrit et à l'avance, de tous les travaux qui occasionneront des frais supplémentaires. Cela vous permettra de garder le compte des extras plus facilement, de refuser les ajouts trop coûteux ou d'enlever d'autres éléments du contrat pour respecter votre enveloppe initiale.

Un petit extra par-ci, par-là, ce n'est pas si grave. Mais quand on les additionne et qu'on se retrouve avec une surcharge inattendue de plusieurs milliers de dollars à la fin du chantier, ce n'est plus drôle du tout.

LES TRAVAUX BÂCLÉS

Par ailleurs, beaucoup de consommateurs s'arrachent les cheveux parce que leur entrepreneur a bâclé les travaux. Comme ça se joue souvent au niveau de la finition, il est souvent difficile de déterminer ce qui est tolérable ou non.

Les joints de céramique sont trop larges ? Hum, c'est une question de goût, vous dira l'entrepreneur. Le plancher de bois franc n'est pas tout à fait droit ? À qui la faute ? La maison date des années 60, et ce n'est pas facile de faire du neuf avec du vieux, vous répondra l'entrepreneur.

Comment régler le litige ? Dans le contrat, vous pouvez prévoir un mode de résolution de conflit en déterminant à l'avance un architecte ou un technologue qui jouera le rôle d'expert et tranchera la question.

Autrement, les consommateurs insatisfaits peuvent se plaindre à l'Office de la protection du consommateur (OPC) ou à la Régie du bâtiment du Québec (RBQ), ce qui peut mettre de la pression sur l'entrepreneur.

Vous pouvez même envoyer une mise en demeure à l'entrepreneur, copie conforme à la compagnie d'assurance qui lui fournit son cautionnement auprès de la RBQ. Précisez que vous avez l'intention de réclamer le cautionnement lorsque vous obtiendrez gain de cause. « C'est très efficace », jure Me Coursol. L'entrepreneur n'a pas les moyens de perdre son cautionnement. Plus il a de réclamations, plus ses primes augmentent.

LE CHANTIER INTERMINABLE

Les retards sont une autre grande maladie chronique dans l'univers de la rénovation. L'entrepreneur entame les travaux, puis disparaît sur d'autres chantiers qu'il mène en parallèle. Ça n'en finit plus de finir.

Encore une fois, un bon contrat est le meilleur outil dont les clients disposent pour se prémunir contre les délais indus.

Les consommateurs devraient prévoir un calendrier détaillé des travaux avec des dates précises pour chacune des étapes (ex. : démolition, électricité et plomberie, finition). Les paiements doivent suivre l'évolution du chantier. Par exemple, on peut donner un acompte de 20 % à la signature du contrat, suivi par trois paiements de 20 % à chacune des différentes étapes. Dans la mesure du possible, un dernier versement de 20 % serait effectué 35 jours après la fin des travaux, pour se protéger contre les hypothèques légales.

« On voit souvent des gens qui ont pratiquement tout payé, alors que les travaux n'ont pas encore été réalisés à moitié. »

- Me Claude Coursol

Lorsque les paiements suivent l'évolution des travaux, le consommateur est en meilleure position pour forcer l'entrepreneur à terminer les travaux. C'est encore plus vrai si le contrat comporte une clause de défaut qui permet au client de mettre fin unilatéralement au contrat, avec un avis de quelques jours, sans payer le reste de la facture, si l'entrepreneur ne respecte pas ses obligations.

Encore un bel exemple qu'un contrat béton, c'est vraiment les fondations d'un projet de rénovation réussi.